Apprendre à communiquer avec son bébé

Dernière mise à jour 27/07/18 | Article
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Même s’ils n’utilisent pas encore le langage, les nouveau-nés communiquent en continu à travers leur comportement. Apprendre à les observer permet aux parents de s’adapter à leurs besoins.

«Un bébé? Ça pleure, ça mange et ça dort!» Un raccourci encore fréquent pour décrire le comportement des tout-petits. Jusque dans les années soixante environ, le nourrisson était essentiellement considéré comme un petit être sans individualité particulière, dont il faut prendre soin. En 1973, le pédiatre américain T. Berry Brazelton (disparu récemment, le 16 mars 2018) met au point une échelle d’observation des nouveau-nés. Un outil révolutionnaire, qui répertorie les différents états du nourrisson, ses compétences, ses ressources et sa manière d’interagir avec son entourage. Grâce à ces travaux avant-gardistes, les nouveau-nés sont aujourd’hui considérés comme des individus à part entière, avec une sensibilité et des façons de réagir qui leur sont propres. La personnalité de chaque bébé doit ainsi être découverte par ses parents et ses proches.

Mon bébé ressent-il du bien-être?

Quelques exemples de comportements peuvent vous aider à vous rendre compte si votre bébé est en situation de confort ou d’inconfort.

Signes de bien-être:

  • Votre enfant est globalement calme.
  • Son visage est détendu.
  • Ses mouvements sont harmonieux et coordonnés.
  • Son regard est calme et circule librement, il est attentif à ce qui l’entoure.
  • Sa peau a une jolie couleur.
  • Il ne sursaute pas.
  • Il semble disponible pour communiquer.

Signes de fatigue, détresse et/ou surcharge:

  • Votre enfant n’est pas disponible pour communiquer, il regarde ailleurs, se détourne.
  • Quand il est éveillé, il grimace, il est agité et pleure; ou au contraire il est apathique et passif.
  • Il a une expression soucieuse, le front et les sourcils froncés.
  • Ses gestes sont brusques et mal coordonnés.
  • Sa peau change de couleur (il est pâle, marbré ou plus rouge).
  • Il souffre de problèmes intestinaux (régurgitation, crampes, coliques, etc.).

L’attachement au cœur du développement

De nombreux comportements observables dès la naissance sont liés au besoin d’attachement et de sécurité. «Un nourrisson est en quelque sorte "programmé" pour l’attachement», constate la Dre Nadia Bruschweiler-Stern, pédiatre, pédopsychiatre et fondatrice du Centre Brazelton Suisse à Genève. «A sa naissance, il reconnaît déjà l’odeur et la voix de sa mère. Très rapidement, il est capable d’y associer son visage. Pour construire un lien, il réveille l’amour et l’attachement de ses parents en se lovant dans leurs bras ou en nichant sa petite tête dans le creux de leur cou. Il recherche le contact visuel avec sa maman, ce qui suscite aussi chez elle un élan d’attachement et l’envie de prendre soin de lui.» Ces comportements instinctifs ont un objectif principal: la survie. Car de son côté, la mère a besoin de créer une relation d’amour unique avec son bébé et, une fois qu’elle s’y est attachée, elle se sent responsable de sa survie, de sa croissance et de son bien-être. C’est par exemple en raison de cette responsabilité qu’en cas de séparation, la mère est anxieuse, car elle ne peut plus assurer son rôle protecteur et nourricier.

Une tâche importante des parents est de maintenir leur enfant dans sa zone de confort. De cette façon, celui-ci grandit avec un sentiment de sécurité qui favorise son développement et ses apprentissages. Très tôt, un bébé réagit à son environnement et exprime des sentiments de bien-être ou d’inconfort (voir encadré). En observant ces réactions, les parents peuvent apprendre à le connaître et s’adapter à ses besoins spécifiques. «Le comportement du bébé, c’est son langage, confirme la Dre Bruschweiler-Stern. Par ce biais, il nous dit ce qu’il ressent et ce dont il a besoin».

