Cauchemars: quand la frontière se brouille entre rêves et réalité
Nous faisons tous de temps en temps des cauchemars, qui ont des contenus oniriques si intenses qu’ils nous réveillent. Or, quand ces rêves angoissants se manifestent régulièrement, plus d’une ou deux fois par semaine, on parle de parasomnie. Ce trouble apparaît à partir de l’âge de 3 ans.
Plus fréquent chez les filles, il est probablement dû à un dysfonctionnement du système qui contrôle le contenu émotif des rêves. De ce fait, les «parasomniaques» ont du mal à réagir à leurs songes avec un certain détachement. Les gens angoissés ou stressés sont plus sujets que les autres aux cauchemars, de même que ceux qui souffrent de dépression ou de pathologies psychiatriques. Mais le trouble peut aussi avoir une origine génétique qui empêche le sommeil «d’éteindre» les circuits neuronaux émotionnels.
Lorsque les cauchemars sont réguliers, et surtout lorsqu’ils sont récurrents –un phénomène que l’on retrouve souvent lors de stress post-traumatique–, les médecins ont recours à des techniques de désensibilisation. Ils demandent à leurs patients de raconter ou d’écrire leurs rêves et d’inventer une fin heureuse à l’histoire qui hante habituellement leurs cauchemars, afin que ceux-ci perdent un peu de leur contenu émotif.
Vivre ses rêves
Il existe d'autres formes de parasomnies cauchemardesques: certains semblent vivre littéralement leurs mauvais rêves. Normalement, nos muscles sont au repos complet lors de la phase de sommeil paradoxal, durant laquelle nous rêvons. Mais les personnes atteintes d’un trouble du comportement en sommeil paradoxal vivent leurs songes et réagissent en conséquence. Si elles rêvent par exemple qu’un inconnu pénètre dans leur chambre, elles sont capables de se lever pour chasser l’intrus. Dans ces cas, le contenu onirique est souvent angoissant, ce qui conduit à des risques d’accident. Il arrive aux personnes souffrant de ce trouble de se blesser en se jetant hors du lit pour se protéger d’un danger imminent. Il s’agit d’une des rares parasomnies qui touchent surtout les adultes, en particulier les hommes à partir de 50 ans. Le trouble peut être idiopathique (sans cause connue), mais il peut aussi être associé à une narcolepsie (état de somnolence permanent) ou à la consommation de médicaments, comme certains antidépresseurs. Cette parasomnie peut aussi être liée à des maladies neurodégénératives, comme la maladie de Parkinson. Chez les personnes atteintes, le trouble du sommeil serait ainsi le signe d’un problème neurologique débutant.
Si la présence d’une parasomnie est avérée, que faire? La première chose est de sécuriser son environnement: mieux vaut éviter d’avoir à sa portée un couteau ou un objet contondant par exmeple. Par ailleurs, deux médicaments ont prouvé leur efficacité: le clonazépam, qui a des propriétés sédatives, hypnotiques et anxiolytiques, et la mélatonine. Toutefois, un patient sur dix ne répond pas au traitement et doit dormir attaché à son lit. On peut rêver mieux!
A quoi servent les rêves?
Cette question fait débat depuis la nuit des temps. Pour Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, les rêves sont l’accomplissement de désirs refoulés. Le neurobiologiste français Michel Jouvet considère quant à lui que le rêve n’est ni du sommeil, ni de l’éveil, mais qu’il constitue un troisième état du cerveau, qui aurait pour fonction d’assurer la reprogrammation génétique de l’individu. D’autres chercheurs avancent l’hypothèse que les rêves serviraient à réguler nos émotions, pour nous décharger des mauvais souvenirs. Rien n’interdit de rêver que l’on aura un jour le fin mot de l’histoire.
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Adapté de J’ai envie de comprendre… Le sommeil, de Elisabeth Gordon, en collaboration avec Raphaël Heinzer & José Haba-Rubio, Editions Planète Santé, 2016.
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