«Je connais mon corps, ses limites, ses faiblesses et sa singularité»
Bio express
27 mai 1988 Naissance à Genève.
1995 Premiers pas sur une scène à l’Atelier théâtre de Bellevue.
2013 Diplômée du Conservatoire d’art dramatique et d’un Bachelor en théâtre à la Haute école des arts de la scène. Prix d’écriture dramatique Studer/Ganz.
2013 à 2016 Spectacles et pièces de théâtre («Silence en coulisses», «Flashdanse» «Derborence», «Le beau monde», «Show Set»).
2021 Spectacle «Olympia» et publication du recueil de poésie Minuit Soleil aux Éd. art&fiction.
Aujourd’hui comédienne, auteure, metteuse en scène, poétesse, chroniqueuse radio et maintenant humoriste… quel a été votre parcours jusqu’ici?
Rébecca Balestra: J’ai fait le Conservatoire d’art dramatique de Genève, puis un Bachelor en théâtre à la Manufacture de Lausanne. Ensuite, j’ai suivi deux parcours en parallèle: l’un dans la création et l’autre en tant que comédienne. En ce qui concerne l’écriture et la mise en scène, j’ai participé à des plateformes et festivals qui soutiennent l’émergence, comme «Les Quarts d’Heure» du Théâtre Sévelin, «C’est déjà demain» au Théâtre du Loup et le «far» à Nyon. Ils ont été des tremplins vers d’autres maisons comme l’Arsenic, le Théâtre Vidy-Lausanne et récemment la Comédie de Genève. En qualité de comédienne, j’ai intégré l’Ensemble de Poche GVA en 2016. Durant cette période, il y a eu beaucoup de projets, beaucoup de rencontres et énormément de travail. Cette expérience de deux ans m’a beaucoup appris et m’a permis de me constituer un réseau professionnel. Le Poche m’a aussi offert de la visibilité au niveau du public et de la presse. Si j’ai pu autant travailler par la suite, c’est grâce à toutes ces structures qui m’ont fait confiance. Je me lance à présent dans un spectacle de stand-up en tant qu’humoriste et, là encore, de nombreux théâtres me soutiennent dans cette prise de risque. C’est en grande partie grâce à la confiance des autres et à de très heureuses collaborations que j’ai pu avoir un parcours aussi riche.
L’an dernier, le spectacle «Olympia» –que vous avez entièrement écrit et interprété accompagnée d’un piano et d’un orchestre à cordes – a rencontré un grand succès. Pouvez-vous nous raconter la genèse de sa création? Entre slam autobiographique et hommages en chansons, comment cette idée vous est-elle venue?
En 2013, j’ai participé à un concours d’écriture et j’ai gagné un prix qui offrait un stage organisé par Antoine Jaccoud, auteur et scénariste. Lors de cette rencontre, ce dernier nous a donné pour mission d’écrire une déclaration d’amour avec comme inspiration et point de départ la chanson «La Déclaration d’amour» de France Gall, qui comporte un moment parlé. J’ai alors écrit un texte sur de la musique, le premier d’une série qui a ensuite été compilée dans les spectacles «Piano-bar» et «Olympia», puis éditée dans un recueil de poésie intitulé Minuit Soleil, publié chez art&fiction. Produire du texte est vraiment devenu une nécessité quotidienne qui me permet de m’exprimer en tant qu’artiste et en tant que personne, car je dois dire que je suis vraiment nulle à l’oral. Je ne trouve jamais les mots pour dire ce que je ressens et c’est très frustrant. Écrire me donne de la liberté d’expression mais aussi de la précision: cela clarifie tout. Cela nettoie tout.
Quel est le rôle qui vous a le plus marqué jusqu’ici?
Difficile à dire, parce que j’ai eu la chance d’interpréter des rôles très différents qui m’ont évidemment tous marquée, chacun à leur manière. Je pense que l’un des parcours les plus forts en tant qu’interprète a été le rôle d’Elsie dans «Havre», mis en scène par Anne Bisang. Tout au long de la pièce, le personnage est coincé à un endroit de sa vie, comme verrouillé de l’intérieur, dans l’incapacité de faire le deuil de sa mère. Un moment magique se produisait à chaque fin de représentation, une scène cathartique où Elsie s’ouvre enfin et pleure la mort de sa mère. C’était une incroyable communion avec le public. C’est pour cette symbiose que je fais du théâtre parce que, quand on la trouve, c’est merveilleux et très addictif.
