Faut-il prendre des résolutions en début d’année?

Dernière mise à jour 26/03/24 | Article
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90% des résolutions prises le 1er janvier seraient abandonnées. Le Dr Paco Prada, responsable du Service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), explique pourquoi et suggère des pistes pour des changements durables.

Les recherches en psychologie du développement sont unanimes: environ 90% des bonnes résolutions prises le premier jour de l’an ne perdurent pas au-delà de février. Pourtant, toutes les premières quinzaines de janvier, les salles de fitness constatent un pic de demandes d’abonnement. La grande majorité des résolutions du Nouvel An sont en effet liées au corps et à la santé: arrêter de fumer, perdre des kilos superflus, bouger davantage, etc. Pourquoi se fixe-t-on ce genre d’objectifs en janvier?

Des résolutions liées aux excès des fêtes

Pour le psychiatre Paco Prada, responsable du Service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise, il s’agit tout d’abord de comprendre les mécanismes psychiques sous-jacents aux bonnes résolutions: «Celles-ci suivent une période de fêtes et ce n’est pas un hasard. Les réunions de famille s’accompagnent de tensions psychiques, d’une charge émotionnelle importante et possiblement d’états mentaux gênants que les excès de nourriture, de boissons et de cadeaux ne compensent pas pleinement. Lorsque "l’orgie" est terminée, il se peut qu’elle laisse place à la crainte d’un certain vide. Une manière d’éviter de se connecter à cette réalité est de se plonger dans l’action, par exemple dans un plan de fitness. Se fixer des objectifs ambitieux sur le plan corporel permet aussi de mettre de côté un soi considéré comme négatif, car lié aux excès, pour se projeter vers un soi considéré comme meilleur.» Les bonnes résolutions participeraient ainsi à une sorte de rééquilibrage pour gérer nos anxiétés, nos fragilités et nos états mentaux.

Retrouver l’équilibre

Le psychiatre suggère de visualiser notre fonctionnement psychique à l’aide d’un mobile composé de différents axes en équilibre: affectif-cognitif, autonomie-contrôle, moi-autrui et interne-externe. «Lorsqu’on déséquilibre un des axes, le système cherche à retrouver une stabilité. Si, pour parer au déséquilibre produit par les fêtes, nous allons à l’autre extrême en termes de privation et de performance, notre psychisme va naturellement chercher à retrouver l’équilibre. Par exemple, s’il ne s’intègre pas dans mes équilibres psychiques, mon régime draconien entamé le 1er janvier ne va pas durer.»

Et ce n’est pas forcément une mauvaise nouvelle: pour le Dr Prada, ne pas tenir ses résolutions de début d’année résulterait plutôt d’une bonne santé mentale. «Perdurer dans des comportements de contrôle et de privation, dans lesquels la dimension cognitive l’emporte constamment sur l’affectif, n’est pas forcément un signe de bon fonctionnement. Cela ne rend pas heureux et n’améliore pas la santé de façon durable. Cela peut même mener à des comportements pathologiques, comme l’orthorexie (obsession d’une alimentation saine, ndlr) ou la bigorexie (addiction à la pratique excessive d’un sport, ndlr)

Petits ajustements durables

Le psychiatre considère cependant que le désir d’embellir son corps ou d’être en meilleure santé est positif: «Tout le monde souhaiterait s’améliorer ou être plus séduisant, pour soi-même et pour les autres.» Il existe cependant d’autres moyens d’amorcer des changements durables que des résolutions drastiques prises en début d’année. «Cela passe par la mentalisation, soit la capacité à comprendre les causes psychologiques de son comportement et de celui des autres. Mieux se connecter à ses émotions profondes permet de comprendre ses besoins et de trouver les clés d’un changement durable.» Ce dernier passe alors plus souvent par de menus ajustements liés à des plaisirs physiques simples, comme se connecter à son sentiment de satiété ou faire de petites balades autour de chez soi, que par des plans d’entraînement ambitieux. Il est aussi lié à nos relations bien plus qu’à notre propre volonté: nos proches peuvent motiver ou démotiver certains comportements. Et le psychiatre de souligner que «ce genre de changement peut s’amorcer toute l’année et n’est pas en lien avec les excès des fêtes».

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Article repris du site  pulsations.swiss

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