L’hypnose soulage les douleurs
Longtemps cantonnée aux salles de spectacle où elle était nimbée d’un halo de magie, l’hypnose a acquis de nouvelles lettres de noblesse en faisant son entrée à l’hôpital.A vrai dire, elle y était déjà largement admise aux 18e et 19e siècles en tant que pratique analgésique, avant d’être supplantée par la découverte des techniques d’anesthésie.
Elle y revient donc aujourd’hui et elle est de plus en plus couramment utilisée pour soulager la douleur, aiguë ou chronique, en complément des traitements classiques: médicaments, physiothérapie, psychothérapie ou psychiatrie.
A chacun son jardin personnel
Loin d’envoûter un individu, l’hypnose modifie son état de perception et le conduit dans une forme de transe. Il s’agit là d’une disposition que tout un chacun peut éprouver, notamment lorsqu’il est «dans la Lune». Mais en clinique, le thérapeute «oriente cette expérience naturelle», comme le dit Eric Bonvin, médecin-directeur des Institutions psychiatriques du Valais romand de l’Hôpital du Valais à Monthey, afin d’aider le patient à apprivoiser sa douleur. Lorsqu’une personne a mal, son corps et son esprit sont en effet mobilisés par cette expérience sensorielle et émotionnelle désagréable. L’hypnose lui permet de ne plus être sous l’emprise de la douleur soit en «jouant» avec cette elle, soit en détournant son attention de sa souffrance et en la focalisant sur un autre objet.
A chacun de trouver le sien, en fonction de son vécu et de sa culture. Lorsqu’il pratique l’hypnose ericksonienne – du nom de son initiateur, le psychiatre américain Milton Erickson, et qui est la plus couramment employée – le thérapeute ne donne pas de directive. Il agit «comme s’il amenait son patient à la porte de son jardin personnel. Il n’y rentre pas et, avec des mots choisis, il accompagne la personne dans ses choix d'aménagements ou de réaménagement intérieurs», précise Guillaume Finti, physiothérapeute au CHUV à Lausanne et hypnothérapeute.
Aiguës ou chroniques
Cette thérapie a pour effet d’abaisser le seuil de perception de la douleur et de modifier son vécu.
Elle permet notamment de soulager les souffrances aiguës provoquées par des changements de pansement ou autres situations douloureuses et angoissantes vécues à l’hôpital. Guillaume Finti cite l’exemple de cet enfant que l’on devait piquer à la main: «il s’était “mis” des gants de boxe imaginaires et n’avait rien senti.»
La méthode est aussi efficace lors des soins aux grands brûlés, à en croire une étude réalisée au CHUV en 2006-2007 qui portait sur 23 patients ayant été hypnotisés. Il en ressort que l’hypnose permettait de diminuer les doses de morphine et autres opiacés et d’abaisser les scores mesurés des douleurs et de l’anxiété. En outre, elle réduisait le nombre d’interventions sous anesthésie et réduisait les coûts hospitaliers. Sans oublier les bienfaits psychologiques pour les patients qui étaient plus impliqués dans leur traitement.
L’hypnose agit différemment dans le cas de la douleur chronique. En effet, la douleur aiguë fonctionne comme une alarme qui nous incite à éviter une situation dangereuse. Il arrive toutefois qu’elle perdure, même lorsque la menace est passée et que les lésions sont guéries. Le système d’alerte est alors déréglé et la douleur devient figée. «Dans ce cas, l’hypnose capte la dimension dynamique de la douleur afin de la transformer et de la remettre en mouvement», explique Eric Bonvin. Elle permet, ajoute Guillaume Finti dans son langage imagé, «d’extirper la personne prise en otage par sa souffrance».
Certes, l’hypnose n’est pas la panacée pour lutter contre la douleur, mais sa pratique soulage les patients et permet de diminuer la quantité de médicaments qui leur sont prescrits. Elle n’a rien de miraculeux, mais ses résultats peuvent être surprenants.
Pour en savoir plus
«Soigner par l’hypnose», de Gérad Salem et Eric Bonvin, éditions Elsevier Masson.
«De l’hypnose à l’hypnopraxie®. Entre âme et conscience», de Guy Chedeau avec la participation de Monique Masset et Guillaume Finti, éditions Hypsos.
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