«Je ne suis pas très à l’aise avec l’idée qu’on va tous caner!»
Elle est «en vrai» comme dans ses vidéos: souriante, loquace et coiffée d’un bonnet en laine. Entre deux tournages de Tout BO, Aurélie Cuttat nous a accordé un peu de son temps pour nous parler de ce qui la fait vibrer, de son rapport à la santé, au temps qui passe, à la vie quoi!
Bio express:
1987: Naissance à Rossemaison (Jura)
2008: Baccalauréat en Etudes théâtrales à l'Université Laval (Québec). Fait son coming-out en revenant du Canada
2012: Met en scène le spectacle Terminus, à Delémont (Jura)
2011 à 2016: Co-crée et anime la Radio Grrif
2013: Diplôme de journaliste
2016: Intègre l’équipe de Nouvo
2018: lance les capsules vidéos «Tout BO»
Vous parlez de l’actualité de façon positive et avec humour… ce n’est pas difficile d’être tous les jours de bonne humeur?
Aurélie Cuttat: En réalité, je suis quelqu’un de plutôt cynique et de pas vraiment optimiste. Cette chronique-là, c’est une manière de me soigner! Ou en tout cas d’apporter quelque chose qui, moi, me manquait: des projets nouveaux qui se font ailleurs, une ouverture sur le monde.
Quel rapport entretenez-vous avec votre santé?
J’oscille entre l’hypochondrie et le déni. J’ai à la fois très peur d’être malade et très peur du milieu médical. Je ne sais pas pourquoi, ça doit être de l’ordre du traumatisme de l’enfance! Rien que l’odeur de l’hôpital me fait flipper… Par contre, j’ai grande confiance dans les médecins. Je m’en remets à ceux qui savent. Chacun son taf.
«Être en bonne santé», qu’est-ce que ça signifie pour vous?
Ça veut dire faire tout ce que je veux, comme je le veux: pouvoir faire du sport, ne pas être trop fatiguée… Le sommeil et la nourriture sont les clés de voûte de ma santé. En particulier si je ne dors pas bien, j’en vois très vite les effets en quelques jours.
Cela vous arrive souvent?
Je suis insomniaque depuis que je suis enfant. Il n’est pas rare que mes nuits soient trouées. C’est toujours lié au stress ou à des choses qui trottent dans ma tête. Pour y remédier, j’ai plusieurs stratégies, comme régler les problèmes le soir plutôt que le lendemain ou prendre les gouttes d’un droguiste jurassien… une vraie potion magique!
À part cette phytothérapie, utilisez-vous les médecines alternatives pour vous soigner?
Je suis assez réfractaire aux pratiques alternatives, où certaines personnes font du profit sans avoir de véritables qualifications. J’ai toujours été sceptique avec l’homéopathie, et visiblement les études me donnent raison… D’une manière générale, je me laisse plutôt guider par le système médical traditionnel.
Diriez-vous que vous êtes victime d’un trop-plein d’énergie?
Oui, mais ça me fatigue! J’essaye de canaliser cette énergie et cette incapacité à tenir en place, notamment au contact de ma compagne, de mes amis et de ma famille, qui forment un socle apaisant. Car même si avoir la pêche est très valorisé dans la société, c’est épuisant de l’intérieur!
Le temps qui passe, est-ce quelque chose qui vous effraie?
Oui, quand même… je ne suis pas très à l’aise avec l’idée qu’on va tous caner! Je «deale» avec cette idée-là. Mais certaines choses sont inéluctables, c’est comme ça…
Nouvo est un média très prisé des jeunes. Jusqu’à quand est-on «jeune» selon vous?
Ce n’est pas une question d’âge. Je connais des gens de 85 ans qui sont jeunes et des gens de 35 ans qui sont vieux. La jeunesse, c’est quand on est prêt à se modifier, quand on reste ouvert à ce qui se passe, à l’autre… tant que le monde a une influence sur nous, qu’on n’est pas complètement figé dans nos positions, on est encore jeune d’une certaine manière. Chez Nouvo on s’interroge beaucoup sur ce qui fait réfléchir les gens, ce qui peut modifier leur manière de vivre, les bousculer...
