Etre bronzé ne protège pas contre le cancer de la peau
Vous vous souvenez sans doute des premiers gros coups de soleil de votre enfance et adolescence. Souvenir douloureux. Et pire encore, un souvenir inscrit également dans votre peau, plus précisément dans l’ADN, endommagé par les brûlures du soleil. «Avec cinq coups de soleil, le risque de voir apparaître tôt ou tard un mélanome, le plus agressif et mortel des cancers de la peau, est doublé», note le Pr Michel Gilliet, dermatologue, chef du Service de dermatologie et vénéréologie du CHUV (Centre hospitalier universitaire vaudois).
Le mélanome est le cancer dont l’incidence augmente le plus en Suisse depuis plusieurs dizaines d’années, et le quatrième cancer le plus fréquent. On compte environ 1900 nouveaux cas et 270 décès par an. 30% surviennent avant l’âge de 50 ans, les deux sexes confondus. Mais avec plus de décès chez les hommes, qui s’observent moins que les femmes et tardent à consulter en cas de tache cutanée suspecte.
Facteurs et personnes à risque
«Etre bronzé n’est pas un signe de bonne santé et ne protège pas contre les coups de soleil, souligne le spécialiste. Le bronzage est une réaction de défense de la peau contre l’exposition excessive au soleil, non adaptée à la peau. Et il n’offre qu’une très faible protection, équivalant à un indice de protection 3 des crèmes solaires.»
Or, le facteur de risque principal de développer un mélanome est l’exposition excessive aux rayons UV, soit:
- les brûlures par le soleil (coups de soleil sévères, avec des cloques) en particulier durant l’enfance ou l’adolescence;
- l’exposition cumulative chronique au soleil (travail, loisirs à l’extérieur, etc.);
- l’utilisation régulière de solariums.
Les autres facteurs de risques sont liés à la personne:
- la peau et les cheveux clairs;
- les antécédents familiaux (premier degré: père, mère) de mélanome;
- les grains de beauté multiples –plus de 50– et/ou des grains de beauté atypiques (par leur aspect: forme et couleur);
- un antécédent personnel de mélanome;
- une immunosuppression (par exemple personnes atteintes du VIH ou patients traités avec des médicaments immunosuppresseurs).
Présenter un seul de ces facteurs est déjà un risque. De plus, ils se cumulent et se potentialisent: si par exemple quelqu’un a une peau très claire et un passé de plusieurs gros coups de soleil, cela multiplie la menace de mélanome par dix. Et un troisième facteur additionné multiplie ce risque par vingt!
Seule prévention: éviter les excès de soleil
Le seul moyen de prévenir un cancer de la peau, et notamment un mélanome, est de limiter l’exposition aux rayons UV:
- éviter l’exposition au soleil, surtout entre midi et 15 heures, et rester à l’intérieur dès un indice UV de 8*;
- se protéger au maximum en restant à l’ombre (où l’on risque aussi le coup de soleil) et en portant des vêtements anti-UV couvrant bras et jambes, un chapeau ou casquette, et des lunettes de soleil (avec protection anti-UV 100% jusqu’à 400 nanomètres);
- appliquer régulièrement de la crème solaire à haut indice de protection, notamment sur les zones du corps ne pouvant être couvertes (oreilles, visage, cou, nuque, mains), pour prévenir les coups de soleil;
- s’abstenir d’utiliser les solariums.
Pas de petits enfants au soleil
Les enfants ne devraient pas du tout aller au soleil avant l’âge d’un an et le moins possible jusqu’à quatre ans. Alors, ils peuvent jouer au soleil, mais en étant protégés (comme indiqué ci-dessus), avec notamment une crème solaire à haut indice de protection (30).
*www.uv-index.ch: l’Office fédéral de la santé publique publie quotidiennement les prévisions de l’index UV sur son site.
Quand se faire dépister?
Pour le Pr Gilliet, il n’y a néanmoins pas besoin d’instaurer un dépistage systématique du cancer de la peau. «Le patient présentant l’un des facteurs de risque, ou des grains de beauté d’aspect irrégulier, ou de nouveaux grains de beauté, apparus après l’âge de 40 ans, devrait consulter un dermatologue. Celui-ci contrôlera les grains de beauté à l’aide d’outils d’imagerie appelés dermatoscopes. Il excisera les lésions suspectes pour une analyse histologique, pour déterminer s’il s’agit ou non d’un cancer, ainsi que la nécessité d’un contrôle régulier, basé sur les facteurs de risque du patient.
«S’il s’agit d’un cancer, plus l’atteinte de la peau sera grande et profonde, moins bon sera le pronostic. Si la lésion cutanée a une profondeur inférieure à un millimètre, il suffit de ré-exciser plus large, avec des marges d’un centimètre, et le patient peut être guéri, explique le Pr Gilliet. Au-delà, la ré-excision devra être plus large encore et le taux de survie baisse rapidement. A quatre millimètres de profondeur, le taux de survie à cinq ans n’est ainsi plus que de 50%», déplore le spécialiste. Et en cas de métastases, le pronostic de survie moyenne est actuellement de huit mois environ. D’où l’importance d’une détection précoce!
Auto surveillance
Pour une détection précoce, il faut procéder à l’auto-observation régulière de ses grains de beauté (anciens et nouveaux). Une part importante de mélanomes se développe en effet à partir d’une telle tache pigmentée, sur n’importe quelle zone du corps, y compris les parties génitales et sous les ongles. Certains mélanomes ne formant pas de mélanine sont plus difficiles à identifier. La «règle ABCDE» facilite cette auto surveillance:
- A = asymétrie: la forme de la tache est-elle asymétrique?
- B = bords: ses bords sont-ils irréguliers et diffus?
- C = coloration: est-elle de colorations diverses au lieu d’être uniforme?
- D = diamètre: a-t-elle un diamètre supérieur à huit milimètres?
- E = évolution: change-t-elle de taille, couleur, forme ou épaisseur?
Si vous répondez oui à une seule ou à plusieurs de ces questions, il faut montrer votre grain de beauté à un dermatologue.
Liens et informations utiles
La Ligue suisse contre le cancer offre une série de brochures gratuites sur la prévention du cancer de la peau sur son site: www.liguecancer.ch
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Les brûlures peuvent être provoquées par la chaleur, l'électricité, les produits chimiques et le froid. Selon leur étendue et/ou leur profondeur, elles sont plus ou moins graves.
Mélanome
Le mélanome est un cancer de la peau. Il se développe à partir de grains de beauté qui changent d'aspect (forme, couleur, taille, épaisseur, etc.) ou en l’absence de lésion pré-existante.