Coup d’accélérateur pour la médecine personnalisée
La santé est à l’aube d’une révolution. La connaissance de l’ADN joue un rôle croissant en médecine. Dans un très proche avenir, le traitement de pathologies comme les cancers, le diabète, voire l’obésité, passera par la lecture du code génétique du patient, de sa tumeur ou de sa flore intestinale. Certains scientifiques affirment que le décodage du génome –soit l’ensemble du matériel génétique d’un individu– pourrait même devenir dans une dizaine d’années un examen de routine, à l’instar des prises de sang.
«Big data»
Cette masse d’informations va venir grossir le flot mouvant et dynamique des données numériques produites en quantités massives par la société: le fameux «big data». Ce dernier forme peu à peu un reflet virtuel du monde réel. Constituant un véritable pendant numérisé de millions d’individus, il comprend leurs paramètres biologiques, données de santé, déplacements, comportements sociaux, habitudes alimentaires, données environnementales, etc.
L’ADN numérisé de populations entières sera ainsi intégré à un univers digital structuré, calculable et configurable à volonté. Cette perspective ouvre un champ d’expérimentation totalement nouveau, d’une richesse inouïe et à la portée des clics des scientifiques du monde entier. C’est de là que pourra émerger, dans les années à venir, une pratique médicale personnalisée et prédictive, selon les spécialistes.
Arc lémanique à l’avant-garde
En créant, au Campus Biotech à Genève, le plus important centre de génomique de Suisse, l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), l’Université de Genève (UNIGE) et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) se situent résolument à l’avant-garde de cette révolution. En effet, si le centre doit répondre à la demande croissante de séquençages d’ADN, son objectif est également de favoriser l’avènement de la médecine de précision, pierre angulaire de la santé personnalisée. «Le centre a aussi pour mission d’élaborer des méthodes d’analyse de données, de mener des projets de recherche translationnelle et de former des chercheurs et des cliniciens dans ces nouvelles disciplines. Un clinical board, composé de délégués de chaque hôpital universitaire suisse, assure la validité tant des méthodes que des équipements», souligne le Pr Manolis Dermitzakis, directeur du centre de génomique et professeur de génétique à la Faculté de médecine de l’UNIGE.
ADN et ARN
Dès cet été, les séquenceurs du centre de génomique vont décrypter quelque 60 à 80 génomes entiers en moins d’une semaine. «Les services médicaux ne vont pas pour autant renoncer au séquençage de gènes spécifiques. Il est question ici de très gros volumes et de génomes entiers. A noter que le centre analysera également l’ADN des tissus cancéreux et du microbiote, soit les micro-organismes dont les individus sont porteurs», précise le Pr Denis Hochstrasser, chef du département de médecine génétique et de laboratoire aux HUG et vice-recteur à l’UNIGE.
Ethique pas oubliée
Les aspects éthiques n’ont pas été oubliés, précise le Pr Jacques Fellay, professeur à l’EPFL et au CHUV et codirecteur du centre de génomique: «Nous voulons aussi nous assurer que chaque étape vers une médecine plus précise, intégrant le décryptage du génome individuel, bénéficie aux patients, respecte le cadre légal en vigueur et s’inscrit dans un dialogue permanent avec la société.»
Futur leader européen
A terme, le centre de génomique de Genève va employer au moins une quarantaine de collaborateurs, dont une quinzaine de bioinformaticiens. De plus, il coordonnera les travaux de centaines de cliniciens et chercheurs de Suisse pour faire progresser la recherche et la pratique clinique en matière de génomique. Hub national en génomique, il a pour ambition de devenir un leader en Europe dans ce domaine. Son lancement a bénéficié de l’important soutien financier d’une fondation genevoise.
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Article repris du site pulsations.swiss