S’électrocuter, ça peut être grave
En Suisse, environ 110 accidents d’électrisation sont annoncés chaque année, entraînant quatre à cinq décès annuels. Ils surviennent principalement à domicile ou dans des circonstances professionnelles. Le médecin urgentiste doit penser à plusieurs lésions, parfois graves, et qui ne sont pas toujours immédiatement apparentes.
Les données épidémiologiques relatives à ces accidents sous-estiment probablement leur incidence car beaucoup d’événements mineurs survenant au travail ou dans le cadre domestique ne donnent pas lieu à une consultation médicale ou à une déclaration d’accident.
Les hommes sont plus fréquemment touchés que les femmes, et les accidents d’électrisation concernent souvent les enfants en bas âge, généralement à domicile, ainsi que les jeunes adultes dans un contexte professionnel.
La mortalité varie entre 2-3% (basse tension) et 5-30% (haute tension). Elle dépend des complications cardiaques aiguës, de l’étendue et de la profondeur des brûlures, ainsi que des traumatismes liés aux chutes associées. La morbidité liée aux séquelles parfois permanentes est par ailleurs non négligeable.
Quelle prise en charge ?
Une connaissance adéquate des facteurs physiques déterminant l’importance des lésions et du type de répercussions cliniques attendues permet au médecin urgentiste de proposer aux victimes d’accidents d’électrisation une évaluation, un traitement ainsi qu’une orientation appropriés. La prise en charge repose sur la restauration des fonctions vitales, le traitement des traumatismes éventuels et l’identification des patients devant bénéficier d’une surveillance plus approfondie.
Différentes lésions
L’intensité du courant passant à travers les tissus dépend essentiellement du voltage et de la résistance cutanée. Un accident d’électrisation peut entraîner des lésions organiques par trois mécanismes distincts. Des lésions directes dues au passage du courant électrique dans l’organisme; des lésions secondaires lors de la transformation de l’énergie électrique en énergie thermique; des lésions mécaniques dues à des contractions musculaires violentes ou aux chutes.
La peau est généralement la première barrière au passage du courant. Son degré de résistance varie en fonction de la localisation et de l’humidité. L’atteinte visible peut être mineure mais ne doit pas faire préjuger des dégâts sous-jacents. Les accidents d’électrisation à basse tension engendrent des brûlures de contact, superficielles et bien délimitées aux points d’entrée et de sortie du courant. L’examen clinique doit donc être détaillé et attentif. Les accidents d’électrisation à haute tension produisent des lésions indolores, claires (jaune-gris), ressemblant à des cratères centrés par de la nécrose. Ils peuvent parfois relativement épargner la surface cutanée, et par là faussement rassurer le clinicien car elles génèrent souvent des dégâts considérables en profondeur, dans le tissu sous-cutané, le muscle et l’os.
Assurer la sécurité des sauveteurs et du blessé
Dans l’optique de la protection des sauveteurs et du bien-être du patient, la sécurité optimale réside dans l’intervention conjointe d’une équipe de sapeurs-pompiers qui disposent des compétences requises pour éviter tout accident secondaire. Si cette intervention n’est pas possible dans des délais raisonnables, la source de courant doit être identifiée et toujours débranchée à son origine (prise murale, disjoncteur central de l’appartement, voire de l’immeuble). Le courant des lignes à haute tension peut former un arc électrique de plusieurs dizaines de centimètres qui interdit toute approche. Outre leur interruption, ces lignes doivent faire l’objet d’une mise à terre avant tout travail à proximité. Cette opération ne peut être réalisée que par l’entreprise de distribution avec laquelle un contact direct est indispensable.
Après l’évaluation initiale et la mise en œuvre des mesures de réanimation les informations essentielles à rechercher auprès du patient ou des témoins sont: le type de courant, le voltage, le point de contact probable, la durée du contact, la nature du milieu, les mécanismes lésionnels associés (chute, brûlures) et, enfin, les symptômes et leur évolution. Dans les cas graves et en fonction de la nature des lésions, le transport primaire vers un centre des brûlés doit être discuté.
Il n’y a pas de recommandations relatives à l’hospitalisation des cas d’apparence bénigne. Un examen médical détaillé par un praticien expérimenté et un électrocardiogramme de bonne qualité constituent des investigations minimales auxquelles il convient d’ajouter des consignes d’autosurveillance et la planification d’un suivi médical. Si ces conditions ne sont pas réalisées, la prudence impose une consultation dans un service d’urgences.
Une prise en charge adéquate et précoce des lésions des os et des muscles et des blessures cutanées peut considérablement modifier le pronostic fonctionnel. Le recours rapide à un spécialiste est donc à adopter au moindre doute.
Référence
Adapté de « Les accidents d’électrisation », Dr Marc Niquille, Brigade sanitaire cantonale Service des urgences, Département de médecine communautaire, de premier recours et des urgences, HUG ; Drs Olivier Grosgurin et Christophe Marti, Service de médecine interne générale, Département de médecine interne et réhabilitation et gériatrie, HUG, in Revue médicale suisse 2011; 7: 1569-73.
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