Le cœur, pompe autonome mécanique et électrique
Le cœur, siège de l’amour?
Avoir le cœur lourd, léger, gros, brisé, avoir un coup de cœur… la langue française est truffée d’expressions comportant le mot «cœur» pour évoquer l’amour et les sentiments en général. Mais d’où cela vient-il? L’explication serait à chercher du côté des réactions humaines physiologiques primitives. «Face à une émotion forte ou à un stress, notre organisme réagit de manière purement animale. La respiration s’accélère et le cœur bat la chamade: la fréquence et le débit cardiaque augmentent, comme une forme de préparation animale à une action qui sera soit la fuite, soit la peur ou l’attaque», explique le Dr Olivier Müller, cardiologue au CHUV. Ce n’est donc pas non plus un hasard si, lors d’un rapport sexuel, le cœur accélère, dans la mesure où l’individu est fortement sollicité tant sur le plan physique qu’émotionnel.
Boum, boum, boum… Sans ces battements, la vie est impossible. De la taille d’un poing, le cœur est logé au centre de la cage thoracique, entre les poumons. Le muscle cardiaque, ou myocarde, est divisé en deux grandes parties: le cœur droit et le cœur gauche. Son activité est celle d’une pompe: il fait circuler le sang dans l’organisme sous l’effet de contractions.
Le sang part du cœur gauche pour nourrir les tissus et organes. Une fois qu’il leur a apporté oxygène et nutriments, il retourne, grâce au circuit veineux, vers le cœur droit. Le sang veineux emprunte les veines caves inférieure (sous le cœur) et supérieure (au-dessus), toutes deux reliées à l’oreillette droite. L’oreillette est reliée au ventricule via une valve qui empêche le sang de refluer lors de la phase de dilatation. Sous l’effet de la contraction du ventricule droit, le sang passe ensuite dans les poumons, via la valve, puis l’artère pulmonaire. Il y est oxygéné et le gaz carbonique éliminé. Ce sang oxygéné «rouge» retourne ensuite, via les veines pulmonaires, dans l’oreillette gauche, puis par la valve mitrale dans le ventricule gauche. De ce ventricule, il entre à chaque contraction dans l’aorte, le plus gros vaisseau qui donne naissance à l’ensemble des artères et artérioles du corps.
Le cœur, c’est en moyenne:
- Un poids qui varie entre 200 et 300 g (1/200e du poids du corps) selon les individus.- Au repos, entre 60 et 90 pulsations par minute et un débit de 5 litres de sang.
- Pendant un effort, entre 120 et 180 pulsations par minute et un débit de 8 litres de sang.
- 86 000 battements par jour, soit 31 millions par an.
Un système autonome
Le cœur a la particularité d’être un système autonome, commandé par une activité mécanique et électrique qui lui est propre. «Un patient peut être en mort cérébrale mais avoir le cœur qui bat toujours», décrit le Dr Olivier Müller, cardiologue au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Un système électrique gère le rythme cardiaque et commande les impulsions, sortes de signaux électriques envoyés au muscle pour qu’il se contracte. De même, c’est un système autonome qui régit le débit sanguin propulsé par la pompe. Le débit s’adapte à l’activité, poursuit le spécialiste: «Lors d’un effort, la fréquence cardiaque, le débit sanguin et la quantité de sang augmentent pour répondre aux besoins en énergie des muscles, fournis par l’oxygène et les nutriments présents dans le sang.»
Avec l’âge, et en fonction du mode de vie ou des prédispositions, le cœur peut s’abîmer. Selon des chiffres de l’Office fédéral de la statistique (2014), entre 65 et 84 ans, les maladies cardio-vasculaires sont la deuxième cause de mortalité après les cancers. Après 85 ans, elles arrivent en tête. Il est aujourd’hui conseillé de faire un dépistage des facteurs de risque des maladies cardiovasculaires dès 40 ans, voire plus tôt en cas d’antécédents familiaux (pression artérielle, diabète, cholestérol) ou d’une mauvaise hygiène de vie, et de le renouveler tous les cinq ans. En cas de risques avérés ou de suspicion, des examens plus poussés seront réalisés (test d’effort et/ou imagerie). Parmi les pathologies, citons: les maladies des artères coronaires, les troubles du rythme cardiaque, les maladies des valves et les cardiomyopathies, qui affectent le muscle cardiaque.
