Quand les médecins légistes se penchent sur les stars
Le 11 février 2012 Whitney Houston, 48 ans, était retrouvée morte dans la baignoire de la chambre d’un hôtel de Beverly Hills. Trois semaines après sa disparition, on ne sait toujours pas de quoi est morte la célèbre chanteuse. De nombreuses rumeurs circulent depuis. La «diva pop» était de longue date connue pour sa dépendance marquée aux boissons alcooliques comme aux produits psychotropes illicites. Quand saura-t-on la vérité sur les causes de cette mort prématurée? La connaîtra-t-on un jour? Un scénario fréquent chez les stars.
Michael Jackson (1958-2009), Amy Winehouse (1983-2011), Whitney Houston (1963-2012). Trois parcours différents pour une même fin tragique. Trois morts prématurées survenues dans des circonstances qui demeurent bien mystérieuses. Pourquoi? Ces trois affaires soulèvent la question des limites et des ombres qui peuvent entourer l’autopsie médico-légale. Est-ce dire que ces autopsies imposées par la justice ne parviennent pas à faire la lumière précise sur les causes exactes de la mort? Pourquoi les résultats des autopsies pratiquées sur des personnalités du monde du spectacle ne sont-ils jamais connus (dans le meilleur des cas) que plusieurs semaines ou plusieurs mois après leur mort? Pourquoi tant de mystères?
Deux types d’autopsie
Il faut ici préciser qu’un même terme – celui d’autopsie – désigne deux pratiques bien différentes. Or il faut bien distinguer l’autopsie dite «scientifique» de l’autopsie «médico-légale». Dans les deux cas, il s’agit, étymologiquement, de voir de ses propres yeux. Mais dans le premier cas, des médecins, au lendemain du décès, cherchent de leur propre fait à mieux comprendre les véritables raisons de la mort de celui ou de celle qui fut l’un de leur patient. Dans le second cas, des médecins légistes agissent sur ordre de la justice dans le cadre de morts subites ou violentes et souvent dans des affaires criminelles. Ce sont de ces autopsies dont nous parlent régulièrement les romans policiers, le cinéma et les séries télévisées («Les Experts» ou «NCIS», par exemple). Et ce sont elles qui font du médecin légiste un héros sombre et mystérieux, vivant chaque jour au contact de la mort.
«En Suisse, lors d’une mort suspecte, le Ministère public peut demander une autopsie. Mais aussi – c’est assez fréquent – un simple examen externe, sans ouverture du corps, explique le Pr Patrice Mangin, directeur du Centre universitaire romand de médecine légale. Dans les pays anglo-saxons, la demande d’autopsie médico-légale est plus importante et émane de la police ou du coroner.» Que s’est-il passé dans le cas de Whitney Houston? Dès le lendemain de la découverte de son corps, dans une baignoire emplie d’eau, les légistes californiens ont cherché à savoir s’il était possible d’expliquer la mort par une cause criminelle évidente, par arme à feu ou strangulation par exemple.
Ils ont ensuite, après ouverture et par dissection, cherché l’existence de lésions massives, hémorragiques notamment, dont les conséquences auraient été mortelles: infarctus du myocarde ou accident vasculaire cérébral massifs par exemple. Faute de résultats, différents prélèvements de fluides (dans les poumons ou le vagin, par exemple), mais aussi d’organes et de tissus ont été effectués et précieusement conservés. Des échantillons ont ensuite été adressés à différents spécialistes en toxicologie ou en anatomopathologie (analyse fine des cellules et des tissus) afin de mieux comprendre la succession des événements pathologiques ayant conduit à la mort.
Ce sont les résultats de ces examens qui devraient dans plusieurs semaines (ou plusieurs mois) expliquer comment et pourquoi Whitney Houston est morte.
Dans l’attente, le mystère règne
Pourquoi un tel délai? Sans doute pas pour des raisons techniques: les résultats toxicologiques et anatomopathologiques peuvent être obtenus en quelques heures ou quelques jours. «On peut imaginer que les autopsies médico-légales des personnes célèbres nécessitent des investigations complémentaires qui peuvent prendre du temps et justifier un délai supplémentaire avant l’interprétation des résultats et leur communication publique», explique le Pr Mangin. «On peut aussi imaginer que s’ajoutent aussi des raisons plus politiques qui font que la diffusion de l’information est maîtrisée par le juge, voire la police, qui ne souhaitent pas communiquer dans les délais habituels.»
Un silence prolongé qui autorise bien des fantasmes et qui ajoute immanquablement au mystère tragiquement romantique de ces morts prématurées.