SAPHO, un mal complexe longtemps méconnu

L’impression de «s’être fait renverser par un camion, d’avoir le corps en feu»: c’est ainsi que les victimes du syndrome SAPHO décrivent leur douleur à Nathalie de Benedittis. La Française est bien placée pour savoir ce qu’ils traversent. Présidente et fondatrice de l'Association pour l'Information et la Recherche sur le Syndrome SAPHO (AIRSS), on lui a découvert cette maladie alors qu’elle n’avait que 16 ans.
Cinq symptômes
SAPHO, c’est un acronyme qui réunit les cinq manifestations principales d’un mal insidieux attaquant la peau et l’appareil locomoteur. Il comprend la synovite, c’est-à-dire l’inflammation de l’enveloppe entourant les articulations qui deviennent douloureuses et raides. L’acné, qui peut se manifester de manière très visible sur le visage et le dos. La pustulose, soit l’apparition de petites cloques de pus sur la paume des mains ou la plante des pieds. L’hyperostose, soit la croissance excessive d’un ou plusieurs os. Et enfin, l’ostéite, une atteinte inflammatoire de l’os qui se traduit par des douleurs souvent permanentes, notamment nocturnes. Les malades peuvent être atteints d’un ou plusieurs symptômes, simultanément ou successivement.
Un catalyseur émotionnel
«Le syndrome SAPHO est un phénomène réactionnel. Le système immunitaire réagit de manière explosive à la présence de bactéries qu’il perçoit comme agressives alors qu’elles sont habituellement inoffensives», explique Gilles Hayem, rhumatologue spécialiste du syndrome à l’hôpital Ambroise-Paré, en France. Cette maladie à prédisposition génétique est selon lui fortement influencée par le psychisme. «Mes patients ont presque tous vécu un événement traumatisant avant que le syndrome se constitue, un peu comme un "catalyseur" émotionnel. En prendre conscience contribue grandement à la guérison».
«Mes patients ont tout entendu»
Les souffrances sont à la fois morales et physiques. Morales, car les manifestations cutanées sous forme d’acné sévère sont socialement handicapantes. Physiques, car les douleurs rhumatismales, notamment dans la cage thoracique, la colonne vertébrale et le bassin, peuvent empêcher une vie normale, sans compter l’apparition possible de cloques gênantes sous les pieds et les mains. Et la fatigue donne l’impression de «vivre sous une chape de plomb», selon Nathalie de Benedittis.
A cela s’ajoute la difficulté de faire reconnaître cette maladie rare – le syndrome de SAPHO toucherait une personne sur 50 000 en France. «Les médecins ne l’ont identifié qu’en 1985. Il faut dire qu’il touche la partie centrale de la colonne vertébrale, invisible lors des examens. Mes patients ont tout entendu, de "Vous n’avez rien, c’est dans votre tête" jusqu’au diagnostic de cancer des os. Ces doutes s’ajoutent à la souffrance», souligne Gilles Hayem.
Traitements multiples pour un mal variable
La scintigraphie osseuse, un examen qui permet la détection des atteintes osseuses de la maladie, est incontournable pour mettre fin à l’errance médicale. La médecine répond ensuite à ce «mal à géométrie variable», comme le qualifie Gilles Hayem, par une large palette de traitements. «Les biothérapies permettent de réguler le processus immunologique réactionnel et les molécules appelées bisphosphonates permettent d’inhiber le processus de dégénérescence du tissu osseux. A cela s’ajoutent anti-inflammatoires et antalgiques pour apaiser les symptômes», résume le rhumatologue.
Les médicaments sont essentiels, mais le moral ne l’est pas moins. C’est particulièrement vrai pour une maladie chronique inflammatoire comme le syndrome SAPHO, qui peut être très démoralisante. «On n’en meurt pas. Il faut donc apprendre à vivre avec, soutient Nathalie de Benedittis. Être malade, c’est intégrer un nouveau membre à votre famille. N’en faites pas votre identité et ne le laissez pas définir votre existence», conclut-elle.

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