Médecine légale: ces morts violentes que personne ne détecte
(TEXTE Aude Raimondi)
Lors d’un décès dans un milieu non médicalisé, par exemple à domicile, les médecins appelés sur place pour constater la mort sont souvent des généralistes. Or, ceux-ci n’ont pas toujours reçu de formation spécifique en médecine légale, une branche peu présente dans leur cursus universitaire. Un manque de formation qui pourrait expliquer pourquoi, parfois, d’importantes blessures ne sont pas relevées. Par ailleurs, la Suisse ne compte que sept instituts spécialisés dans ce domaine, dont un seul en Suisse romande.
Des chiffres qui interpellent
Il y a trois ans déjà, Christian Jackowski, directeur de l’Institut médico-légal de Berne, citait de sérieuses études allemandes aux résultats inquiétants. Plus de la moitié des morts violentes ne seraient pas détectées, la faute à un examen du corps déficient. Selon lui, la Suisse n’est pas en reste: «Je suis convaincu que ces chiffres sont réels, déclare-t-il. Dans notre travail quotidien, nous voyons régulièrement des morts violentes qui ne sont pas repérées lors du premier examen du corps». A noter que lorsque le médecin responsable de constater le décès certifie une mort naturelle, aucun autre examen complémentaire n’est en principe effectué.
Des erreurs parfois grossières
Or, d’importantes erreurs peuvent être commises. Récemment à Berne, un homme âgé est retrouvé mort, effondré devant le lavabo de sa salle de bains. Le médecin de famille appelé sur place reste à distance et remplit le certificat de décès en cochant la case «mort naturelle». Plus tard, lorsque l’employé des pompes funèbres soulève le corps, il découvre un couteau et de nombreuses plaies à l’abdomen. L’enquête démontrera qu’il s’agissait en fait d’un suicide, une mort violente qui a bien failli ne pas être identifiée comme telle.
Il est temps d’agir
Des mesures sont néanmoins envisagées afin de pallier le problème. Certains cantons, comme le Valais, ont engagé un médecin légiste pour venir en aide aux intervenants sur le terrain. Dans plusieurs pays étrangers comme l’Allemagne, un second examen du corps est obligatoire avant toute incinération. Une solution qui pourrait permettre de réduire le nombre d’erreurs.