Les nouvelles vertus vasculaires du régime méditerranéen
Depuis deux ou trois décennies nous avons appris à découvrir les vertus sanitaires du régime méditerranéen, cette alimentation caractérisée par la consommation prioritaire de fruits, de légumes et de céréales, préférés aux viandes et aux produits laitiers. Il s’agit d’un modèle nutritionnel «demeuré constant dans le temps et l’espace et dont les principaux ingrédients sont l’huile d’olive, les céréales, les fruits et légumes frais ou séchés, une proportion limitée de poisson, produits laitiers, viande et de nombreux condiments et épices». Un modèle désormais inscrit par l’Unesco au «patrimoine culturel immatériel de l’humanité».
Cette alimentation est connue pour ses multiples vertus: plus grande sensation de satiété (due à l'huile d'olive), prévention des maladies cardiovasculaires, longévité. Mais on est peut-être encore loin d’avoir tout exploré dans ce domaine. C’est ce que nous enseigne une étude dont les résultats viennent d'être publiés(1).
Circulation sanguine
L'équipe dirigée par le Dr Miguel Ruiz-Canela (Université de Navarre, Espagne) a évalué l'influence du régime méditerranéen sur la prévention de la maladie artérielle périphérique. Egalement connue sous le nom d’«artériopathie oblitérante des membres inférieurs» (AOMI), cette affection est la conséquence d’une atteinte obstructive des artères. Ce sont celles des membres inférieurs qui sont le plus souvent touchées, généralement à cause de lésions qui réduisent la circulation sanguine. Au fil du temps, on voit apparaître les symptômes d’une faible circulation sanguine au niveau des pieds (pieds froids, pâles ou bleutés), une douleur à la jambe lors d'une marche sur de courtes distances, et une lenteur croissante de guérison des écorchures des orteils, du pied ou de la jambe (des phénomènes qui peuvent conduire à des amputations).
En 2003, plusieurs équipes de recherche espagnoles se sont associées pour créer le groupe d'étude pluridisciplinaire PREDIMED (Prevención con dieta mediterránea) (2). Son but: étudier les propriétés diététiques de l'alimentation méditerranéenne traditionnelle et ses effets sur les maladies cardiovasculaires. C’est dans ce cadre que s’inscrit le travail publié aujourd’hui dans le JAMA.
Huile extra-vierge ou noix
L’étude a été menée entre 2003 et 2010 auprès de 7477 hommes (de 55 à 80 ans) et femmes (de 60 à 80 ans). Ces personnes ne souffraient pas d'artériopathie, mais souffraient d’un diabète de type 2 ou présentaient au minimum trois facteurs de risques cardiovasculaires. Les participants volontaires ont été répartis de façon aléatoire en trois groupes des mêmes proportions.
Le premier groupe a suivi un régime méditerranéen à base d'huile d'olive extra-vierge. Le deuxième, une diète méditerranéenne accompagnée de noix. Le troisième était le groupe de contrôle: ses membres ont observé une alimentation faible en graisses. Chaque trimestre, l’ensemble des participants a été soumis à un programme de sensibilisation nutritionnel. Enfin, dans un souci d’objectivité, les cas d’AOIM symptomatique ont été attestés par un comité qui a examiné chaque participant à l'aveugle.
L'étude est concluante: les chercheurs recensent dix-huit cas d’AOIM dans le premier groupe (huile d'olive extra-vierge) et vingt-six dans le deuxième (noix), contre quarante-cinq dans le groupe témoin. Ainsi, accompagné de noix ou d'huile d'olive extra-vierge, le régime méditerranéen permet de prévenir le risque d’apparition de cette affection hautement handicapante. C’est là une conclusion importante, la diète méditerranéenne ayant jusqu’ici essentiellement prouvé ses bienfaits dans la prévention des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux.
Intervention diététique
On savait d’autre part que le risque artériopathie périphérique pouvait être contrôlé par des changements de mode de vie et/ou des traitements médicamenteux. Ces résultats espagnols démontrent l’importance que peut avoir une intervention diététique. Cette dernière s’impose donc, en particulier chez les personnes à risque élevé. Soit les plus de 50 ans fumeurs, diabétiques, hypertendus, présentant des anomalies des taux de graisses dans le sang ou ayant des antécédents vasculaires.
Les maladies cardiovasculaires sont aujourd'hui la première cause de mortalité prématurée dans le monde (voir ici les chiffres de l’OMS). Ces résultats méritent réflexion: en dépit des formidables progrès de la médecine moderne, certains aspects de la vie menée dans l’Antiquité sur les bords de la Méditerranée demeurent notre meilleure arme contre l’un des maux du siècle.
(1) L’étude apparaît dans une lettre publiée par le Journal of the American Medical Association (JAMA) du 22 janvier 2014.Un résumé (en anglais) est disponible ici.
(2) Un résumé (en anglais) du projet de PREDIMEC est disponible ici.
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