Pour perdre du poids, vaut-il mieux bouger plus ou manger moins?

Dernière mise à jour 20/02/19 | Article
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Activité physique et alimentation saine: un duo déterminant pour équilibrer son poids. Mais pour perdre quelques kilos, le plus efficace se joue surtout du côté de l’assiette. Explications.

Mettre en compétition sport et alimentation est légitime: quelque 130 kilocalories avalées en optant pour un yaourt au chocolat en dessert, soit autant que celles dépensées en allant courir deux kilomètres. En période de bonnes résolutions, certains se priveront donc de dessert quand d’autres opteront pour un footing… mais dans quel but? «Si l’objectif est de perdre du poids, les deux leviers sont primordiaux, mais il faut surtout manger moins et différemment», tranche le Pr Bengt Kayser, directeur de l’Institut des sciences du sport de l’Université de Lausanne. Avant de rappeler: «Le poids découle d’une équation entre, d’un côté, les apports énergétiques issus de ce que nous mangeons et buvons chaque jour, et de l’autre, les dépenses énergétiques cumulées par le corps pour son fonctionnement et l’activité physique qui lui est demandée.»

Trouver la faille

L’IMC: un bon repère?

Omniprésent dans les stratégies de prévention, l’indice de masse corporelle (IMC)* permet de dépister non seulement un poids trop faible (IMC inférieur ou égal à 18,5), signe par exemple d’une anorexie, mais également un surpoids (IMC supérieur ou égal à 25) ou une obésité (IMC supérieur ou égal à 30), entraînant quant à eux un risque accru de maladies cardiovasculaires.

L’IMC est-il utile dans le cadre d’une perte de poids?

Pas vraiment, selon Maaike Kruseman, professeure à la Haute Ecole de Santé de Genève: «L’IMC est un outil utile dans le cadre d’un suivi médical général, mais très grossier dans une démarche diététique. Par exemple, pour une personne mesurant 1,70 m, l’IMC dit "normal" va de 53 à 72 kg, l’écart est vraiment important et il n’est pas certain qu’une personne passant de 60 à 70 kg se sente bien malgré un IMC dit normal.»

Quel objectif viser si l’on souhaite perdre quelques kilos?

«En cas de surpoids, commencer par une perte de 10% est raisonnable, estime la spécialiste. Si on a un poids "normal", une perte de 3 à 4 kilos est bien sûr possible, mais dans tous les cas, pour être durable, la perte devra s’accompagner de changements définitifs au niveau de l’hygiène de vie».

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* L’IMC est obtenu en divisant le poids (en kg) par la taille (en m) au carré. Ainsi une personne mesurant 1,65 m et pesant 60 kg aura un IMC de 60/1,652, soit 22.

Sauf que bien souvent, pour des raisons biologiques, génétiques, environnementales, cette balance entre les calories «qui entrent» et celles qui «sortent» est déséquilibrée. La raison la plus fréquente? Pas assez d’activité physique et trop de calories ingérées. Résultat sans concession: un stockage sous forme de graisses. «Il ne faut pas oublier que notre patrimoine génétique s’est modelé pendant des millions d’années sur la base d’une parcimonie de nourriture et d’intenses dépenses énergétiques pour affronter une nature hostile, souligne le Pr Kayser. Aujourd’hui, le schéma est inversé: la profusion alimentaire est partout et tout autour de nous concourt à ce que nous bougions le moins possible. Notre organisme n’est pas fait pour cela. Si nous ne luttons pas contre ces nouvelles tendances, la prise de poids est inéluctable.»

Pourquoi dès lors miser surtout sur ce qui se passe dans nos assiettes? «L’activité physique agit sur le substrat énergétique, autrement dit, sollicite les réserves du corps, que sont le glycogène du foie et des muscles, ainsi que les graisses, explique le Dr Dimitrios Samaras, médecin consultant au sein de l’Unité de nutrition des Hôpitaux universitaires de Genève. Mais ces pertes sont indirectes, limitées –surtout si l’alimentation est inchangée– et chronophages, car elles nécessitent d’intensifier fortement l’activité physique sur de longues périodes. L’activité physique est un allié crucial pour la santé en général, mais si l’on souhaite perdre du poids, il est beaucoup plus efficace de travailler sur ce qui entre dans le corps, autrement dit sur ce que nous mangeons. La question de quand, combien et comment nous mangeons est déterminante.»

Mais par quoi commencer? «La première chose est de trouver la ou les failles expliquant la prise de poids ou le surpoids, conseille Maaike Kruseman, professeure au sein de la filière Nutrition et diététique de la Haute Ecole de Santé de Genève. Cela peut être une consommation excessive d’un aliment en particulier, une prise d’alcool trop abondante ou encore un grignotage compulsif». Une astuce pour démasquer le problème: noter sur quelques jours tout ce qui est mangé et à quelle heure. Le constat est souvent implacable. «L’enjeu est ensuite d’oser changer d’habitude et de tout mettre en œuvre pour tenir sur le long terme. Par exemple, en évitant de garder des réserves de chips si l’on se sait capable d’avaler un paquet entier en rentrant du travail», suggère l’experte.

