Avances et retards de phase: quand le sommeil se décale
Notre horloge interne fonctionne selon l’alternance jour/nuit. Tout ce qui trouble sa cadence retentit sur la durée et la qualité de notre sommeil. L’exemple qui vient le plus rapidement en tête est le décalage horaire, mais les retards et avances de phases de sommeil peuvent être liés à d’autres facteurs, comme le style de vie à l’adolescence, l’âge avancé ou le travail de nuit.
Couche-tard ou couche-tôt?
Commençons par l’adolescence. Le phénomène est bien connu: les adolescents peinent souvent à trouver le sommeil avant 2 ou 3h du matin et ils ont du mal à se réveiller le lendemain. Ce retard de phase a une origine biologique. Mais certains comportements propres à cet âge accentuent ce décalage, comme la consommation de caféine et de boissons énergisantes ou les sorties tardives le week-end. Le fait de rester le soir devant son ordinateur ou son téléphone portable n’aide pas non plus à synchroniser l’horloge interne des jeunes. La luminosité des écrans contribue en effet à les empêcher de s’endormir, en diminuant la sécrétion de mélatonine, l’hormone du sommeil.
Dans les cas les plus sévères, ce retard de phase peut avoir de fâcheuses conséquences. Les adolescents concernés n’arrivent plus à suivre les cours et se coupent de toute vie sociale. On peut alors leur suggérer de prendre de la mélatonine en début de soirée et de s’exposer le plus possible à la lumière le matin, par exemple avec des séances de luminothérapie. On peut aussi leur proposer une chronothérapie: on les pousse à se coucher deux heures plus tard que d’habitude. Le jour suivant, on retarde encore de deux heures le moment de se coucher. Et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’ils en arrivent à aller au lit entre 22 et 23h.
Certaines personnes ont au contraire tendance à s’endormir très tôt le soir. Elles ont envie d’aller au lit à 17h et se réveillent à 2h du matin, sans arriver à retrouver le sommeil. Cette avance de phase touche surtout les personnes âgées. Lorsque les couche-tôt souffrent de ce décalage, on leur propose une cure de luminothérapie. Dès qu’ils commencent à avoir sommeil, on leur recommande de rester devant une forte lampe pendant une demi-heure. Puis, tous les quatre jours par exemple, ils doivent retarder cette exposition à la lumière, jusqu’à ce qu’ils arrivent à l’horaire qui leur convient.
Horaires de travail décalés
Qui dit travail de nuit dit inversion des phases de veille et de sommeil. Les difficultés sont encore plus grandes pour celles et ceux qui font les 3 x 8 et alternent les postes du matin, de l’après-midi et de la nuit. Pour les aider à s’adapter à ce rythme contre-nature, on leur conseille d’éclairer leur lieu de travail avec une lumière forte qu’elles éteindront une ou deux heures avant de partir. Le matin, une fois dehors, elles devront porter des lunettes de soleil afin d’éviter de s’exposer à la lumière du jour. Arrivé chez soi, il est préférable de ne pas aller dormir tout de suite. Mieux vaut aller se coucher un peu plus tard, ou morceler son sommeil en dormant quelques heures le matin et quelques heures en fin d’après-midi. Après avoir pris de la mélatonine pour favoriser leur sommeil, les travailleurs de nuit pourront aller se coucher, dans une pièce bien isolée du bruit et de la lumière. Pendant le week-end, la tendance serait de reprendre un horaire normal. Mieux vaut toutefois ne se décaler qu’à moitié par rapport aux habitudes de la semaine et aller par exemple se coucher vers 3h du matin.
________
Adapté de J’ai envie de comprendre… Le sommeil, de Elisabeth Gordon, en collaboration avec Raphaël Heinzer & José Haba-Rubio, Editions Planète Santé, 2016.
Un espoir contre les cauchemars
En jet-lag, nos horloges internes perdent le nord
Sommeil biphasique : dormir en un bloc de huit heures, une invention récente
La découverte dʹune nouvelle horloge dans notre cerveau pour structurer le sommeil
Le laboratoire de l'Unil où lʹon utilise le sommeil pour comprendre le cerveau
Couvertures lestées: la solution pour un meilleur sommeil?
Insomnies
Les troubles du sommeil constituent un véritable problème de santé publique, tant par leur fréquence que par leurs répercussions humaines, sociales et économiques.