«Allô, le 144?»
EXPERTS
Nuit et jour
«Le 144, les ambulances, bonjour.» Quatre cents fois par jour, la phrase résonne dans ce long bureau lausannois. La centrale 144 du canton de Vaud y répond aux appels d’urgence médicale. Vingt-quatre heures sur 24, 7 jours sur 7, les régulateurs (ne dites pas «téléphonistes») décrochent, posent des questions et envoient des ambulances au secours des victimes d’accident, de crises cardiaques et autres étouffements. Trois personnes sont sur le pont la journée et deux la nuit, parmi les seize que compte l’équipe.
En moins d’une minute
Un gyrophare et une sonnerie signalent un appel. Claudia répond: un accident de chantier. «A quelle adresse?» Elle l’inscrit sur l’un des cinq écrans de son poste de travail; l’écran adjacent affiche immédiatement une vue satellite du lieu concerné. «La victime saigne, mais est consciente? Continuez à comprimer la blessure, je vous envoie une ambulance.» En même temps qu’elle parle au témoin, elle sélectionne un «moyen de secours» sur l’écran de gauche – la centrale connaît en permanence la position et la disponibilité de la quarantaine d’ambulances du canton. L’équipage du véhicule reçoit immédiatement un SMS indiquant la priorité de la mission, l’adresse où se rendre et les données médicales essentielles. Toute l’opération a pris moins d’une minute.
Le calme avant tout
La centrale respecte un standard pour la rapidité du traitement des appels: si une ambulance est nécessaire, elle doit être partie moins de 90 secondes après que le téléphone a commencé à sonner au 144. Pour autant, aucune précipitation dans les échanges. Le calme et la concentration sont saisissants. L’urgence, les régulateurs la connaissent intimement: avant de travailler à la centrale, ils étaient tous infirmiers ou ambulanciers avec cinq ans de pratique au minimum.
Pour tous les appels, les régulateurs respectent un déroulement précis: quelle est l’identité de l’appelant, est-ce un témoin ou la victime elle-même? Où se trouve la victime ou l’accident? Quelle est la gravité de la situation? Faut-il envoyer un premier moyen de secours? Cela permet de déterminer le degré de priorité de la situation. Est-on en présence d’une urgence vitale supposée ou, même si une ambulance est nécessaire, peut-on se permettre d’attendre?
Rappels
«Souvent, les personnes qui appellent croient que nous viendrons en personne», sourit Samuel, depuis un an et demi au 144. Bien au contraire, dès que les renseignements essentiels sont obtenus, le régulateur envoie une alerte à une ambulance, gardant la personne au téléphone pour obtenir plus de précisions. Des détails qui arrivent au fur et à mesure dans l’ambulance sur une tablette informatique.
Quand un appel au 144 se termine-t-il? «Au téléphone, nous sentons si nous pouvons laisser les gens attendre l’ambulance», explique Vincent Fuchs, le directeur opérationnel. «Dans certaines procédures, nous les soutenons au téléphone jusqu’à l’arrivée des secours, poursuit-il. Par exemple, si nous proposons à un témoin de pratiquer un massage cardiaque sur une victime.» Il est aussi fréquent que les régulateurs rappellent la personne pour s’assurer de l’évolution de la situation.
Adapter sa vitesse
Du côté des secours également, le contact est étroit avec la centrale. Ils signalent ainsi l’avancement de leur mission par le biais de la tablette, détaille Ludovic, ambulancier du Groupe sanitaire Lausanne. Cela va du fait que l’équipage et le véhicule sont partis vers la victime («on roule») jusqu’au signal que la mission est terminée et que le véhicule est prêt à repartir.
Combien de temps met-on à atteindre le lieu de l’alerte? «Dans Lausanne? Moins de dix minutes», confie le professionnel. Qui précise que, une fois arrivés, les ambulanciers adaptent leur tempo à la situation. «Pour une personne âgée qui s’est cassé le col du fémur, la prise en charge sera douce: on prendra le temps et on s’assurera qu’elle n’ait pas mal. Pour une urgence vitale comme une embolie pulmonaire, on minimisera le temps passé sur place avant de se rendre à l’hôpital.»