Le poids de l’environnement

L’environnement direct du nourrisson a beaucoup d’impact sur son comportement et son développement. Son système nerveux, particulièrement ouvert aux sensations, intègre tout ce qui l’entoure. Même lorsqu’il dort, il continue de «capter» ce qui se passe près de lui. «Un exemple frappant, c’est l’influence des écrans, illustre la spécialiste. Beaucoup de femmes seules avec leur bébé se distraient en regardant la télévision pendant l’allaitement. A priori, cela semble anodin. Pourtant, ça ne procure pas du tout la même expérience pour le bébé qu’un allaitement sans télévision. Celle-ci produit des paroles discontinues et des éclats de lumière. Avec la répétition des repas, le nourrisson enregistre en une seule impression tous les composants de cette expérience, et l’associe au sentiment de sécurité et de confort que représente l’allaitement. En grandissant, l’enfant recherchera la télévision qui restera profondément associée au réconfort des repas de son enfance».

Grâce aux travaux initiés par Brazelton, il est aujourd’hui possible d’apprendre à repérer certaines réactions et d’adapter l’environnement aux besoins individuels de chaque bébé, sans le surcharger. En Suisse, de nombreux spécialistes formés à cette méthode (médecins, pédopsychiatres, sages-femmes, psychologues, etc.) proposent des consultations, souvent prises en charge par les assurances maladie. Un outil précieux pour apprendre à communiquer avec son bébé dès ses premiers jours de vie.

Les enfants aux besoins intenses

Face aux stimuli sensoriels du monde qui les entoure, les bébés ne sont pas tous égaux. Certains semblent plus irritables que la moyenne et sont vite surchargés par ce qui se passe dans leur environnement. Le pédiatre américain William Sear a institué le concept de «High-Need-Baby», le bébé aux besoins intenses. Ces enfants, souvent décrits par leur entourage comme «difficiles» ou «qui pleurent beaucoup», demandent beaucoup d’attention. Ils ne réagissent pas toujours immédiatement au réconfort et ont sans cesse besoin de contacts corporels.

Puisque chaque enfant est différent, cette sensibilité est parfois simplement liée à son profil sensoriel ou génétique. Dans certains cas, une grossesse ou un accouchement difficiles peuvent également avoir un impact. Dans tous les cas, certaines mesures peuvent contribuer à soulager ces enfants et leurs parents, souvent épuisés physiquement et émotionnellement. Le portage et le contact peau à peau, notamment, peuvent avoir un effet calmant et décontractant. Des massages ou l’emmaillotement dans une couverture peuvent aussi contribuer à soulager l’enfant. «Il y a quelques mois, j’ai reçu en consultation un bébé de deux mois et demi qui agitait bras et jambes en continu», raconte la Dre Nadia Bruschweiler-Stern, pédiatre et fondatrice du Centre Brazelton de Genève. «Je l’ai simplement installé dans un coussin en U pour qu’il soit physiquement bien contenu. Cette position a permis un soulagement instantané et prolongé. Pour ses parents, l’effet était impressionnant : juste en étant stabilisé, leur bébé était enfin calme et prêt à communiquer.»

Source: Que faire quand bébé pleure? William et Martha Sears, Ligue internationale de la Leche, 2006   

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Pour aller plus loin :
  • T. Berry Brazelton: Trois bébés dans leur famille: Laura, Louis et Daniel. Les différences de développement, 1985, Stock.
  • T. Berry Brazelton : Points forts: les moments essentiels du développement de votre enfant de 0 à 3 ans, 1993, Stock.
  • Daniel Stern & Nadia Bruschweiler-Stern: La naissance d’une mère, 1998, Odile Jacob.
    Traduit également en allemand, italien, danois, suédois, hébreux.
  • Daniel Stern: Journal d’un bébé, 2004, Odile Jacob.
  • www.brazelton.ch

          

Paru dans le Quotidien de La Côte le 20/06/2018.

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