Lore Hoffmann: «Il faut arriver à accepter la possibilité d’être malade»

Dernière mise à jour 15/11/20 | Questions/Réponses
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Le contexte sanitaire n’aura pas eu raison de son objectif. Les prochains Jeux Olympiques, reportés à 2021, sont plus que jamais dans le viseur de Lore Hoffmann, athlète valaisanne.
De quel bois est faite cette star montante du 800 mètres? C’est ce que nous avons voulu savoir…

Bio express

25 juillet 1996 Naissance à Strasbourg (France).

2007  Découverte de l’athlétisme à l’âge de 11 ans.

Depuis 2015  Études en génie mécanique à l’EPFL de Lausanne.

2016 et 2017  Championne de France espoir du 800 m en salle et en plein air (2016).

2018  Demi-finaliste au 800 m aux championnats d’Europe à Berlin (Allemagne).

2019  4e des Universiades d’été.

2019  Participe aux Mondiaux de Doha.

      

Comment avez-vous traversé la crise sanitaire ces deniers mois?

Lore Hoffmann J’ai heureusement pu continuer à courir. Mais psychologiquement, ça a été difficile. On n’avait plus tellement d’objectif: les grands évènements et compétitions ont été annulés ou reportés. C’est très dur pour un sportif de ne pas avoir de but, on ne trouve plus vraiment de motivation.

Vous rêvez de participer aux Jeux Olympiques, l’annonce de leur report n’a pas été trop difficile?

Finalement, je l’ai plutôt vu comme une chance. Ça me laisse plus de temps pour me préparer, atteindre un certain niveau. Je suis jeune et encore en progression. Chaque mois qui passe, je sens que je deviens plus forte à l’entraînement. Donc même s’ils ont été reportés, les JO de Tokyo restent mon plus grand objectif!

Vos réflexes au quotidien ont-ils changé dans la pratique de votre sport?

La course n’est pas un sport de contact, je m’entraîne seule, donc pour moi il n’y a pas vraiment eu de différence. Mais la relation avec les autres a changé. Par exemple, on ne s’embrasse plus après une course, on se contente de se taper dans le coude!

Et votre perception du monde médical?

J’ai appris, au cours de mes études de biomécanique à l’EPFL, que la médecine n’est pas une science exacte, qu’il y a beaucoup d’incertitudes. J’ai malgré tout été surprise par l’aspect émotionnel qui a pris le dessus chez certains professionnels de la santé. Je m’attendais à une réaction différente.

Être en bonne santé, qu’est-ce que cela signifie pour vous?

C’est une question difficile… Déjà, c’est accepter qu’il est possible d’être malade. Mais c’est aussi se sentir bien. C’est un équilibre à trouver entre les choses qui vont bien et les choses qui vont moins bien.

Vous poussez en permanence votre corps dans ses limites… Vous êtes-vous déjà dit que vous aviez «trop» poussé?

Quand on est sportif d’élite, on a la chance d’arriver à récupérer relativement rapidement. Bien sûr, il y a parfois des blessures, des indicateurs de surcharge lorsqu’on va trop loin. Personnellement, j’ai un réflexe d’autoprotection, je respecte mes limites. C’est à la fois bien – je ne me blesse pas trop (du moins jusqu’à maintenant) – mais cela me freine aussi parfois.

Vous n’avez que 24 ans, mais le sport est un milieu où l’on vieillit vite. Cela est-il un sujet qui vous préoccupe?

Non, je fais avec. Je vois autour de moi des sportifs plus âgés, qui récupèrent peut-être moins bien, qui font les entraînements différemment… mais je pense que l’on a une capacité à s’adapter.

Le sport est-il pour vous une addiction?

Je n’ai jamais été accro à une drogue ou à quoi que ce soit, donc je n’ai pas vraiment la possibilité de comparer. Mais oui, j’ai une certaine addiction à la course. Après, c’est difficile de savoir si c’est le sport en lui-même ou l’habitude de le pratiquer et les émotions qui accompagnent les compétitions qui créent la dépendance. C’est sûrement un peu les deux!

Êtes-vous attentive à votre alimentation ou craquez-vous de temps en temps?

J’essaye de manger équilibré, surtout avant une compétition, mais je ne suis pas suivie par un nutritionniste. Par contre, je n’ai pas encore réussi à me passer des tartines au beurre…

Quels sont les autres paramètres qui peuvent avoir un lien direct avec vos performances?

Le sommeil joue beaucoup, surtout durant la semaine qui précède la compétition. La manière de dépenser l’énergie dans la journée est également importante. Et puis, il y a aussi tout ce qui nous entoure, comme les conflits dans l’entourage. Ça peut manger de l’énergie et de l’attention.

Arrivez-vous à gérer votre stress avant une course importante?

J’ai remarqué que le stress pouvait m’aider à mieux courir. Mais il faut bien le jauger. Ce n’est pas bon d’être trop stressée non plus car on gaspille de l’énergie. Généralement, je suis stressée jusqu’au coup de pistolet, puis, durant la course, ce stress va agir dans mon corps comme un accélérateur.

Allez-vous souvent chez le médecin?

Je ne vois mon médecin traitant que si j’ai un problème. Une fois par an, je fais un check-up pour doser mon fer et mesurer d’autres indicateurs. Je suis également suivie par des physiothérapeutes qui prennent rapidement en charge le moindre petit bobo avant que ça ne devienne un problème.

Quel regard portez-vous sur le système de santé suisse et sur l’offre en matière de santé dans votre région?

En tant que sportive d’élite, je suis très bien suivie, selon moi, c’est un système qui fonctionne bien… il est juste un petit peu cher.

Après quoi courrez-vous, Lore?

Je ne peux pas répondre comme les footballeurs « après un ballon » ! Alors je dirais… après la vie.

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Paru dans le hors-série «Votre santé», La Côte, Novembre 2020.

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