Des antiviraux révolutionnent la lutte contre l’hépatite C
De quoi on parle
Le traitement de l’hépatite C a connu un véritable bouleversement avec l’arrivée sur le marché d’antiviraux de nouvelle génération qui permettent de guérir plus de 90% des personnes traitées. Mais ils coûtent très cher. L’Office fédéral de la santé publique a déjà obtenu des fabricants qu’ils baissent un peu leurs prix. L’accord est valable pendant deux ans; ensuite, les négociations reprendront.
Un traitement de douze semaines permet désormais de guérir plus de 90% des personnes souffrant de l’hépatite C chronique (voir infographie). Cette prouesse résulte de la mise sur le marché, il y a un peu plus d’un an, de médicaments de nouvelle génération. «C’est une révolution», souligne Darius Moradpour, responsable du Service de gastro-entérologie et d’hépatologie du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV).
Les hépatites (inflammations du foie) peuvent prendre diverses formes, nommées par des lettres allant de A à E selon la nature du virus fauteur de troubles. Parmi elles, l’hépatite C est celle «qui évolue le plus fréquemment vers un stade chronique et elle est aussi la plus répandue dans notre pays», constate l’hépatologue. En Suisse, quelque 44 000 cas ont été recensés, mais on estime qu’environ 80 000 individus seraient porteurs du virus de l’hépatite C, le VHC, dont la moitié ne le saurait pas. Il est vrai que la majorité des personnes contaminées ne présentent aucun symptôme de la maladie. Mais, même dans ce cas, le VHC peut détruire peu à peu le tissu hépatique, ce qui peut conduire, des décennies plus tard, à une cirrhose qui accroît le risque de développer un cancer du foie.
Transmission par le sang
Le virus VHC se transmettant par le sang, la contamination résulte principalement de transfusions sanguines – en Suisse, il s’agit de celles réalisées avant 1990, date de l’introduction du test de dépistage systématique des produits sanguins. Elle découle aussi du partage des seringues ou d’actes médicaux, de tatouages et de piercings faits avec des instruments insuffisamment stérilisés. En revanche, la contamination par voie sexuelle est rare, hormis chez les hommes homosexuels co-infectés avec le virus du sida.
Il n’existe actuellement aucun vaccin disponible pour prévenir l’infection. Certes, des candidats-vaccins sont actuellement en cours de tests à l’Hôpital cantonal de Saint-Gall, mais il ne s’agit encore que de recherche. En revanche, les thérapies ont rapidement évolué depuis la découverte du VHC en 1989. Il y a d’abord eu l’interféron alpha, qui était un «traitement lourd, précise Darius Moradpour, puisque les patients devaient s’injecter le médicament tous les deux jours, pendant six à douze mois». En outre, il entraînait de nombreux effets secondaires et seuls 10 à 20% des patients arrivaient ainsi à se débarrasser du virus. Une dizaine d’années plus tard, on a ajouté à l’interféron un médicament oral, la ribavirine, qui a raccourci la thérapie et amélioré son taux de succès à 30-40%.
Un pas de plus a été franchi au début des années 2000 avec l’utilisation, aux côtés de la ribavirine, d’une autre forme d’interféron alpha qui ne nécessitait plus qu’une injection par semaine et qui guérissait environ la moitié des personnes infectées. Puis, en 2011, est apparu le premier médicament s’attaquant directement à la multiplication du VHC. Associé aux deux autres médicaments utilisés précédemment, il a porté le taux de guérison à 70%. «Cependant, ce traitement restait encore très lourd, il avait toujours des effets secondaires qui pouvaient être sévères et il ne permettait de soigner qu’un des six sous-types du virus», constate le spécialiste du CHUV.
Un succès de la médecine moderne
C’est donc une nouvelle ère qui a débuté avec la mise sur le marché de médicaments qui permettent des traitements plus courts (entre 8 et 24 semaines), qui sont mieux tolérés et beaucoup plus efficaces: ils guérissent plus de 90% des patients. «Pour la première fois, on dispose de traitements oraux et on peut se passer d’interféron», souligne Darius Moradpour.
Des traitements très coûteux
Plus de 60 000 francs! C’était au départ le prix fixé par les entreprises pharmaceutiques pour un nouveau traitement de l’hépatite C chronique. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a malgré tout autorisé le remboursement de deux médicaments, mais en réservant leur usage uniquement aux personnes dont la maladie avait atteint un stade avancé.
Après avoir négocié avec les autorités fédérales, les entreprises pharmaceutiques ont finalement baissé leurs prix. L’OFSP a donc étendu le remboursement aux cinq médicaments de nouvelle génération commercialisés en Suisse et a décidé d’en faire aussi bénéficier les patients ayant une maladie à un stade dit «intermédiaire». Par rapport à la situation qui prévalait au début, «cet élargissement représente des coûts supplémentaires de 52,4 millions de francs pour l’assurance-maladie», écrit l’OFSP.
En dépit de la ristourne accordée par les sociétés de la pharma, le traitement coûte encore entre 42 000 et 50 000 francs, selon le médicament utilisé. «Cela reste très cher, constate Jörg Indermitte, coresponsable de la Section Médicaments de l’OFSP. C’est aussi pour cette raison que nous n’avons pas étendu le remboursement à toutes les personnes ayant l’hépatite C.»
Ces traitements de nouvelle génération ont pour effet de bloquer une protéine nécessaire à la multiplication du virus. Il existe trois classes de médicaments qui ciblent des protéines virales différentes et permettent ainsi, parfois en association avec la ribavirine, de lutter contre tous les sous-types du VHC. Et cela, avec «peu d’effets secondaires», précise l’hépatologue. Au début du traitement, certaines personnes ont de légers maux de tête ou des troubles digestifs, «mais la majorité ne ressent rien du tout».
Le seul inconvénient de ces médicaments vient en fait de leur coût qui reste très élevé, bien que les autorités fédérales aient réussi à inciter les fabricants à revoir leurs prix à la baisse (lire encadré).
En dépit de ce problème, loin d’être négligeable, l’avancée thérapeutique mérite d’être saluée. «Vingt-cinq ans après la découverte du virus, on dispose d’un traitement réellement efficace contre une maladie qui affecte entre 120 et 200 millions de personnes dans le monde», remarque Darius Moradpour qui voit là un véritable «succès de la médecine moderne».
Limiter les conséquences de la maladie
Au total, chaque année, quelque 4800 malades pourront bénéficier de ces traitements, alors qu’il y a actuellement 44 000 cas d’hépatite C recensés en Suisse. Comment justifier que les mesures adoptées par l’OFSP excluent un nombre important de malades? «Nous avons suivi les directives internationales qui recommandent de réserver en priorité ces médicaments aux personnes ayant une infection de stade intermédiaire et avancé, répond Jörg Indermitte. En outre, une étude de l’Université de Zurich a montré qu’il faut traiter environ 4200 patients par an pour réduire fortement les conséquences, parfois mortelles, de la maladie, comme le développement du cancer du foie.» Quoi qu’il en soit, les autorisations de remboursement données par l’OFSP ne sont valables que pour deux ans. A l’issue de cette période, l’Office réévaluera la situation.
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