Quand nos intestins souffrent en vacances
Quand faut-il s’inquiéter?
Si les épisodes de diarrhée aiguë sont le plus souvent bénins, certains signes doivent immédiatement alerter sur la présence d’un trouble grave. Il faut ainsi consulter un médecin au plus vite en cas de:
- diarrhées qui durent plus de 7 jours;
- fièvre;
- sang frais et/ou glaires (liquide visqueux de couleur blanchâtre) dans les selles;
- état général mauvais: épuisement, vertiges, etc.;
- impossibilité de se réhydrater: en cas de vomissements importants notamment.
«En été, la majorité des troubles intestinaux sont d’origine infectieuse et provoqués par l’ingestion d’eau ou d’aliments contaminés, explique la Dre Alix Miauton, cheffe de clinique en médecine tropicale, voyages et vaccinations à Unisanté Vaud. Ils se manifestent sous la forme d’un épisode dediarrhée aiguë, soit l’émission de selles plus liquides et plus fréquentes durant généralement quelques jours. La diarrhée est parfois accompagnée de vomissements, de douleurs abdominales et de fièvre.»
Quel que soit l’agent à l’origine de l’infection, le tableau clinique est la plupart du temps identique. Les symptômes apparaissent ainsi après une période d’incubation allant de quelques heures à deux semaines. Le plus souvent, ils disparaissent d’eux-mêmes en deux à cinq jours, ce qui fait de ces épisodes des phénomènes généralement sans gravité.
Quelques précautions sont toutefois de mise pour appréhender au mieux ces trouble-fêtes estivaux. Quels sont les moyens de s’en prévenir, en Suisse et à l’étranger? Que faire lors d’un épisode de diarrhée aiguë et comment reconnaître les éventuels signes de gravité? Enfin, comment se remettre d’aplomb, une fois la crise passée?
Que faire lors d’un épisode de diarrhée aiguë?
La plupart du temps, les troubles intestinaux infectieux sont sans gravité et ne nécessitent pas de traitement médicamenteux, sauf prescription médicale. L’utilisation de médicaments ralentisseurs du transit intestinal de type Imodium reste possible, mais avec précaution. «Ces médicaments ne soignent pas les diarrhées mais en diminuent les symptômes, indique la Dre Miauton. Il est pratique de les avoir sur soi si l’on doit impérativement voyager en étant malade par exemple. Mais ils ne doivent être utilisés qu’en l’absence de signes de gravité (lire encadré, ndlr) et sur des courtes durées, car ils peuvent masquer la présence d’un trouble plus grave.»
La clé: bien s’hydrater
En l’absence de traitement, la seule attitude à adopter en attendant la diminution des symptômes est de bien s’hydrater. «Il est capital de se réhydrater chaque jour avec au moins un litre et demi d’eau, idéalement mélangée à un peu de sel et de sucre, conseille la spécialiste. On peut aussi opter pour des bouillons de légumes ou du thé sucré accompagné de biscuits salés.» À noter que le Coca-Cola, souvent présenté comme une solution pour soulager les symptômes, peut en réalité empirer les diarrhées en raison de sa haute teneur en sucre. On trouve en revanche dans le commerce des solutés de réhydratation orale qu’il est conseillé d’avoir sur soi lors de voyages avec des enfants de moins de cinq ans. «Ces derniers se déshydratent très rapidement et sont donc particulièrement vulnérables lors d’épisodes de diarrhées aiguës, avertit la Dre Miauton. Si l’enfant ne parvient pas à se réhydrater ou présente des signes d’irritabilité, il est nécessaire de consulter un médecin au plus vite.» La vigilance est également de mise chez les personnes âgées, moins sensibles à la soif, ainsi que chez les individus immunosupprimés et les malades chroniques, dont le traitement médicamenteux peut aggraver les symptômes.
Quelle attitude adopter une fois la crise passée?
Là encore, il faut s’armer de patience. Dans les jours suivant l’épisode de diarrhée, on évitera de manger trop gras, trop sucré ou trop épicé. Les produits laitiers sont également déconseillés. «La reprise d’une alimentation variée doit se faire de façon progressive en commençant par de petites quantités d’aliments constipants, comme les bananes, le riz et les carottes», conseille la Dre Miauton, qui prévient qu’un retour à un transit normal peut prendre une dizaine de jours. «Si des inconforts perdurent au-delà de cette période, il est préférable de consulter un médecin. Des diarrhées persistantes, des reflux acides, des nausées ou une perte d’appétit peuvent en effet être dus à un autre trouble tel que la présence d’un parasite.»
Les précautions à prendre en voyageant à l’étranger
«Les épisodes de diarrhée sont extrêmement fréquents lors de voyages à l’étranger, relève le Dr Gilles Eperon, médecin adjoint au Service de médecine tropicale et des voyages des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Connus sous les termes génériques de "diarrhée du voyageur" ou de "tourista", ils sont habituellement dus à des bactéries assez communes, mais un peu différentes de celles auxquelles notre flore intestinale est habituée en Suisse.» Lié à la qualité du traitement des eaux, le risque de diarrhée du voyageur est présent dans la plupart des pays tropicaux et à bas et moyens revenus, principalement en Asie du Sud et du Sud-Est, en Afrique subsaharienne et en Amérique latine.
«Il n’existe aucun traitement préventif prouvé contre la diarrhée du voyageur, explique le Dr Eperon. Le seul moyen de l’éviter est de surveiller attentivement l’eau et les aliments consommés sur place.» Lors de voyages en zones à risque, l’eau doit donc être bouillie ou purifiée avant d’être consommée. L’eau provenant de bouteilles en plastique est considérée comme sûre, mais il existe également d’autres options plus écologiques telles que les gourdes et pailles filtrantes ou les purificateurs d’eau à base d’UV (à noter que certaines gourdes filtrantes sont inefficaces contre les virus). «Les aliments doivent impérativement être cuits ou pelés, continue le Dre Eperon. Les crudités, glaces, boissons avec glaçons, ainsi que les aliments entreposés longtemps à haute température sont à éviter.Enfin, on veillera à se laver régulièrement les mains et à éviter l’ingestion d’eau lors de baignades.»
Suisse: gare aux intoxications alimentaires
En Suisse, les troubles intestinaux recensés en été sont majoritairement dus à des intoxications alimentaires, les hautes températures favorisant en effet la création de toxines dans les aliments. Ces troubles de courte durée qui se déclarent quelques heures après l’absorption de l’aliment contaminé entraînent principalement des vomissements parfois accompagnés de diarrhée. «Pour les éviter, on prendra garde à ne pas exposer longtemps un aliment à de hautes températures, conseille le Dr Gilles Eperon, médecin adjoint au Service de médecine tropicale et des voyages des HUG. On se méfiera également des pâtisseries et de tout aliment contenant de la crème et du sucre, qui ont tendance à s’altérer plus rapidement.»
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Paru dans Le Matin Dimanche le 31/07/2022
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