Se faire hospitaliser dans un autre canton: attention aux pièges!

Dernière mise à jour 23/04/20 | Article
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En Suisse, les patients couverts par l’assurance-maladie de base bénéficient du «libre choix» de l’hôpital en ce qui concerne le traitement hospitalier, de sorte qu’il est possible de se faire hospitaliser dans un autre canton. Ce «libre choix» est toutefois régi par des règles dont il convient de tenir compte afin d’éviter des mauvaises surprises en ce qui concerne le remboursement.

La révision de la loi sur l’assurance-maladie obligatoire (LAMal), entrée en vigueur le 1er janvier 2012, a introduit le «libre choix» de l’hôpital, soit la faculté pour le patient au bénéfice de la seule assurance-maladie de base de choisir – pour des raisons de convenance personnelle[1] – l’hôpital où il sera hospitalisé.

Ce libre choix n’est pas pour autant absolu. Le patient au bénéfice de l’assurance-maladie de base peut en effet seulement choisir entre une hospitalisation dans un hôpital figurant sur la liste hospitalière de son canton de résidence et un hôpital figurant sur la liste hospitalière du canton où l’hôpital se situe[2]. En d’autres termes, il lui est possible de choisir – par convenance personnelle – d’être hospitalisé en division commune dans n’importe quel hôpital en Suisse à condition que l’hôpital en question figure sur une des listes hospitalières cantonales susmentionnées pour la prestation médicale en cause.

L’exercice du «libre choix» de l’hôpital – s’il s’agit incontestablement d’une faculté très appréciable pour le patient qui peut accéder à un nombre important d’hôpitaux à travers toute la Suisse[3] – ne veut pas pour autant dire que les coûts d’une hospitalisation hors du canton de résidence seront nécessairement entièrement couverts.

Plusieurs cas de figure

Il faut distinguer plusieurs cas de figure. Lorsque le patient choisit l’un des hôpitaux figurant sur la liste hospitalière de son canton de résidence, il n’y a pas de problème particulier. Les frais d’hospitalisation, sous déduction de la franchise et de la quote-part au sens de l’art. 64 LAMal, seront pris en charge par le canton de résidence et l’assurance-maladie de base[4] sans demande de garantie de paiement, indépendamment du fait que cet hôpital soit situé dans le canton de résidence ou dans un autre canton. Par exemple, en ce qui concerne les domaines des transplantations et des «grands brûlés», un patient résidant en Valais peut librement choisir d’être hospitalisé dans l’un des cinq hôpitaux universitaires suisses, car ces derniers figurent sur la liste hospitalière valaisanne pour ces prestations médicales. Il n’aura pas à payer d’autres frais pour son hospitalisation que la franchise et la quote-part. La situation est différente si le patient choisit un hôpital qui ne figure pas sur la liste hospitalière de son canton de résidence, mais seulement sur celle du canton du lieu de situation de l’hôpital. Par exemple, tel serait le cas d’un patient résidant à Neuchâtel mais préférant réaliser une coronarographie à l’hôpital de Bienne, qui est répertorié pour cette indication dans le canton de Berne alors qu’il ne figure pas pour cette indication sur la liste hospitalière du canton de Neuchâtel. Dans ce cas, le traitement hospitalier n’est pris en charge par le canton de résidence et l’assurance-maladie de base, sous réserve de la franchise et de la quote-part, qu’à concurrence du tarif applicable dans un hôpital répertorié du canton de résidence[5]. En d’autres termes, si le tarif applicable dans l’hôpital répertorié librement choisi est plus élevé que celui du canton de résidence, il en résultera un solde à la charge du patient (ou, le cas échéant, à la charge de son assurance complémentaire si la police d’assurance couvre cette éventualité de «libre choix»).

Pour clarifier la situation, il est plus sage de déposer une demande de garantie de paiement auprès du canton de résidence, lequel statuera sur la question de la prise en charge de l’éventuel solde. Si cette garantie est accordée, le patient n’aura pas à prendre en charge le solde résultant du libre choix. Si tel n’est pas le cas, le solde sera à la charge du patient ou de son assurance complémentaire.