Les maladies coronariennes
La maladie coronarienne est la plus fréquente. Elle est due à un dépôt de plaques d’athérome (dépôt par accumulation d’éléments tels que de la graisse, des tissus fibreux, du calcaire…) dans ces artères très particulières: en effet, le cœur n’est pas oxygéné par le sang qui le traverse, mais par ces petites artères qui l’entourent en formant une sorte de couronne (d’où le terme de «coronaire»). Ainsi, quand ces dépôts (athérosclérose) gênent le passage du sang, le cœur «souffre» et émet un signal douloureux: c’est l’angine de poitrine. Si la plaque se fissure, un caillot de sang se forme et bouche complètement l’artère: c’est l’infarctus du myocarde, la maladie cardiaque la plus mortelle. Des douleurs thoraciques irradiant dans la mâchoire et le bras gauche en sont les symptômes typiques. Dès qu’ils se manifestent, il faut appeler les premiers secours au plus vite (numéro de téléphone 144). La pose d’un «stent», minuscule cylindre métallique, permet dans de nombreux cas de rouvrir l’artère et d’assurer le passage du sang.
Les troubles du rythme cardiaque
Soit ils sont banals, soit ils constituent une urgence vitale s’ils sont suivis d’une perte de connaissance. La fibrillation auriculaire est le plus courant de ces troubles et survient le plus souvent au-delà de 60 ans. Elle résulte d’un dysfonctionnement du circuit électrique et se caractérise par des battements rapides, irréguliers et non coordonnés des oreillettes (le cœur peut battre entre 350 et 600 fois par minute). Les ventricules, qui ne parviennent pas à contracter pas aussi rapidement, peinent à s’adapter et leur fréquence devient irrégulière. Selon Etienne Pruvot, cardiologue au CHUV, «on assiste aujourd’hui à une véritable épidémie de fibrillation auriculaire», liée à l’expansion de la sédentarité et à une alimentation trop riche en gras et en sucre. Traiter cette pathologie est essentiel afin de diminuer les risques de malaises et/ou d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) qui lui sont associés. Elle trouble en effet la fluidité de la circulation sanguine et favorise le développement de caillots.
Les maladies des valves
Les valvulopathies sont des atteintes des valves cardiaques, ces feuillets qui séparent les quatre cavités du cœur et évitent au sang de refluer. Ce terme regroupe différents problèmes: infection d’une valve (ou endocardite), malformation congénitale ou dégénérescence. Des antibiotiques sont nécessaires pour lutter contre l’infection. Dans les autres cas, on a recours à la chirurgie pour remplacer les valves défaillantes.
Les cardiomyopathies
Les cardiomyopathies sont un autre type d’affection cardiaque. Parmi elles, l’hypertrophie du cœur, qui résulte d’une hypertension ou de facteurs génétiques et se manifeste par des difficultés respiratoires. Elle conduit, dans certains cas, à une mort subite lors d’un effort physique intense. Le traitement consiste à stabiliser l’hypertension si elle en est la cause, ou à opérer pour enlever une partie du muscle cardiaque, voire le remplacer par une greffe du cœur dans les cas les plus graves.
Il arrive que le cœur, trop atteint dans ses fonctions, ne puisse plus faire son travail seul: c’est l’insuffisance cardiaque terminale. «Pour y remédier, plusieurs solutions existent, explique le professeur Matthias Kirsch, spécialiste du cœur artificiel au CHUV: la transplantation cardiaque avec greffe de donneur ou la mise en place d’une assistance mécanique (cœur artificiel total ou assistance ventriculaire).» De nombreux dispositifs existent visant à remplacer la pompe en attendant une greffe ou durablement. La rareté des dons d’organes stimule la recherche pour créer des dispositifs fiables et de plus en plus miniaturisés.
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