Les insidieux ravages du stress sur le cœur

Dernière mise à jour 21/09/17 | Article
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Une nouvelle étude médicale publiée dans le réputé The Lancet montre que le stress doit désormais être également soupçonné dans la survenue des maladies cardiovasculaires, au même titre que les facteurs de risque classiques.

On sait depuis longtemps que la consommation de tabac, l'hypertension, le diabète, trop de mauvais cholestérol ou encore une mesure élevée de la protéine C-réactive ultrasensible, doivent tous être considérés comme des facteurs de risque pouvant faire craindre une future maladie cardiovasculaire. Faudra-t-il désormais ajouter à cette liste le stress psychosocial, comme le suggéraient certaines études sur l'animal? C'est ce qu'a cherché à savoir une équipe médicale réunissant à Boston et New York des cardiologues, des psychiatres et des radiologues.

La question est d'autant plus intéressante que de plus en plus d'individus sont aujourd'hui exposés quotidiennement à des stress psychosociaux divers: charge de travail excessive, insécurité de l'emploi, relations de travail conflictuelles, quand ce n'est pas plus prosaïquement les conséquences chroniques de la pauvreté.

Pour répondre à cette question, les chercheurs américains se sont concentrés sur une partie du cerveau connue pour être impliquée dans notre capacité à ressentir et décoder nos émotions: l'amygdale, une petite structure dont nous possédons deux exemplaires, de part et d'autre du cerveau. Elle est impliquée dans tous les évènements qui pourraient menacer l'organisme, et elle est ainsi directement associée à l'anxiété, à la dépression, de même qu'à ce que l'on appelle désormais le «stress post-traumatique» frappant par exemple les victimes d'attentat.

Un suivi de près de quatre ans

Pour son étude, l'équipe américaine s'est appuyée sur une technique d'imagerie fonctionnelle relativement récente, la tomographie par émission de positons (PET scan). Cette technique permet de suivre en trois dimensions l'activité d'un organe une fois qu'on lui a injecté un produit radioactif, source des positons qui vont servir de traceurs.

Les chercheurs ont fait porter leur étude sur 293 individus, tirés d'une base de données de plus de 6000 patients ayant subi un tel examen entre 2005 et 2008 au Massachusetts General Hospital de Boston mais qui devaient être dépourvus au départ d'une maladie cardiaque. Ces sujets, presque autant d'hommes que de femmes, devaient en outre avoir au moins 30 ans.

Comme en parallèle les médecins avaient accès au dossier médical de chacun des patients, ils ont pu suivre ainsi leur état de santé durant près de quatre ans et comparer l'incidence des maladies cardiovasculaires survenues durant cet intervalle aux diverses activités biologiques mesurées par le PET scan. Ils ont d'ailleurs analysé non seulement l'activité de l'amygdale, mais aussi celle de la moelle osseuse et de la rate (acteurs majeurs des réactions immunitaires). Ils ont enfin mesuré le degré d'inflammation des artères, un phénomène intimement lié aux maladies cardiaques.

Durant les 3,7 ans qu'a duré en moyenne le suivi, un total de 39 évènements cardiovasculaires ont touché 22 individus, pour l'une ou l'autre des maladies du protocole (infarctus, angine de poitrine, insuffisance cardiaque, attaque cérébrale ou encore maladie artérielle périphérique).

Nouvel élément majeur vers la prévention

Or, quand les chercheurs ont confronté ces chiffres aux mesures faites par le PET scan, ils ont constaté que plus l'amygdale était active, plus le risque de souffrir ultérieurement d'une maladie cardiovasculaire était élevé, et que ces patients-là avaient des problèmes de santé plus tôt que les autres. De façon plus précise, ils ont observé un rapport direct entre une activité élevée de l'amygdale et une plus grande activité de la moelle osseuse, ainsi qu'une inflammation des artères plus importante, facteurs qui expliqueraient l'augmentation du risque de maladie cardiaque.

Les chercheurs en concluent que l'amygdale susciterait à la fois une plus grande production de globules blancs par la moelle osseuse (ce qui aurait pour conséquence une plus grande production de plaques d'athéromes dans les artères), et un processus inflammatoire au sein même des artères. Cela se vérifierait par les résultats d'une sous-étude menée sur 13 sujets, dont le stress dûment validé par un psychologue correspondait à une augmentation du taux de la protéine C-réactive ultrasensible, indicateur reconnu d'un risque de maladie cardiovasculaire. Plus leur stress était élevé, plus l'activité de l'amygdale était également importante.

Cette étude apporte un nouvel élément majeur dans la longue marche vers une prévention toujours plus efficace des maladies cardiovasculaires, car elle pourrait aider à définir de nouvelles pistes, ou à développer de nouveaux moyens, pour mieux réduire à l'avenir le risque cardiaque.

Mais, comme le souligne l'éditorial qui accompagne la publication dans The Lancet, ce n'est qu'un début, et il est désormais nécessaire de lancer d'autres études prospectives de plus large échelle et plus longues, notamment sur les individus soumis à des stress post-traumatiques.

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Référence: Ahmed Tawakol et al., Lancet 2017;389:834-45.

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