Radiographies dentaires: le minimum, s’il vous plaît
Aucun doute: «voir» l’intérieur du corps humain grâce aux rayons X a constitué un progrès majeur dans le développement de la médecine et de la chirurgie modernes. Aucun doute non plus : les multiples et nouveaux outils développés par l’industrie de la radiologie ne sauraient être utilisés sans précaution, voire sans parcimonie. Tous les professionnels de santé spécialisés ont ainsi au fil du temps appris (du moins en théorie) à manier avec prudence ces instruments. Il en va de leur santé comme de celle de leurs patients compte-tenu des effets cumulatifs et pathologiques que les rayonnements ionisants peuvent avoir sur le corps humain. Ceci n’a pas empêché qu’en France une étude officielle de veille sanitaire a permis d’établir qu’en 2007 l’exposition de la population (calculée en dose efficace moyenne par an et par habitant) avait augmenté de 57 % en cinq ans.
C’est ce thème qu’aborde – sous l’angle particulier de la chirurgie et de la médecine dentaires – une étude publiée dans l’édition en ligne de Cancer. Il s’agit là de la revue de l'American Cancer Society qui vient d’en traduire la substantifique moelle à l’attention du grand public. Ce travail suggère en substance que la pratique d’un nombre élevé de radiographies dentaires pratiquées chez une même personne est associée, chez elle, à un risque ultérieur accru de certaines tumeurs cérébrales généralement bénignes. Les auteurs ne remettent nullement en question la nécessité de ces examens ; ils estiment néanmoins qu’au vu de leurs résultats les chirurgiens-dentistes doivent réviser leurs calculs des bénéfices et des risques avant de multiplier ces investigations. Notamment chez les jeunes enfants de moins de dix ans. Vous pouvez également débattre (pour vous et/ou votre enfant) directement de cette question avec votre chirurgien-dentiste.
Les méningiomes sont des tumeurs cérébrales généralement bénignes (98% des cas) apparaissant généralement après 50 ans. Mais comme le rappelle à propos de cette étude l’hebdomadaire britannique The Economist (sous le titre Little and not often, please) dans son édition datée 14-20 avril, tumeur bénigne ne veut pas dire sans danger.
On indique généralement qu’aucune cause précise n’a été identifiée pour expliquer l’origine des méningiomes. Les neurochirurgiens rapportent toutefois que de nombreux cas ont été décrits chez des patients initialement traités par radiothérapie externe (pratiquées pour lutter contre …. des teignes) dans les années 1945 à 1950. Les rayonnements ionisants semblent bien aujourd’hui être le principal facteur de risque environnemental de développement du méningiome. De nombreuses études ont ainsi déjà mis en garde contre un recours excessif aux examens d’imagerie médicale, scanographie et radiologie interventionnelle. Certains cas se sont aussi révélés après des traumatismes crâniens ce qui n’a pas été sans soulever des problèmes médico-légaux d’imputabilité.
L’existence d’un méningiome est parfois découverte de manière fortuite, lors d’un scanner ou d’un examen d’imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM). Le diagnostic peut aussi être porté après l’apparition de céphalées diffuses ou localisées, de douleurs de la face, de migraines, de troubles neurologiques ou de crises d’épilepsie. Une fois le diagnostic confirmé (par radiographie simple, scanner ou IRM) le traitement de cette tumeur bénigne est neurochirurgical : il consiste à pratiquer son exérèse, intervention qui peut être plus ou moins délicate en fonction de la taille de la tumeur, de sa topographie et de la présence ou non d’un envahissement osseux.
Le travail publié dans Cancer a été mené par une équipe placée sous la direction du Pr Elizabeth Claus (Yale University School of Medicine, Hôpital Brigham and Women de Boston). Les auteurs ont enquêté à partir d’un groupe de 1.433 personnes (âgées de 20 à 79 ans) chez lesquelles un diagnostic de méningiome avait été porté entre 2006 et 2011. Ces données ont été comparées à celles colligées auprès de 1350 personnes ayant des caractéristiques similaires mais ne souffrant pas de méningiome. Toutes les personnes habitaient dans les États du Connecticut, du Massachusetts, de la Caroline du Nord, ainsi que dans les régions de San Francisco Bay Area et de Houston (Texas). Le travail a concerné la pratique radiographique dite du «bitewing» (film maintenu en place entre les dents de la personne examinée) et celle, panoramique, dite du «Panorex».
Au final, les auteurs de ce travail statistique constatent que les personnes ayant subi des examens «bitewing» une fois par an ou plus ont un risque ultérieur multiplié par un facteur de 1,4 à 1,9 de souffrir d’un méningiome. Un risque accru est aussi retrouvé chez les personnes ayant subi fréquemment des examens de radiographie dentaire panoramiques. Ainsi celles qui ont subi ces examens avant l’âge de dix ans ont un risque multiplié par 4,9 de développer un méningiome. Quant aux adultes qui ont subi cet examen une fois par an ou plus le risque est, selon les âges, multiplié par un facteur de 2,7 à 3.
Les chercheurs prennent toutefois soin de préciser qu’aujourd’hui les patients des chirurgiens dentistes sont exposés à de plus faibles doses de rayonnements que dans le passé. On aurait toutefois sans doute tort de négliger ou de sous-estimer leurs conclusions. Largement diffusée auprès des professionnels et de leurs patients cette étude peut utilement contribuer à sensibiliser quant à une utilisation optimale des radiographies dentaires. Ce risque potentiel et la multiplication des examens radiographique n’est en effet en rien une fatalité. Surtout chez leurs patients qui ne présentent aucun des symptômes pouvant les justifier. Outre-Atlantique l'American Dental Association a aussitôt réagi à cette publication et rappelé qu’elle formule, selon les âges, différentes recommandations concernant la fréquence maximale des radiographies. On aimerait pouvoir bénéficier d’une telle réactivité préventive sur le Vieux Continent.
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