La déchirure du ménisque ne touche pas que les sportifs
De quoi on parle
Au lendemain de sa demi-finale à l’Open d’Australie, Roger Federer s’est déchiré le ménisque. Il a été opéré le 3 février et écrit sur son site que ses médecins lui ont «assuré que l’opération s’était bien déroulée et qu’avec une rééducation adaptée je serai bientôt en mesure de revenir sur le circuit». Le Bâlois a déclaré forfait pour les tournois de Rotterdam (8-21 février) et de Dubaï (22-27 février), mais il pourra peut-être participer aux masters californiens d’Indian Wells, qui débuteront le 10 mars.
On est accroupi et on se lève brusquement sans s’apercevoir que l’on fait pivoter son genou. Il suffit souvent d’un faux mouvement de ce genre pour se déchirer le ménisque. La blessure est d’ailleurs fréquente. Non seulement chez les sportifs, comme Roger Federer, qui mettent leurs genoux à rude épreuve, mais aussi chez tout un chacun. D’autant plus que, à mesure que l’on avance en âge, le tissu se fragilise, ce qui facilite les lésions.
Un rôle essentiel dans la mobilité
Cachés à l’intérieur des genoux, les ménisques sont des «fibrocartilages»: ils ont la consistance d’un caoutchouc relativement dur et ressemblent à «des joints de robinet», explique Daniel Fritschy, spécialiste de chirurgie orthopédique à l’Hôpital de La Tour, à Meyrin (GE). Ils permettent l’emboîtement entre le cartilage du fémur et celui du tibia et jouent un rôle essentiel dans la mobilité. «Ils assurent une partie de la stabilité du genou en tenant lieu de cale et ils amortissent les chocs en répartissant les tensions qui s’exercent sur les genoux lorsque l’on fait certains mouvements.» Durant la course, par exemple, on fait passer à chaque pas cinq ou six fois le poids de son corps sur ses genoux, qui n’y résisteraient pas sans le précieux amortisseur.
Quels sports malmènent le plus le ménisque?
Roger Federer ne s’est, semble-t-il, pas blessé sur un court de tennis mais en faisant un geste de la vie quotidienne. Comme tous les athlètes qui sollicitent beaucoup leurs genoux, il avait cependant un risque accru de se déchirer le ménisque. A cet égard, les sports les plus à risque, pour les professionnels comme pour les amateurs, sont ceux qui impliquent «des sauts, des pivots de la jambe et des contacts entre joueurs, qui sont les mouvements les plus dangereux pour le ménisque», précise Daniel Fritschy, spécialiste de chirurgie orthopédique à l’Hôpital de La Tour, à Meyrin (GE). C’est notamment le cas du basket, du hand-ball, du volley-ball et du tennis, mais surtout, poursuit le médecin, «du foot et du ski, qui sont nos deux principaux pourvoyeurs de patients».
Au cours du temps, et «dès l’adolescence», précise le chirurgien, le tissu perd peu à peu de son élasticité. Mais c’est à partir de 50 ans que la dégénérescence commence à entraîner de sérieux risques de lésion. Toutefois, on peut se déchirer le ménisque à tout âge, simplement «en se baissant pour ramasser un objet ou en se levant d’une chaise», souligne Gérald Gremion, médecin-chef du Swiss Olympic Medical Center du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) à Lausanne. Même s’il passe souvent inaperçu, le problème est plus fréquent qu’on ne le croit. «On a constaté que, lorsqu’on fait une IRM à des personnes ayant entre 30 et 50 ans qui ne se plaignent pourtant pas du genou, un tiers d’entre elles ont une lésion du ménisque», explique le médecin du sport.