Autre conseil: ne pas confondre ce qui est bon pour la santé et ce qui ne fait pas grossir. «Un malentendu s’est installé: certaines personnes pensent bien faire en arrosant leurs plats d’huile d’olive, en se ruant sur les amandes, les noix ou les avocats par exemple, explique Maaike Kruseman. Ces aliments sont certes excellents d’un point de vue nutritionnel, mais ils sont très caloriques, il faut en tenir compte».

Choisir le bon moment

Quant à l’activité physique, si elle n’est pas le levier principal de la perte de poids, elle est essentielle. Tandis que 150 minutes d’activités d’intensité modérée (marche, balade à vélo) sont conseillées par semaine, aller au-delà est bénéfique à de nombreux niveaux. Parmi ces bienfaits: préservation de la santé générale, optimisation de la sensation de satiété, perte progressive de graisse, meilleure gestion des «écarts» alimentaires par le corps lui-même, limitation de la perte musculaire liée à l’âge ou encore augmentation du métabolisme de base. En clair, au repos, le corps d’un sportif consomme naturellement plus de calories qu’une personne sédentaire. «Entreprendre des efforts sur l’alimentation est beaucoup plus puissant si l’on accroît son activité physique en même temps», insiste le Dr Samaras. Une erreur à éviter toutefois: compenser! «Faire jusqu’à une heure de sport ne nécessite pas de manger davantage ou de boire des boissons énergétiques, bien au contraire, cela ruine tous les efforts d’un point de vue calorique», précise le spécialiste.

Reste à choisir le bon moment pour entamer le processus. «De par les nouvelles habitudes et les remises en question que cela suppose, perdre du poids constitue un réel changement de vie, souligne Maaike Kruseman. Il est important de se lancer ce défi pendant une période suffisamment sereine, en se faisant aider d’un professionnel si besoin». Et de conclure: «Au vu de la frénésie de nos vies, de la nourriture à profusion qui nous entoure en permanence, les gens qui n’ont aucun problème de poids ont de la chance! Perdre les kilos qui nous dérangent est un défi qui doit s’aborder avec beaucoup de douceur envers soi-même».

7 clés pour changer ses habitudes

Rarement efficaces sur le long terme, souvent dangereux pour la santé, les régimes drastiques n’ont plus vraiment le vent en poupe. La stratégie gagnante: repenser ses habitudes au quotidien. Les conseils du Dr Dimitrios Samaras, médecin consultant au sein de l’Unité de nutrition des Hôpitaux universitaires de Genève.

  • Opter pour une chaîne alimentaire descendante. «Un petit-déjeuner de roi, un dîner de prince et un souper de pauvre»: l’adage est aussi connu que pertinent puisqu’il correspond au fonctionnement de l’organisme, plus apte à assimiler les calories qu’il reçoit en début de journée que le soir.
  • Miser sur les fibres. Les fibres alimentaires présentes dans les légumes, les céréales ou encore les légumineuses ont l’avantage de rassasier tout en générant une dépense d’énergie pour l’organisme, ce qui n’est pas le cas par exemple des boissons sucrées, directement assimilées par le corps.
  • Oser les encas. Critiqués à tort, les encas riches en fibres et protéines –par exemple un fruit, quelques amandes ou un yaourt nature en milieu de matinée et d’après-midi, ont l’avantage de caler sainement la faim. Ainsi le repas suivant sera abordé avec moins d’avidité.
  • Tromper la faim. Commencer le repas par des aliments riches en fibres et pauvres en calories permet de se rassasier à moindres frais. Par exemple: opter pour une salade avant une pizza permet de manger moins et de mieux assimiler les calories.
  • Se méfier des tendances. Plus de gluten, plus de fruits, plus de matières grasses: les restrictions drastiques sont bien souvent intenables et inefficaces (voire dangereuses) sur le long terme. Un régime équilibré reste la meilleure option.
  • Ne pas viser la perfection. Alimentation ultra-contrôlée, sport à outrance: mettre la barre trop haut fait courir le risque de tout arrêter au premier faux pas. L’objectif n’est pas de viser la perfection, mais de faire mieux.
  • Entretenir sa masse musculaire. Confronté à une restriction calorique, le corps puise dans ses réserves, de graisse, mais aussi de muscles. Le meilleur moyen de les préserver: allier de nouvelles habitudes alimentaires à de l’activité physique.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 03/02/2019.

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