Du bon usage des écrans
En Suisse, 92 % des adultes possèdent un smartphone et la plupart d’entre eux travaillent sur ordinateur. L’omniprésence des écrans n’épargne pas les jeunes, qui y passent en moyenne plus de trois heures par jour. Au total, plus de cinq millions d’écrans seraient installés en Suisse. Faut-il craindre pour la santé de nos yeux? Explications de Nathalie Voide, médecin hospitalier au Service de strabologie et d’ophtalmologie pédiatrique de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin.
Passer des heures devant un écran est-il fatigant pour les yeux?
Nathalie Voide L’utilisation d’écrans de tout type implique l’accommodation de l’œil, sorte de mise au point qui peut entraîner une fatigue oculaire. De plus, devant un écran, nous avons tendance à cligner des yeux moins souvent. Or, ce battement des paupières permet la régénération du film lacrymal. On constate donc parfois une sécheresse oculaire, à laquelle on peut remédier en faisant des pauses, en fixant au loin, en clignant des yeux de manière volontaire et/ou en utilisant des collyres hydratants.
L’usage des écrans est-il nocif pour la santé des yeux?
Il n’a pas été possible de le prouver formellement. Plutôt que les écrans, il semble que c’est leur usage qui peut contribuer à révéler, chez certains individus, des fragilités ou des pathologies oculaires préexistantes. Leur utilisation immodérée est ainsi susceptible de participer au développement d’une myopie, principalement chez les enfants, favorisée par une accommodation excessive. Finalement, le message qu’il est important de faire passer, c’est que la solution ne se trouve pas dans le tout ou rien: il faut apprendre à faire un usage raisonné des écrans.
Y a-t-il une seule façon d’aménager sa place de travail?
Sur internet, on trouve une quantité de conseils quant à l’éclairage, la distance œil-écran, le réglage de la chaise de bureau… Un grand nombre d’études ont par ailleurs été menées à ce sujet, mais les résultats sont souvent contradictoires et il est difficile d’en tirer des conclusions catégoriques. D’une manière générale, la sensation de confort semble être un critère fiable. C’est à l’utilisateur de s’installer et d’aménager sa place de travail de façon à être à l’aise.
Et les filtres anti-lumière bleue?
Certains écrans émettent une lumière bleue susceptible d’affecter le fonctionnement de l’horloge circadienne, qui règle le rythme nycthéméral (éveil-sommeil). Rester devant un écran avant d’aller se coucher peut entraîner des difficultés d’endormissement, mais cette sensibilité varie d’un individu à l’autre. Par conséquent, si une personne présente des troubles du sommeil, cela vaut la peine d’éviter l’exposition aux écrans en fin de journée. Il existe des filtres pour écran ou des lunettes anti-lumière bleue, mais qui ne sont pas toujours efficaces. Leur acquisition ne paraît pas nécessaire en l’absence de symptômes. Là encore, chacun peut faire confiance à son ressenti et à son expérience personnelle.
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Paru dans Bien vu!, le magazine de la Fondation Asile des aveugles, Mars 2021.
Article repris du site BienVu!