Enfin, si le patient choisit de se faire hospitaliser dans un hôpital ne figurant pas sur une liste hospitalière pour l’acte envisagé – qu’il soit d’ailleurs situé dans le canton de résidence ou dans un autre canton –, ni le canton de résidence ni l’assurance-maladie obligatoire[6] n’interviendront.

Nécessité médicale

On entend par « nécessité médicale », au sens de l’art. 41 al. 3 LAMal, les situations où le traitement hospitalier dans un hôpital qui ne figure pas sur la liste hospitalière du canton de résidence intervient soit pour des raisons d’urgence, soit en raison du fait que les hôpitaux répertoriés du canton de résidence ne sont pas en mesure de fournir les soins envisagés. Les situations où les délais d’attente dans l’hôpital du lieu de résidence sont déraisonnablement longs sont assimilées à la deuxième hypothèse.

En cas d’urgence, c’est-à-dire lorsqu’une urgence médicale survient et que le transport vers un hôpital du canton de résidence n’est pas envisageable, le canton de résidence et l’assurance-maladie obligatoire prennent en charge leur part respective de la rémunération, sous réserve de la franchise et de la quote-part. Une demande de garantie de paiement doit toutefois être sollicitée du canton de résidence dans les trois jours suivant l’hospitalisation. Le canton de résidence vérifiera notamment si les critères de l’urgence sont remplis.

Dans les situations où les hôpitaux figurant sur la liste hospitalière du canton de résidence ne sont pas en mesure de fournir les soins envisagés[7], le canton du domicile et l’assurance-maladie obligatoire prennent en charge leur part respective de la rémunération, sous réserve de la franchise et de la quote-part, à condition qu’une autorisation[8] du canton de résidence ait été préalablement délivrée. Le médecin traitant ou le médecin hospitalier sont habilités à faire cette demande.

Si la garantie de paiement est refusée, parce que le canton de résidence considère qu’il n’y a pas de nécessité médicale au sens de l’art. 41 al. 3 LAMal, les coûts du traitement devront être pris en charge par le patient ou son éventuelle assurance complémentaire.

Il convient donc d’être particulièrement prudent dans cette situation et de solliciter la garantie de paiement, puisque les enjeux financiers peuvent être importants.

En définitive, le patient au bénéfice de l’assurance-maladie obligatoire sera toujours bien avisé de se renseigner – préalablement à une hospitalisation hors de son canton de résidence[9] – au sujet du remboursement de sa prise en charge. Le cas échéant, et si l’hôpital ne figure pas sur la liste hospitalière du canton de résidence, il sollicitera une garantie de paiement auprès du canton de résidence. A réception de la décision relative à la garantie de paiement, le patient pourra décider en connaissance de cause et éviter ainsi des coûts imprévus.

__________

[1] Par exemple, choix d’un hôpital équipé pour une opération moins invasive que l’opération classique (i.e. sans que cela ne constitue une nécessité médicale) ou choix d’un hôpital situé plus près de la famille.

[2] Cf. art. 41 al. 1bis LAMal.

[3] Avant la modification de la LAMal entrée en vigueur au 1er janvier 2012, le patient devait choisir l’un des hôpitaux figurant sur la liste hospitalière de son canton de résidence.

[4] Le canton et l’assurance-maladie de base prennent en charge les coûts du traitement hospitalier selon leurs parts respectives, la part cantonale étant de 55 % au moins (cf. art. 49a LAMal).

[5] Cf. art. 41 al. 1bis LAMal in fine.

[6] Sous réserve des situations où l’hôpital non répertorié a conclu une convention avec l’assurance-maladie du patient, auquel cas le tarif de l’hôpital est pris en charge par l’assurance-maladie obligatoire jusqu’à concurrence de la part qui lui revient (en principe 45 %).

[7] On pense par exemple à une opération qui nécessite un plateau technique particulier.

[8] Garantie de paiement.

[9] Le cas d’urgence est réservé.

______

Paru dans Planète Santé magazine N° 37 – Mars 2020

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