Incontinence urinaire féminine: consultez votre généraliste
Caractérisée par une perte involontaire d’urine plus ou moins sévère, l’incontinence urinaire se traduit par de multiples symptômes, parfois associés, ce qui complique son diagnostic. Outre son coût socio-économique élevé, elle engendre un malaise difficile à dévoiler pour les femmes qui y sont sujettes et requiert un bilan complet pour permettre une prise en charge adaptée.
Rôle du médecin généraliste
Sauf cas complexe rare nécessitant un avis spécialisé, le médecin généraliste peut, après avoir systématiquement écarté toute suspicion d’infection par mise en culture de l’urine, qualifier lui-même l’incontinence urinaire de manière personnalisée. La description par la patiente de son utilisation de protections hygiéniques, sa sensation d’impériosité ou de pesanteur vaginale, et surtout le recensement détaillé du nombre et des conditions de survenue de ses mictions sur 72 heures (nommé «catalogue mictionnel») orientent utilement le diagnostic. L’examen clinique complémentaire réalisé à vessie pleine renseigne sur le tonus de la région pelvienne (et anale si nécessaire). Il met en évidence toute fistule urogénitale (communication anormale entre les voies urinaires et génitales) et toute fuite d’urine non-contrôlée – continue ou intermittente, en jets ou en gouttelettes – ainsi qu’un éventuel prolapsus, communément appelé «descente d’organes». L’imagerie médicale vient compléter l’investigation en cas de besoin.
Types d’incontinence urinaire
La pathologie revêt des formes variées qu’il convient de distinguer. L’IU dite «d’effort» survient en raison d’une pression abdominale induite par un effort physique comme un éternuement, la toux, le rire ou le port d’un objet lourd. Trop faible pour garantir une fermeture suffisante, le sphincter de la vessie laisse s’échapper l’urine. Le phénomène est principalement observé chez les personnes entre 45 et 49 ans, mais il explique souvent l’incontinence des femmes jeunes et aggrave les formes existantes des plus âgées. Moins courante et parfois associée à la première (on parle alors d’IU «mixte»), l’incontinence «d’urgence» implique le dérèglement des muscles vésicaux responsables de la miction, devenus hyperactifs, entraînant trop fréquemment l’impression irrésistible de devoir uriner sur l’instant. Les pertes continues provenant d’une lésion ou d’une malformation des voies urinaires, typiques de l’IU «totale», demeurent exceptionnelles.
Causes
Certaines causes comme la constipation chronique et la prise de psychotropes et de contraceptifs oraux peuvent être supprimées. D’autres, plus lourdes, sont liées à la fonction génito-urinaire. L’insuffisance sphinctérienne (favorisée par le nombre de grossesses, les conditions d’accouchement, l’hystérectomie, etc.) et les cancers vésicaux en sont quelques-unes. D’autres causes, enfin, relèvent d’un dysfonctionnement du système nerveux, atteint par des maladies neurologiques comme l’accident vasculaire cérébral, la sclérose en plaques ou la maladie de Parkinson.
Traitement conservateur
Le traitement conservateur est privilégié autant que possible. Les manifestations de l’IU d’urgence peuvent être corrigées en première intention par l’adoption d’habitudes de vie strictes: planification des mictions à fréquence fixe, suppression des aliments épicés, du café, du tabac et de l’alcool, limitation des apports hydriques, traitement de la constipation et réduction de la surcharge pondérale. Quelle que soit la forme d’incontinence, la physiothérapie avec biofeedback(dispositif électrothérapeutique intra-vaginal ou intra-rectal destiné à améliorer le contrôle volontaire et sélectif des muscles) se révèle plus efficace que l’approche pharmacologique, indiquée quasi-exclusivement pour son action sur l’impériosité urinaire.
Chirurgie
L’option chirurgicale n’est proposée qu’en cas d’insuccès des autres thérapeutiques. Pour l’IU d’urgence, l’injection de toxine botulinique dans les muscles vésicaux pour les neutraliser s’avère efficiente pendant plusieurs mois, même si elle entrave parfois la vidange intégrale de la vessie. Pour les cas les plus sévères, l’augmentation du volume vésical, de même que la création d’un circuit de dérivation urinaire – parfois consécutif à l’ablation de la vessie – peuvent être envisagées. Concernant l’IU d’effort modérée, deux traitements de référence mini-invasifs coexistent: la pose d’une bandelette sous l’urètre pour en rehausser légèrement le niveau, et la restauration du plancher pelvien, avec résorption du prolapsus le cas échéant.
Trois autres techniques concluantes tendent à réduire au minimum la durée d’hospitalisation: l’implantation – réversible – d’un neurostimulateur dans le corps pour contrôler par impulsions électriques les nerfs qui commandent la vessie (neuromodulation); la pose de ballonnets; et l’injection d’agents de comblement à la base de la vessie pour faciliter l’obturation du col vésical sans toutefois empêcher la miction.
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Références
Adapté de: «Prise en charge initiale de l’incontinence urinaire chez la femme par l’interniste généraliste», Dr Julien Renard et Pr Christophe E. Iselin, Service d’urologie, Département de chirurgie, HUG. In Revue Médicale Suisse 2014:10:2322-7, en collaboration avec les auteurs.