Et vous, vous sentez-vous jeune?
Oui! Bien sûr, je commence à voir des choses qui me déplaisent : des petites rides, des cheveux blancs, mais c’est un travail de tous les jours d’accepter ça. Je pense que je suis encore jeune car j’ai toujours cette souplesse dont je parlais. Ça m’arrive parfois de me dire que je suis en train de vieillir mais c’est rare. Il faut aussi accepter d’être le vieux de quelqu’un!
Quels sont les sujets qui vous «remuent les tripes»?
Pas un seul sujet que je traite ne me laisse indifférente, c’est pour ça que je fais ce métier. Bien sûr, les questions autour du climat, des droits des femmes, des droits des LGBT+ m’intéressent particulièrement. C’est souvent comme ça que je choisis un sujet: lorsqu’il m’émeut, qu’il me bouscule.
Diriez-vous que vous êtes une femme engagée?
C’est un mot qui est incompatible avec ma fonction de journaliste. Mais dans ma vie privée, oui, bien sûr, je suis engagée. J’estime que je suis une citoyenne qui a le droit à ses opinions. Par contre, quand je travaille, je suis dans le questionnement. Déontologiquement, on essaye d’être irréprochables. Et de toute façon, on n’a pas envie de provoquer, ce n’est pas le but de cette chronique.
Êtes-vous quelqu’un de stressé?
Oui, je suis une grande stressée ! Je me ronge les ongles en permanence. Là par exemple, je stresse parce que j’enregistre ma chronique cet après-midi, et parce que j’ai peur de vous dire des bêtises, des choses qui ne sont pas vraiment alignées avec ce que je pense. La santé de mes proches également peut me rendre très anxieuse, bien plus que ma propre santé.
Quelles sont vos techniques pour rester zen?
Ça passe par le sport. Quand je transpire 3-4 fois par semaine, je vois vraiment la différence.
Dans les périodes de stress intense, je suis des cours de yoga sur Youtube… ça m’a souvent sauvé la mise. Et puis je dois dire aussi que mon chien m’apaise énormément. Être obligée d’être en contact avec la nature lors de nos promenades, lui donner de l’attention et en recevoir en retour… ça me ramène à l’essentiel.
Avez-vous des addictions?
Je suis accro à l’actu, aux médias… je peux me déconnecter un jour à la limite, mais pas plus! Même en vacances, je ne suis pas du genre à couper mes mails. C’est la peur de manquer un truc, je crois. Je fais la même chose avec mes amis, j’ai peur de manquer des événements… je ne sais pas dire non!
Je suis aussi passablement addicte à la nicotine. J’ai réussi à arrêter les cigarettes classiques mais j’utilise toujours une cigarette électronique…
Quel type de mangeuse êtes-vous?
Je suis omnivore, mais j’ai toujours eu conscience de ce que je voulais manger. Je suis convaincue qu’on est ce qu’on mange et qu’il faut faire attention. Je consomme très peu de viande par exemple et je la choisis de qualité chez un boucher de mon quartier. J’essaye de valoriser ce qui est local, je fais mon pain moi-même… même si c’est très bobo de dire ça!
Vous avez quand même bien un péché mignon, non?
Une boîte de raviolis rouges de la Migros. C’est ceux que ma mère me faisait enfant et j’ai l’impression d’avoir à nouveau 7 ans quand j’en mange. C’est ma madeleine de Proust, mon plaisir coupable!
Voltaire disait «J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé». Et vous, quel est votre mantra?
Je pense souvent à cette phrase de Jacques Brel: «Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir. Et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns.» Quitte à aller vers une fin inéluctable… faisons la fête!
Que peut-on vous souhaiter pour la suite?
D’être heureuse, de continuer de trouver du sens à ce que je fais, et que mes proches aillent bien, évidemment.
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Paru dans Planète Santé magazine N° 38 – Octobre 2020