Mon enfant est en surpoids
«Bouboule», c’est le surnom du jeune Kevin dans le film du même nom qui raconte son histoire. On y voit le personnage astreint à des pesées régulières sous le regard culpabilisant de son médecin, quand il ne subit pas les moqueries de son entourage ou fait des exercices dans une piscine dans l’espoir de perdre quelques kilos.
Dans la cour d’école, le regard des camarades est souvent dur pour ceux qui, comme lui, affichent des rondeurs ou une franche obésité. Et pourtant, souligne le Dr Michel Russo, pédiatre à l’Hôpital de Sion et responsable d’une consultation dédiée, «le surpoids et l’obésité ne sont pas des maladies contagieuses ni un défaut de mode de vie, la composante génétique étant largement prédominante». Dans le contexte obésogène dans lequel nous vivons, seule une part des individus développe un excès pondéral plus ou moins sévère, en raison d’une prédisposition familiale et de facteurs génétiques multiples. Selon le spécialiste, c’est avant tout une «marque de fabrique». Car d’autres individus garderont un poids dans la norme malgré une hygiène de vie critiquable
Un facteur de risque
L’obésité ne demeure pas moins un facteur de risque pour la santé, avec en première ligne les maladies cardiovasculaires mais aussi respiratoires, notamment. Lorsqu’on est parent, comment réagir si son enfant est «enveloppé»? Faut-il s’inquiéter? «Tout dépend du degré», répond le médecin. Pour en avoir le cœur net, il est conseillé de s’adresser au pédiatre de l’enfant. Celui-ci va calculer l’indice de masse corporelle (IMC) de l’enfant (son poids divisé par sa taille au carré). L’IMC sera mis en rapport avec sa courbe de corpulence. Car à la différence de ce qui se passe pour l’adulte, le poids ne va cesser d’évoluer avec la taille de l’enfant, «les enfants en surpoids étant souvent un peu en dessus des courbes pour ce qui est de la taille également», précise par ailleurs le spécialiste.
Si le surpoids est modéré, le médecin suivra simplement l’évolution des courbes et délivrera des conseils d’hygiène de vie de base, comme on le fait pour n’importe quel patient. A savoir, une alimentation équilibrée, du mouvement au quotidien pour une meilleure santé et un meilleur mental. «En revanche, s’il y a, dans la famille, des cas de diabète, d’hypercholestérolémie ou de maladies cardiovasculaires avant l’âge de 50 ans, il faut se montrer vigilant», alerte le Dr Russo. En présence d’un risque familial ou d’un surpoids important, un premier bilan de santé (contrôle de la tension artérielle, du cholestérol, du diabète, du foie) est en effet indiqué dès l’âge de 5 ans.
En harmonie avec son corps
Au-delà des kilos sur la balance, il faut tenir compte du regard que l’enfant pose sur son propre corps et de son sentiment par rapport à son poids. «C’est un élément déterminant. Il ne faut pas mettre de l’attention sur le poids de l’enfant s’il n’en fait lui-même pas cas. Les plus jeunes peuvent être très marqués par ce qu’on leur dit. Il faut surtout éviter qu’un enfant qui se sent bien dans sa peau change de regard sur lui-même et ressente un malaise», prévient le pédiatre. Que faire toutefois si le surpoids (ou l’obésité) est mal vécu par l’enfant et représente un risque pour sa santé? Point de recettes ou de régimes miracles, mais une prise en charge au long cours (entre six mois et deux ans) et surtout individualisée. «Modérer le surpoids ou l’obésité permet de prévenir une obésité ultérieure à l’âge adulte. Plus on intervient tôt, plus on est efficace », souligne le Dr Russo. Ce d’autant plus que les enfants, avant la puberté, sont généralement réceptifs aux messages. Concrètement, on ne vise pas de poids idéal, on ne cherche pas non plus la minceur à tout prix, l’objectif étant plutôt de réduire la vitesse de la prise de poids. «Car en prenant de la taille, les enfants mincissent naturellement», explique le médecin. Là aussi, il est important de tenir compte des souhaits de l’enfant et de ses objectifs (comment il a envie d’être), et l’accompagner dans ce chemin.
La prise en charge peut se faire avec le médecin de premiers recours (pédiatre) ou dans une consultation dédiée, comme à l’Hôpital de Sion par exemple. Les axes sont multiples: on travaille sur l’hygiène de vie, les aspects diététiques, l’activité physique, mais on s’occupe également des facteurs psycho-émotionnels et des éventuelles dysharmonies familiales. L’activité physique par exemple est souvent redoutée lorsqu’on est en surpoids. Or, «il existe des professeurs de sport spécialisés, soulève le Dr Russo. Ils montrent aux enfants de quoi ils sont capables et leur proposent des activités adaptées». Clowns pour l’éducation thérapeutique aux patients ou encore groupes inter-enfants et inter-parents sont quelques-unes des méthodes de soin efficaces et stimulantes pour ces jeunes patients. «On défend avant tout des principes de santé et d’hygiène de vie, sans être pour autant coercitifs. Parfois, il suffit d’apporter des petites touches au quotidien: pas de grignotage entre les repas, un peu moins de télévision, et moins de Nutella! L’important étant de s’adapter au mode de vie et à la culture de chaque famille, avec qui nous cherchons à partager les décisions», conclut le spécialiste.
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Paru dans Planète Santé magazine N° 37 – Mars 2020
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Obésité
L’obésité est une maladie qui augmente le risque de survenue d’autres maladies et réduit l’espérance et la qualité de vie. Les patients atteints de cette accumulation anormale ou excessive de graisse corporelle nécessitent une prise en charge individualisée et à long terme, diététique et comportementale.