Travail sur écran: comment faire pour ne pas avoir les yeux secs
Nous savons que les écrans électroniques peuvent troubler nos nuits. Mais sont-ils également susceptibles de nous nuire le jour? Des chercheurs japonais se sont intéressés à l’impact oculaire du travail sur ordinateur. Ils viennent de publier leurs résultats dans la revue Jama Ophtalmology(1). Dirigée par les Drs Yuichi Uchino et Kazuo Tsubota (Keio University), l’étude a été conduitepar des spécialistes travaillant dans différentes institutions ophtalmologiques japonaises situées à Tokyo et Kyoto. Ils s’intéressaient au «syndrome de l’œil sec» (ou «syndrome sec»).
Il s’agit d’un problème fréquent, handicapant, mais rarement grave. Il comporte de nombreux symptômes: irritations/rougeurs, larmoiements, sensation de brûlure et de corps étranger (grain de sable), trop grande sensibilité à la lumière, démangeaisons, fatigue oculaire. Et peut avoir de multiples causes: vieillissement, tabagisme, exposition au soleil, sécheresse de l'air, prise de certains médicaments, maladies auto-immunes, port de lentilles, etc.
La sécheresse oculaire est le plus souvent associée à une trop grande évaporation de larmes, pourtant produites en quantité suffisante par nos yeux. Cette «hyper-évaporation» des larmes peut être la conséquence d’une altération de la couche lipidique du film lacrymal. Mais cette altération peut-elle être la conséquence du travail sur écran?
Concentrations lacrymales
Les chercheurs japonais ont enquêté auprès de 96 volontaires, tous employés de bureau (60 hommes et 36 femmes). Chacun a été soumis à un examen des deux yeux et a répondu à des questions concernant sa pratique du travail sur écran et les symptômes oculaires qu’ils pouvaient ressentir. En parallèle, les chercheurs ont effectué des dosages des concentrations lacrymales en «mucine 5AC». Les mucines sont des protéines produites par les cellules de la conjonctive. Très hydrophiles, elles contribuent à retenir l'eau sur la surface de l'œil. Les concentrations de ces protéines chez les participants ont été comparées aux symptômes présentés et au temps de travail sur ordinateur.
Pas plus de 7 heures par jour
Au final, les chercheurs observent une association entre le temps passé sur écran (durée moyenne de travail sur écran: 8,2 heures par jour) et le syndrome des yeux secs. Un syndrome caractéristique a été trouvé chez 9% des participants. Les autres présentaient des symptômes de sécheresse oculaire et 82% d’entre eux manifestaient des signes de perturbation du film lacrymal.
La concentration moyenne en mucine 5AC était significativement plus faible chez les personnes atteintes du syndrome de l'œil sec et chez celles travaillant plus de 7 heures par jour devant un écran (par rapport à celles qui y travaillent moins de 5 heures). Elle était aussi plus faible chez les participants ayant déclaré des symptômes de fatigue oculaire, un larmoiement excessif ou une sensation de sécheresse oculaire.
En pratique, l’utilisation régulière et prolongée d’un écran nécessite une configuration (éclairage, source de lumière, position) adaptée de manière à minimiser la fatigue oculaire. L’écran doit notamment être positionné au niveau des yeux, ou juste en dessous.
Battre des cils
Pour le Dr Yuichi Uchino, les personnes qui observent un écran d'ordinateur ouvrent leurs yeux plus grand qu'à l'accoutumée. Il en résulte une exposition plus importante du globe oculaire, associée à une moindre fréquence des clignements des paupières. Il pourrait en résulter une accélération de l'évaporation des larmes et une plus grande sécheresse oculaire.
«Lorsque nous fixons nos écrans d'ordinateur, nous clignons moins souvent des yeux que lorsque nous lisons un livre», a-t-il expliqué au quotidien britannique The Independant. La situation n'est pas sans espoir: «La surface oculaire exposée peut être réduite; il suffit pour ce faire de placer l'écran plus bas et de l'incliner vers le haut». Autre conseil pour épargner nos yeux assaillis par la modernité: détourner le regard de l'écran toutes les cinq minutes pendant quelques secondes. Et battre plusieurs fois des cils.
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(1) Un résumé (en anglais) de l'étude est disponible ici.