By-pass, et après?
En 2016, plus de 4000 interventions de by-pass gastriques ont été réalisées en Suisse (+ 112% par rapport à 20111) chez des patients souffrant d’obésité morbide (entraînant un risque vital). Cette chirurgie bariatrique s’est ainsi imposée parmi d’autres comme une solution d’amincissement «express». Car il faut bien le dire, son efficacité en termes de perte de poids rapide est incomparable. Cela s’explique principalement par la réduction du volume de l’estomac qui entraîne une restriction alimentaire et une sensation de satiété plus rapide. Selon les études, la perte de poids dans les deux années qui suivent l’intervention varie entre 20 et 35% du poids initial2. Et même si une reprise de poids progressive est constatée au-delà de ces deux ans, elle reste bien inférieure à celle qui fait suite aux interventions non chirurgicales.
Des effets secondaires fréquents
Les techniques de chirurgie bariatrique
Le by-pass (ou by-pass gastrique en Y)
Il consiste à effectuer un «court-circuit» gastrique chirurgicalement par laparoscopie, afin d’accélérer le transport alimentaire et réduire l’absorption des nutriments par l’organisme. Cette méthode, prise en charge par l’assurance maladie de base, est indiquée pour les cas d’obésité morbide (IMC > 40 kg/m2) ou pour les diabétiques de type 2.La sleeve (ou gastrectomie en manchon)
Elle consiste à réduire le volume de l’estomac, en en ôtant les deux tiers par cœlioscopie. Plus rapide et moins lourde que le by-pass, cette intervention est aussi recommandée pour les cas d’obésité. Mais la perte de poids à un an est légèrement inférieure à celle du by-pass.
L’anneau gastrique (ou gastroplastie)
Cette méthode réversible consiste à placer un anneau ajustable en silicone autour de la partie supérieure de l’estomac, de façon à ralentir le passage des aliments. Très indiqué il y a quelques années, l’anneau gastrique n’est aujourd’hui plus préconisé en raison de sa moindre efficacité et des nombreuses complications associées.
Malgré l’efficacité du procédé, la reprise de poids sur le long terme est quasiment inévitable. Un an après l’intervention, environ un tiers des patients reprennent plus de 5% du poids perdu, et la courbe continue de monter au fil des ans. «On observe un taux d’échec de 20%, c’est-à-dire, 1 patient sur 5 qui reprendra le poids perdu. Et on arrive encore mal à détecter en amont ces patients chez qui ça ne marchera pas», explique le Dr Pierre Fournier, chef de service à l’Hôpital de Nyon et responsable du Centre de l’obésité et du métabolisme de La Côte.
Au-delà de cette constatation sur son efficacité à long terme, l’impact du by-pass sur le système digestif est immédiat et conséquent. Tout d’abord, le trajet intestinal étant réduit, les aliments sont moins bien absorbés et digérés. En résultent fatalement des carences en vitamines et minéraux et une supplémentation qui doit être mise en place à vie.
Autre désagrément de la chirurgie bariatrique, le syndrome de «dumping». Il s’agit d’un malaise (bouffées de chaleurs, crampes intestinales, palpitations…) qui survient après l’ingestion d’aliments très sucrés. Il est donc conseillé de limiter l’apport en glucides rapides (bonbons, sodas, pâtisseries…) et de fractionner les repas afin de ne pas surcharger l’intestin.
L’importance du suivi
Face à ces difficultés, les équipes médicales ont aujourd’hui bien compris la nécessité d’un programme d’accompagnement global. Plusieurs mois avant l’opération, le patient rencontre un psychologue, avec qui il évoque son parcours, sa démarche d’amaigrissement et ses éventuels troubles du comportement alimentaire. C’est à l’issue de ces entretiens que l’équipe multidisciplinaire donnera son aval –ou non– pour l’intervention chirurgicale.
Après l’opération, le suivi psychologique perdurera aussi longtemps que nécessaire, doublé d’un contrôle médical et d’analyses sanguines régulières permettant de détecter les carences. Le patient sera également accompagné par un diététicien pour l’élaboration de son régime alimentaire ainsi que par un coach sportif qui lui proposera un programme d’activités adaptées. Seul ce suivi pluridisciplinaire permet de maximiser l’efficacité de l’intervention, comme le résume le Dr Pierre Fournier: «Le by-pass, ce n’est pas une baguette magique. Ça peut marcher seulement si tout change.»
Un impact psychologique à ne pas négliger
Au-delà des complications médicales, le by-pass peut également entraîner de graves répercussions psychologiques chez le patient.
La perte de poids rapide et conséquente qui fait suite à l’opération impose une réappropriation de l’image de soi qui n’est pas forcément évidente. D’autant que l’amincissement express s’accompagne souvent d’une perte d’élasticité de la peau dans certaines zones (bras, ventre, dos) favorisant la formation de plis disgracieux. Ces excès de peau nécessitent une chirurgie réparatrice qui, elle, n’est pas systématiquement prise en charge par l’assurance maladie. A cela s’ajoutent de nouvelles habitudes alimentaires à adopter, parfois perçues comme contraignantes. Autre point pouvant entraîner un impact psychologique négatif: le sentiment d’échec qui s’installe lorsque le patient reprend du poids alors qu’il espérait une solution «miracle».
Tous ces éléments peuvent fragiliser le moral, et des études ont démontré que les personnes traitées par chirurgie bariatrique étaient davantage en proie aux divorces, à l’alcoolisme, ou encore au suicide que le reste de la population.
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1. Etude SMOB (Société suisse pour l’étude de l’obésité morbide - Swiss Society for the Study of Morbid Obesity and Metabolic Disorders).
2. Adams TD, Davidson LE, Litwin SE, et al. «Health benefits of gastric by-pass surgery».
Paru dans le Quotidien de La Côte le 11/04/2018.
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