Accompagner les familles avec un enfant gravement malade
La prise en charge d’un enfant malade ou hospitalisé est pensée de façon globale, en anticipation de ses besoins, mais aussi en incluant ses proches. «Ce soutien parallèle met la famille dans des conditions plus favorables pour avancer dans la prise en charge», confie le Pr Marc Ansari, responsable de l’Unité d’onco-hématologie pédiatrique, à l’origine de ce programme pilote. Une matinée par semaine, le Dr Santosh Itty s’associe à la Dre Ivaine Droz-dit-Busset, tous les deux pédopsychiatres et thérapeutes de famille systémique, pour rencontrer les familles. Une thérapie de liaison qui s’adapte à la particularité de la situation et fait le trait d’union avec les oncologues et les pédopsychiatres qui travaillent surtout avec l’enfant malade. «Nous aidons les proches à trouver des ressources pour avancer, sans les confronter à ce qui ne va pas, explique le Dr Santosh Itty. Chacun peut poser des questions, mettre des mots sur ce qu’il ou elle est en train de vivre, identifier ses forces et ses faiblesses, mais aussi reformuler un ressenti ou une situation.»
Pour Pierre* et Anna*, parents de Léo*, 10 ans, hospitalisé pour un sarcome d’Ewing, la rencontre avec les thérapeutes a permis d’aborder plusieurs aspects. Comment trouver un équilibre familial et conjugal? Comment vivre au jour le jour avec la maladie ? Ou encore, comment gérer ses propres émotions face à son enfant? «Ces séances nous ont aidés à différents niveaux, en particulier sur la perception de la maladie et la gestion du stress par notre fils. Il comprend parfois bien plus que ce qu’il exprime et souvent pour nous préserver.»
Les parents ne sont cependant pas les seuls bénéficiaires du programme. Frères, sœurs, oncles, tantes ou grands-parents, sont aussi invité·es à y participer. «C’est le modèle du fameux pendule de Calder: si un élément bouge, les autres bougeront aussi, illustre le Dr Itty. La maladie d’un enfant implique un bouleversement de l’équilibre parental et conjugal, mais peut aussi mettre en tension la relation des parents avec leurs propres parents ou avec les frères et sœurs.» La thérapie peut ainsi favoriser la compréhension et la communication au sein de la famille. «Nous nous sommes sentis reconnus dans notre chagrin, mais aussi dans nos forces, confient Marie* et Didier*, grands-parents de Léo. Nous avons réalisé que nous pouvions être complémentaires.»
Une fratrie très éprouvée
On les oublie souvent, mais les frères et sœurs sont pourtant embarqués de plein fouet dans l’épreuve de la maladie, endossant parfois de lourdes responsabilités. «Ils s’occupent du malade, consolent les parents, voient des choses difficiles, parfois malgré leur très jeune âge», explique le Pr Ansari. Une souffrance à laquelle peut s’ajouter paradoxalement un sentiment de jalousie, croissant à mesure que la famille et les médecins se focalisent sur la personne malade. «Le risque, si les choses ne sont pas exprimées, est qu’elles ressortent quelques années plus tard, avec d’importantes répercussions psychoaffectives ou des symptômes anxiodépressifs», ajoute le Dr Itty. D’où l’importance de se libérer tôt de certaines colères, d’exprimer ses rancœurs et de mettre des mots sur ce qui fait mal. «Nous voulons les aider à se libérer du poids de la maladie de leur fratrie, explique la Dre Ivaine Droz-dit-Busset. L’enfant bien portant mais aussi l’enfant malade, pourront alors grandir au mieux, sans porter une trop lourde culpabilité.»
Un soutien de la Fondation Children Action
Le programme de soutien aux familles d’enfants suivis en onco-hématologie a débuté en novembre 2019. Ce projet pilote est financé intégralement par la fondation Children Action, qui œuvre pour répondre aux besoins des enfants. Le Département de la femme, de l’enfant et de l’adolescent des HUG met un local de consultation à disposition des Drs Santosh Itty et Ivaine Droz-dit-Busset, formé·es aux problématiques de la thérapie familiale en oncologie.
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* Prénoms d’emprunt.
Article repris du site pulsations.swiss