Entre l’écriture, la mise en scène et la comédie, privilégiez-vous aujourd’hui une activité en particulier?
J’aime tout faire et, pour le moment, je suis incapable de me fixer sur une seule chose. J’aime pouvoir être partout à la fois et faire le grand écart entre tragédie et comédie, écrire mes propres textes et jouer ceux des autres…
Avant une représentation, êtes-vous victime du stress? Quelles sont vos techniques pour y remédier?
Je suis terriblement anxieuse, voire terrorisée avant une représentation et je dois avouer que tout cela a tendance à s’intensifier avec les années, car cela devient un mode de fonctionnement: j’ai peur de ne pas avoir peur. Je me complais dans cette angoisse de crainte de manquer d’adrénaline sur scène ou quand j’écris. C’est un cercle vicieux (ou vertueux, je ne sais pas). Cela dit, durant «Olympia», j’étais enceinte et j’ai paradoxalement moins angoissé. Je me suis forcée à ne pas transmettre de stress à mon bébé pour ne pas l’intoxiquer. J’étais plus détendue à cette période et cela malgré de très grandes échéances.
Une bonne image de soi est capitale lorsqu’on se retrouve régulièrement au contact du public. Avez-vous toujours été confiante sur ce point?
Je ne sais pas si j’ai une bonne image de moi mais j’ai en tout cas une bonne connaissance de moi. Je connais mon corps, ses limites, ses faiblesses et sa singularité. Je pense que cette conscience peut devenir une force créatrice.
De manière plus générale, quelles sont vos habitudes et vos astuces pour garder la forme?
Quand je travaille, je ne sors pas beaucoup et je ne bois pas. Par exemple, je ne me saoule pas après la première représentation, comme il est souvent coutume de le faire. Je ne veux pas me casser la gueule à la deuxième!
Dans votre activité, avoir une bonne mémoire est un enjeu capital. Comment vous entraînez-vous?
Je n’ai pas l’impression d’avoir une bonne mémoire. Apprendre mes textes me prend beaucoup de temps et je dois énormément répéter pour avoir l’impression de les connaître sur le bout des doigts. L’une de mes techniques consiste à enregistrer les répliques des autres et à y insérer les miennes ensuite. Et puis j’essaie de ne pas y mettre trop d’intention, je les apprends comme un alphabet sans y attacher un sens précis car il est plus difficile de casser cette musicalité ou de changer l’intention plus tard.
Êtes-vous sportive?
Absolument pas! Pour la posture et le souffle, je fais seulement du yoga en échauffement quand un ou une metteuse en scène m’y oblige.
Vous êtes très récemment devenue maman. Qu’est-ce que cela a changé dans votre vie et votre carrière?
Cela a évidemment tout changé. Dans ma carrière, cela demande une réorganisation totale. Le temps avec mon enfant est précieux, alors je sélectionne davantage les projets, pour pouvoir dégager le plus de temps possible avec lui tout en continuant à jouer et à écrire.
Quels sont vos projets dans un avenir proche et que peut-on vous souhaiter?
Ma dernière création est un spectacle de stand-up qui se jouera au Bar Club ABC à Lausanne à partir du 15 septembre et qui s’appelle «RÉBECCA BALESTRA». Je pense qu’on peut me souhaiter de ne pas faire un méga four!
En un mot…
Un adjectif qui vous correspond? «Obsessionnelle.»
Une personne qui vous inspire? «Cher.»
Votre péché mignon? «Boire des cafés dans des tea-rooms portugais.»
Votre rêve le plus fou? «Être photographiée au bord de la piscine du Beverly Hills Hôtel au petit-déjeuner comme Faye Dunaway: en négligé de satin, blasée, devant mon Oscar et des coupures de presse éparpillées. La photographie s’appelle "The Morning After" et a été prise par Terry O’Neill.»