Les médecins préconisent la chirurgie pour traiter l’obésité
De quoi on parle?
Les faits
Le syndic de Lausanne Daniel Brélaz a perdu plus de 60 kilos en sept mois: il affirme être passé de 172 à 106 kilos. Cela grâce à un régime hypocalorique soutenu par des séances d’acupuncture. Sans recourir donc à la chirurgie bariatrique (qui réduit la contenance de l’estomac), souvent à l’origine de pertes de poids très importantes.
Le bilan
Les médecins sont réservés sur cet exploit. Les hôpitaux ont renoncé aux régimes de ce type par crainte d’un effet yo-yo très néfaste.
«Il est métamorphosé», commente 24Heures. Le quotidien vaudois se désole presque de ne plus reconnaître son syndic. Et il faut avouer que Daniel Brélaz donne effectivement l’impression de flotter dans son enveloppe. Sans aller jusqu’à faire des entrechats, il marche plus rapidement… L’intéressé est lui-même ravi d’être plus léger de 60 kilos et s’explique volontiers dans les médias sur sa diète: une pomme ou un kiwi le matin avec un café au lait allégé sans sucre, protéines animales et légumes verts à midi, légumes verts avec éventuellement un verre de vin le soir. Souper qu’il peut même sauter après trois mois de régime. A cela s’ajoutent des séances d’acupuncture qui lui permettent de tenir le coup.
On le sait pourtant, il est déconseillé de maigrir trop rapidement. Cela déclenche notamment des modifications hormonales qui incitent l’organisme à restocker le poids perdu, voire davantage. C’est le fameux «effet yo-yo». Pour l’éviter, il ne faudrait pas consommer moins de 1400 calories par jour et ne pas perdre plus d’un kilo et demi par mois, estiment les spécialistes. Une modération difficile à suivre lorsque l’on bataille avec des dizaines de kilos excédentaires. Que faire alors quand on est obèse, sachant que l’obésité met en danger la santé?
Un effet sur les hormones
«On n’a pas tellement le choix. Soit le patient suit un régime sévère, soit il doit recourir à la chirurgie bariatrique», estime le docteur Massimo Fumagalli, fondateur des Centres Sinomedica, qui allient médecine traditionnelle chinoise et acupuncture, où est suivi Daniel Brélaz. Le médecin assure que sa cure n’est pas dangereuse et n’a rien à voir avec les régimes hyperprotéinés qui peuvent, par exemple, endommager les reins. «C’est un régime hypocalorique. Comme il est très restrictif et peut entraîner des carences, nos patients reçoivent des compléments alimentaires en fonction de leurs manques. C’est le même type de diète que le Centre hospitalier universitaire vaudois a prescrit pendant des années», souligne-t-il. Or, justement, les médecins du CHUV ont renoncé à ce régime hypocalorique enrichi en protéines (pour éviter la fonte musculaire), car la majorité des patients reprenaient du poids.
C’est là qu’intervient l’acupuncture, explique en substance le médecin tessinois, qui a appris la spécialité en Chine et aux Etats-Unis après des études de médecine en Suisse. «De nombreuses études récentes montrent les effets positifs de l’acupuncture sur la perte de poids, notamment en raison d’un effet hormonal. Cette technique, conjuguée à un régime, permet d’obtenir des résultats durables.» Une fois le poids désiré atteint, il importe aussi de stabiliser le patient et de continuer à le suivre sur le long terme.
Massimo Fumagalli, sans pouvoir donner de chiffres, déclare que bon nombre de ses patients sont parvenus à maintenir leur poids. Il souhaite d’ailleurs valider ses résultats par une recherche menée conjointement avec le CHUV, par exemple.