Le problème peut donc affecter M. et Mme Tout-le-monde. Toutefois, les sportifs sont particulièrement concernés (lire encadré). Il en est de même pour ceux que leur métier oblige à travailler souvent à genoux, comme les carreleurs ou les électriciens. Au siècle dernier, les travailleurs des mines étaient aussi spécifiquement touchés. «Les lésions du ménisque ont d’ailleurs été découvertes chez des mineurs allemands qui remontaient à l’air libre avec un genou coincé. On a alors constaté que l’on pouvait les soigner par une ablation du ménisque.»
Une chirurgie a minima
C’est de l’entre-deux-guerres que datent les débuts de la chirurgie du ménisque. Depuis, celle-ci a bien évolué. Les praticiens n’ouvrent plus le genou comme cela s’est fait pendant longtemps mais utilisent l’arthroscopie, technique beaucoup moins invasive qui consiste à insérer un tube muni d’une mini-caméra et de fins instruments dans l’articulation.
Mais la principale évolution a eu lieu dans les années 1970-1980. Jusque-là, il était d’usage d’ôter l’intégralité du ménisque, ce qui augmentait considérablement le risque de souffrir d’une arthrose plus tard. C’est pourquoi la pratique actuelle vise à «sauvegarder le ménisque», selon les termes de Daniel Fritschy, donc d’opérer a minima. Soit en suturant la partie déchirée du ménisque, lorsqu’elle est désinsérée ou déchirée à la périphérie du genou –une zone qui cicatrise bien–, soit en n’enlevant que la portion abîmée. Dans ce cas, «le système de cale est un peu affaibli, comme un joint de robinet qui tient moins bien si vous en enlevez un morceau», explique le chirurgien. Mais cela n’empêche pas de reprendre le sport, ni même la compétition.
Les athlètes «pour qui le temps compte» sont le plus souvent opérés rapidement alors que, dans la population générale, «on préfère attendre que certains éléments se cicatrisent d’eux-mêmes», précise Gérald Gremion. En revanche, lorsque la lésion est due à l’usure du temps, mieux vaut souvent s’abstenir d’opérer, ne serait-ce que pour éviter les risques d’arthrose.
Des précédents célèbres
La déchirure du ménisque est une blessure fréquente chez les sportifs de haut niveau, et le tennisman bâlois a eu des prédécesseurs célèbres. Notamment le skieur valaisan Pirmin Zurbriggen, resté dans les annales après avoir remporté les championnats du monde de 1985 à Bormio, en Italie, trois semaines seulement après avoir été opéré! «Zurbriggen n’avait alors que 22 ans, commente Gérald Gremion, médecin-chef du Swiss Olympic Medical Center du CHUV, à Lausanne. A 34 ans, Roger Federer a probablement souffert d’une lésion due à la dégénérescence de son ménisque, plutôt qu’une déchirure provoquée par un accident.» Par ailleurs, dans les années 1980, les athlètes retournaient rapidement sur les pistes ou les terrains de jeu. Actuellement, «on estime qu’il leur faut environ un mois de rééducation avant de reprendre la compétition». Le médecin du sport pense donc qu’il «est possible» que Roger Federer puisse participer, en mars, soit cinq semaines après son arthroscopie, aux masters d’Indian Wells, en Californie.
Greffes ou cultures
Il est aussi possible de recourir à la greffe. Des transplantations ont déjà été pratiquées et ont donné des résultats encourageants. Toutefois, faute de tissus disponibles, ce type d’intervention est très rare. «Il n’existe qu’une seule banque de ménisque en Europe, à Gand en Belgique. En outre, l’opération n’est pas facile et elle laisse le patient sur deux cannes pendant deux mois», explique Daniel Fritschy.
L’alternative serait d’utiliser des ménisques artificiels. Des essais ont été tentés avec des ménisques à base de collagène bovin ou de polyuréthane mais ne sont pas concluants. Reste à espérer que l’on parviendra à cultiver des ménisques comme c’est déjà le cas pour le cartilage. «On va probablement y arriver un jour, estime le chirurgien genevois. Mais il faudra alors que le tissu soit biocompatible, assez résistant, et que l’on puisse l’implanter.»
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