«Le sport m’a sauvé lorsque j’avais perdu espoir»
D’où vient votre passion pour le sport?
Bio express
1992 Naît puis grandit à Nyon.
1995 Débute les entraînements de football.
2004 Le diagnostic tombe: une amyotrophie spinale l’empêche de faire du sport.
2005 Il devient assistant entraîneur de foot.
2018 Malgré la maladie, il effectue un triathlon courte distance.
2019 Termine un triathlon distance olympique.
2021 Il complète un demi-ironman, soit 1,9km de natation, 90km de vélo et 21,1 km de course à pied.
Yannick Tachet Je viens d’une famille de sportifs. Mon grand-père a été entraîneur dans le club de Nyon, mon oncle a été footballeur professionnel, mon père jouait aussi, ma grand-mère a fondé le club de basket de Nyon et ma mère était gymnaste. C’était donc naturel pour moi de faire du sport et je savais depuis tout petit ce que je voulais faire: devenir footballeur professionnel.
Préadolescent, vous commencez pourtant à sentir que cet objectif ne pourra pas être atteint…
Oui. J’ai commencé à avoir des tremblements à l’âge de 10 ans, sans que les médecins puissent découvrir leur cause. À 12 ans, je ne pouvais plus courir et j’avais de la peine à me relever. J’ai arrêté le foot en pensant que j’étais nul. Après d’autres tests, le diagnostic est tombé: je souffrais d’une amyotrophie spinale de type trois, une maladie génétique rare qui atrophie les muscles. On m’a alors annoncé que je serais en chaise roulante à 15 ou 20 ans. Lorsque j’ai entendu cette nouvelle, j’ai d’abord senti un soulagement, car ça voulait dire que ce n’était pas moi qui étais nul au foot. C’est seulement le lendemain que je me suis écroulé à l’école.
Comment cette annonce a-t-elle changé les choses?
Mon rêve de devenir footballeur s’est effondré. Je trouvais ça très injuste. Pourquoi moi, qui aimais tant le sport, ne pouvais plus en faire tandis que d’autres détestaient ça? Quelques mois après l’annonce, j’ai eu une discussion avec mon grand-père. Il m’a dit que je pouvais devenir entraîneur, ce qui m’a motivé. À 13 ans, mon ancien coach m’a donné l’opportunité d’être son assistant. Je ne faisais pas grand-chose: je posais les assiettes, j’encourageais l’équipe. Et pourtant, ça a complètement changé ma vision des choses car j’avais alors un nouvel objectif et je me sentais utile. Aujourd’hui, j’ai la chance d’être entraîneur.
En 2021, malgré la maladie, vous avez décidé de faire un demi-ironman. Pourquoi un tel défi?
J’ai pris beaucoup de poids à cause d’un médicament. J’ai alors commencé la natation qui m’a donné l’idée de faire le demi-triathlon, en faisant du tandem pour le vélo et de la marche au lieu de la course. Ça m’a fait beaucoup de bien de faire du sport et pas seulement être entraîneur. À la fin du demi-triathlon, j’avais encore plus d’énergie, je voulais faire le triathlon entier. C’est à ce moment que le sentiment d’injustice que je ressentais est parti. J’ai compris que je pouvais faire du sport si je le voulais. Après le triathlon, j’ai décidé de faire l’ironman. Puisqu’il faut avancer étape par étape, je n’ai fait que le demi-ironman au final, mais je ferai l’entier l’année prochaine.
Vous avez aussi créé l’association Sport4Hope. Qu’est-ce qui vous en a donné l’idée?
Lors du demi-ironman, la télévision est intervenue et j’ai eu l’idée de récolter de l’argent pour le Téléthon. On a donc créé l’association et pu verser 10'000 francs à l’organisation. Sport4Hope a en fait deux buts: récolter des fonds pour la recherche sur les maladies rares et accompagner les enfants atteints d’une maladie et leur famille, en organisant des camps sportifs par exemple. La notion Hope, espoir en anglais, est très importante. Le sport m’a sauvé. J’ai fait une grosse dépression et la seule raison pour moi de continuer était de ne pas abandonner les enfants à l’entraînement. Ma thérapie a été de participer au demi-ironman et de pouvoir parler de ma maladie à la télévision. L’association veut apporter cet espoir à ceux qui en ont besoin en leur permettant de continuer le sport.
Quels sont vos prochains objectifs?
Après chaque défi, c’est comme si j’avais un baby blues, je ne sais plus quoi faire. Me refixer un objectif me permet d’avancer. Je planifie donc de compléter un ironman entier en 2023. Après, je prévois un objectif encore plus grand. Si je l’atteins, alors je pourrai me concentrer sur d’autres aspects, comme l’association et l’entraînement.
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Paru dans le hors-série «Votre santé», La Côte/Le Nouvelliste, Novembre 2022.