Vittorio Giusti, directeur du tout nouveau Centre cardio-métabolique intercantonal de la Broye, a utilisé le régime hypocalorique du CHUV dans les années 80 et 90. «Nous avions les mêmes résultats que ceux de Massimo Fumagalli. Nous avons toutefois arrêté après avoir constaté que 95% des patients reprenaient leur poids», se souvient le médecin. L’acupuncture améliore-t-elle ces résultats? «L’acupuncture est utilisée depuis des années, elle coupe l’appétit et facilite ainsi l’adaptation à un nouveau schéma alimentaire. On n’a toutefois pas retenu cette méthode car elle ne fonctionne pas sur le long terme. Or l’obésité est une maladie chronique, extrêmement complexe, qui plus est.» Comment alors aider les personnes souffrant d’une importante obésité? «Nous cherchons tout d’abord à cerner les causes du surpoids. Le problème est-il hormonal, psychologique, diététique, anxieux? La prise en charge se fait en fonction de ce premier diagnostic. Dans notre centre, nous avons une approche pluridisciplinaire et nous assurons un suivi sur le long terme.»
Chirurgie bariatrique
Les personnes qui souffrent d’une obésité importante se voient le plus souvent proposer une intervention de chirurgie bariatrique, consistant à réduire la contenance de l’estomac et la surface d’absorption des aliments (lire infographie). Mais l’acte n’est pas anodin, et certains patients opérés reprennent malgré tout du poids. «La chirurgie bariatrique est le seul traitement pour l’obésité importante. Mais elle implique un changement majeur. Les patients doivent être longuement préparés, parfois pendant plus d’une année, afin de travailler sur leurs frustrations, leurs compulsions. Faute de quoi l’intervention peut entraîner des dépressions, des problèmes d’alcool. Certains patients contournent la réduction de leur capacité gastrique en mangeant tout le temps. Par exemple deux carrés de chocolat toutes les cinq minutes, ce qui permet malgré tout d’arriver au bout de la plaque!» explique Vittorio Giusti. Malgré tout, 75% des patients maintiennent leur poids six ans après leur opération. Ils parlent alors souvent de «renaissance».
Davantage d’infarctus
Et si l’on ne veut pas recourir à la chirurgie? Même si Vittorio Giusti dit qu’il est très intéressé par l’étude des résultats de l’équipe du docteur Fumagalli, il met engarde. «Il ne faut pas faire de régime, avertit-il. Différentes études ont montré que le risque d’infarctus était beaucoup plus élevé chez quelqu’un qui avait perdu du poids pour le reprendre ensuite, que chez une personne de 100 kilos qui serait restée à un poids constant.»
Une nouvelle alternative au by-pass gastrique
Le by-pass gastrique est la technique la plus couramment utilisée en chirurgie bariatrique. Il ne laisse à l’estomac qu’une contenance minuscule de 15 millilitres et court-circuite un mètre d’intestin. Cela réduit l’absorption des aliments mais peut aussi provoquer des carences, notamment en vitamines. Une nouvelle technique émerge: la sleeve gastrectomie. Elle consiste à couper l’estomac à la verticale pour en faire un tube dans lequel il reste tout de même une contenance de 200 ml. Cette technique est moins lourde que celle du by-pass et provoque moins de carences en vitamines. La perte de poids est aussi moins spectaculaire et on manque encore de recul pour évaluer les effets sur le long terme.
Résorber l’excès de peau
Après une perte de poids très conséquente, il est en général nécessaire de recourir à la chirurgie réparatrice pour diminuer l’excès de peau.
Celle du ventre peut, par exemple, pendre comme un tablier de 20 à 30 centimètres, et les plis profonds qui se sont formés causent parfois des dermatites à répétition.
L’excès de peau peut être tel qu’il devient difficile de s’habiller.
Par ailleurs, il ne faut pas négliger l’impact psychique des modifications corporelles qui modifient l’image que le patient a de lui-même.
Les chirurgiens interviennent en général au niveau de l’abdomen, de l’intérieur des cuisses et des bras.
En revanche, il est conseillé d’espacer les interventions de chirurgie bariatrique et réparatrice d’au moins deux ans, le temps de vérifier si le poids est stabilisé.