TDA-H: «Mon quotidien était une montagne de souffrances»
* Trouble déficit de l’attention-hyperactivité (TDA-H): apparaît dans l’enfance et persiste dans environ 60% des cas à l’âge adulte. Ce trouble se caractérise par des difficultés à maintenir son attention, à organiser son quotidien et à accomplir des tâches ennuyeuses, ainsi que par une tendance à la procrastination et l’impulsivité.
«Toute ma vie, je me suis demandé pourquoi je fonctionnais mal. J’avais même fini par accepter cette situation. Un jour, un médecin me dit qu’il a rarement vu quelqu’un avec autant de symptômes typiques. Soudainement, j’ai compris l’entier de ma vie. J’ai éclaté en sanglots.» Claude-Nicolas Becker, 54 ans, évoque cet instant libératoire. Les yeux rougis, il essuie une larme. Deux ans plus tard, l’émotion est encore vive. Ce médecin, c’est le Dr Nader Perroud. Le responsable de l’unité des troubles de la régulation émotionnelle des HUG lui a diagnostiqué un trouble déficit de l’attention-hyperactivité (TDA-H).
Au moment d’égrainer ses souvenirs, Claude-Nicolas n’hésite pas: «Aussi loin que je remonte dans ma mémoire, je me souviens d’un mal-être intérieur incroyable. Enfant, je pleurais pendant des heures avant de me coucher sans savoir pourquoi. A l’école, je ne travaillais pas.» Ses parents cherchent des solutions. Il passe par plusieurs écoles privées, finit en internat. A chaque fois un échec. «Un livret de maths ou du vocabulaire d’allemand? Impossible pour moi d’apprendre par cœur. Je regardais par la fenêtre, je n’arrivais pas à me concentrer. Je n’avais aucun intérêt pour quoi que ce soit et ne terminais jamais rien. Je gardais en moi et ne partageais pas. Mon quotidien était une montagne de souffrances.»
Parcours chaotique
Et d’ajouter: «Plus ça vous tombe dessus, plus vous vous sentez nul et moins vous réussissez. J’avais un énorme manque de confiance en moi. Je ne me trouvais pas adapté à ce monde. J’ai eu des idées suicidaires.» Avec un tel lest, quelle carrière professionnelle possible? Claude-Nicolas quitte Genève et suit son père en Valais, parti reprendre une entreprise viticole familiale. Durant près de vingt ans, à ses côtés, il enchaîne différents métiers: caviste, œnologue –diplômé de Changins–, représentant à l’étranger, chef de vente, directeur commercial et même, pour finir, directeur général, après avoir passé un diplôme fédéral d’économiste.
Un parcours chaotique, marqué qui plus est par un problème de dépendance. «Je buvais beaucoup, mais avec le temps, cela a pris des proportions énormes. Toujours sur la défensive, je mettais la faute sur les autres. J’en ai eu marre d’avoir marre et j’ai suivi une cure pour m’en sortir.» Sans oublier les difficultés d’organisation au quotidien pour travailler normalement. «J’ai utilisé la méthode du mind map (carte mentale) pour garder des idées en tête et structurer mes discours. J’arrivais aussi à cacher mes lacunes en m’entourant des bonnes personnes. Et puis, surtout, en tant que fils du patron, j’étais indéboulonnable. S’il n’y avait pas eu l’entreprise familiale, je ne sais pas comment j’aurais tourné.»
En 2006: surcroît de travail, burn-out et fin de l’aventure. S’ensuit une longue période de dépression, de chômage entrecoupé d’emplois dans les assurances. Suivi par un psychiatre, il est mis en contact avec le Dr Perroud… pour un diagnostic libérateur.
Confiance en l’avenir
Depuis deux ans, ces deux médecins le traitent. Avec succès. «Les résultats des médicaments sont spectaculaires. Je suis de nouveau actif. Je dois encore faire du travail sur moi-même pour comprendre mon fonctionnement, mais je n’ai plus de pression, car je connais mon problème.» Et l’avenir? «Je suis un rescapé de la vie qui a traversé une longue période de déprime. Aujourd’hui, j’ai repris du plaisir à vivre. Je dois à mes médecins ma vie actuelle. J’ai un nouveau projet professionnel auquel je crois et dans lequel je m’investis.» Claude-Nicolas propose désormais à quiconque de créer son propre vin.
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Article repris du site pulsations.swiss