Les avancées de la thérapie fœtale

Dernière mise à jour 19/12/13 | Article
Les avancées de la thérapie fœtale
Les progrès réalisés ces dernières années dans les techniques d’imagerie et en chirurgie ont bénéficié à toutes les spécialités médicales, et permis l’essor de la médecine fœtale.

Plusieurs méthodes sont aujourd’hui utilisées afin d’augmenter les chances de survie du fœtus ou de diminuer le risque ou la sévérité de séquelles post-natales. En permettant de traiter le bébé in utero, la médecine fœtale évite d’ajouter au risque de la maladie celui d’une naissance provoquée prématurément.

L’échographie permet aujourd’hui d’obtenir des images du fœtus en temps réel et en haute définition. Alors qu’il fallait avant attendre la naissance de l’enfant pour réaliser le premier examen, celui-ci a maintenant lieu avant même le troisième mois de grossesse. Les maladies ou malformations qui touchent le bébé peuvent donc être diagnostiquées à un stade très précoce.

Si la plupart du temps les anomalies fœtales peuvent être traitées après la naissance, il peut être nécessaire dans certains cas de le faire quand l’enfant est encore dans le ventre de sa mère. C’est le cas notamment des maladies dont l’évolution rapide pourrait entraîner la mort de l’enfant avant sa naissance ou avant sa viabilité.

Certaines interventions nécessitent encore d’ouvrir l’utérus de la mère pour atteindre le fœtus. Mais le développement de la fœtoscopie (la visualisation du bébé grâce à un fibroscope introduit par une petite incision dans l’utérus) et du guidage par échographie des interventions réalisées avec des aiguilles, a permis de diminuer considérablement les risques liés aux interventions sur le fœtus. Ces techniques de pointe restent cependant réservées à quelques maladies particulièrement sévères, et ne sont pour le moment disponibles que dans quelques centres de référence, tels que le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV).

Transfusion et problèmes vasculaires

Lorsque le fœtus souffre d’un déficit sévère en globules rouges ou en plaquettes sanguines, la transfusion in utero est incontournable. Cette intervention reste le traitement de référence depuis les années 1960. Faute d’imagerie médicale performante à cette époque, le sang était alors injecté dans le ventre du fœtus. Aujourd’hui la technique a été grandement améliorée et la transfusion est faite directement dans le cordon ombilical. Bien que pratiqué régulièrement, ce geste n’en reste pas moins très technique.

La thérapie fœtale a également permis de progresser dans la prise en charge du syndrome «transfuseur-transfusé». Il s’agit d’une anomalie qui complique 10 à 15% des grossesses gémellaires dites «monochoriales», où les deux bébés partagent un seul placenta (vrais jumeaux). Dans ce type de grossesse, les vaisseaux des deux fœtus communiquent sur le placenta, ce qui peut mener à un déséquilibre des flux sanguins: un des jumeaux reçoit trop de sang et l’autre pas assez. Sans traitement, le pronostic est catastrophique, avec une issue fatale des jumeaux dans 90% des cas. Une technique associant fœtoscopie et traitement au laser permet aujourd’hui de séparer les circulations des jumeaux. Ce traitement a permis une nette augmentation du taux de survie, avec une survie des deux enfants dans 60 à 70% des cas.

Anomalie cardiaque

La malformation du ventricule gauche du cœur est une anomalie fœtale sévère, dont le pronostic reste très sombre. Les nombreuses interventions chirurgicales que doivent subir les nourrissons atteints après la naissance induisent un fort taux de mortalité, et la moitié des enfants survivants présentent des troubles neuro-développementaux majeurs. Agir in utero ne permet pas de corriger l’anomalie du ventricule directement mais augmente la réussite de la chirurgie réparatrice post-natale. A noter que cette technique est encore en phase de recherche et développement, et n’est pas encore un traitement de routine.

De nombreuses autres applications

A l’aide d’un ballonnet gonflable les chirurgiens peuvent aujourd’hui remédier aux conséquences d’une mauvaise fermeture du diaphragme. Chez certains bébés atteints de cette malformation, la cavité thoracique est envahie par les intestins et le foie, et les poumons n’ont alors plus la place de se développer correctement. Si l’anomalie du diaphragme est habituellement traitée par une intervention post-natale, les séquelles pulmonaires empêchent la survie du nouveau-né. Agir in utero permet un meilleur développement des poumons, évite des atteintes irrémédiables et augmente la survie du bébé.

Il en va de même pour les obstructions de l’appareil urinaire du fœtus. La rétention de l’urine dans la vessie du bébé peut avoir de graves conséquences pour ses reins, et engager le pronostic vital de l’enfant. Pour certains cas précis, la pose d’un drain entre la vessie et la poche amniotique restaure un écoulement normal des urines et améliore la survie de l’enfant.

La chirurgie fœtale micro-invasive n’en est qu’à ses débuts. Certaines interventions porteuses d’espoir déçoivent, tandis que d’autres apportent une amélioration significative. Bien que les malformations concernées soient rares, l’impact psychologique et économique est considérable pour les parents et la société. Opérer un enfantin utero, c’est pousser la porte d’un monde jusqu’alors inconnu, ce qui n’est pas sans soulever un questionnement éthique. Mais la chirurgie fœtale, c’est également prodiguer les soins nécessaires à la survie d’un nouveau type de patient, le fœtus.

 

Référence

Adapté de «Thérapie fœtale: la chirurgie avant la naissance?» par K. Lepigeon et Dr D. Baud, Unité de recherche en médecine materno-fœtale et obstétrique, CHUV. In Revue médicale suisse 2013; 9: 1959-64.

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