Gare aux antibiotiques inutiles

L’antibiorésistance désigne la capacité qu’ont les bactéries à survivre malgré la prise d’antibiotiques. Ces médicaments sont conçus pour les tuer, mais elles ne se laissent en effet pas toujours anéantir. « Les bactéries sont en mesure de développer des mutations génétiques ou d’acquérir de nouveaux gènes leur permettant de survivre aux antibiotiques. Plus elles sont exposées à ces médicaments, plus elles deviennent résistantes », explique la Dre Diem Lan Vu Cantero, infectiologue au Service du médecin cantonal de Genève. 

Ce phénomène devient alors problématique car face à une infection bactérienne grave, les antibiotiques usuels ne sont donc plus efficaces. Pour éviter l’antibiorésistance, le mot d’ordre est la parcimonie. Moins la population va prendre d’antibiotiques, moins les bactéries auront l’occasion de s’adapter et plus il sera facile de les éliminer lorsque le médicament s’avérera indispensable. L’infectiologue précise : « En tant que médecin, on doit d’abord juger de la pertinence de prescrire un antibiotique. Si ce traitement est nécessaire, il faut ensuite choisir le bon et également opter pour une durée de traitement la plus courte possible. Ces précautions permettent de limiter la résistance des bactéries aux traitements. » 

Contre la fièvre et les douleurs ?

En théorie, cela semble simple, mais face à une personne fiévreuse et pressée de guérir, la prudence médicale n’est pas toujours comprise. « Certains patients pensent que l’antibiotique va faire baisser la fièvre et enlever les douleurs. Indirectement, cela est possible, si les bactéries responsables de la maladie sont tuées. Mais en réalité, ce qui est le plus efficace contre de tels symptômes, ce sont le paracétamol ou un anti-inflammatoire », précise la Dre Vu Cantero. 

À noter que lorsque la maladie est due à un virus ou un champignon, les antibiotiques n’ont aucun effet. « En cas de légers symptômes, le corps médical préconise de prendre un médicament pour soulager fièvre et douleurs et d’attendre quelques jours. Si la situation ne s'améliore pas ou s’aggrave, une consultation médicale devient nécessaire et le médecin pourra évaluer, avec ou sans test supplémentaire, si la prescription d'antibiotiques est utile. Si c'est le cas, il prescrira alors le médicament adapté. » 

Le système immunitaire en action

Il est donc contre-productif de mettre la pression au généraliste s’il juge qu'il faut attendre un peu avant de sortir l’artillerie lourde. Aujourd’hui, certaines infections bactériennes banales ne sont même plus traitées, car elles finissent par disparaître d’elles-mêmes. Ceci est par exemple le cas des infections urinaires simples, pour lesquelles il peut parfois suffire de boire de l’eau en grande quantité et de prendre des anti-inflammatoires pour soulager les douleurs. Il ne faut pas oublier que le système immunitaire des personnes en bonne santé est une arme redoutable contre un grand nombre d’infections. 

« Limiter la prise d’antibiotiques aux cas qui les requièrent vraiment est important, car ainsi les maladies bactériennes graves peuvent être combattues plus efficacement. L’antibiorésistance est un vrai problème de santé publique. En 2019, elle a été directement responsable de plus d’un million de décès à travers le monde. Même si certains nouveaux antibiotiques permettent parfois de vaincre les bactéries résistantes, ils ne sont pas la solution. Tôt ou tard, elles vont parvenir à lui résister et le problème restera le même. »

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Plus d'informations: www.ge.ch/antibioresistance