Piste prometteuse pour la prévention et le traitement des maladies cardiovasculaires
Hypertension artérielle, excès de «mauvais» cholestérol dans le sang, tabagisme, diabète et quelques autres. Ces facteurs de risque classiques des maladies cardiovasculaires sont bien connus. Ils sont couramment utilisés pour calculer la probabilité qu’a un individu donné de faire un événement cardiovasculaire (infarctus du myocarde ou attaque cérébrale) dans les dix ans à venir. Si son risque dépasse une certaine valeur, on peut alors lui proposer un traitement préventif.
Ces différents scores de risque sont actuellement employés en routine et ils ont prouvé leur utilité. Ils manquent toutefois de sensibilité. «Environ 60% des personnes qui font un accident cardiovasculaire n’avaient pas été identifiées par ces scores comme étant à haut risque», constate Nicolas Vuilleumier, médecin chef du Service de médecine de laboratoire aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). D’autres, au contraire, sont considérées comme étant à risque alors qu’elles ne le sont pas et sont donc traitées inutilement.
En outre, «20% des patients qui font un infarctus ou une attaque cérébrale n’avaient aucun des facteurs de risque pris en compte dans ces scores». C’est pourquoi le médecin-chercheur et ses collègues ont entrepris d’identifier de nouveaux facteurs de risque cardiovasculaire afin «d’optimiser la valeur prédictive» des tests.
Auto-anticorps
Leur choix s’est porté sur certains auto-anticorps. On nomme ainsi des composants du système immunitaire qui, au lieu de lutter contre les agents pathogènes (comme le font habituellement les anticorps), se retournent contre les cellules de l’organisme et provoquent des maladies auto-immunes. Or, les patients souffrant de ce type de pathologie ont aussi un risque accru de développer des maladies cardiovasculaires.
En étudiant de près des cohortes de patients qu’il suivait depuis des années, Nicolas Vuilleumier a constaté que «ceux qui étaient admis en urgence à l’hôpital pour un infarctus du myocarde et qui avaient un taux élevé de ces auto-anticorps avaient un devenir cardiovasculaire nettement moins bon à une année que les autres». Et cela, indépendamment des autres facteurs de risque cardiovasculaire.
C’était donc le signe que ces auto-anticorps pouvaient jouer un rôle dans le développement de l’athérosclérose –ces plaques qui bouchent les artères et qui, lorsqu’elles se brisent, provoquent un événement cardiovasculaire. Encore fallait-il prouver qu’il y avait bien un lien de cause à effet.
Les chercheurs y sont parvenus, d’abord sur des cellules in vitro, puis sur des souris. Ils ont montré que l’injection d’auto-anticorps à des rongeurs «augmente l’athérosclérose, rend les plaques plus fragiles, trouble le rythme cardiaque et induit 25% de mortalité», résume le spécialiste de médecine de laboratoire.
Marqueurs et médiateurs
Ces auto-anticorps ne sont donc pas seulement des biomarqueurs, ils sont aussi des médiateurs des maladies cardiovasculaires. En d’autres termes, ils font office d’indicateur du risque et ils interviennent aussi dans le développement des pathologies. A ce titre, «ils pourraient donc devenir une nouvelle cible thérapeutique », précise Nicolas Vuilleumier. Si l’on parvenait à trouver une molécule bloquant leur action, on pourrait contrecarrer leurs effets délétères.
Dans ce domaine, les chercheurs genevois suivent déjà une piste prometteuse. Il faut en effet savoir que les auto-anticorps en question agissent sur une protéine particulière, l’apolipoprotéine A-1 (ou Apo-A-1), qui sert de véhicule de transport au «bon» cholestérol dans le sang. Les auto-anticorps «reconnaissent» et prennent spécifiquement pour cible une partie (un peptide) de l’Apo-A-1, que l’équipe des HUG a d’ailleurs déjà réussi à synthétiser.
Ce peptide pourrait donc d’abord être utilisé comme une sorte d’hameçon pour détecter la présence de ces auto-anticorps dans le sang et repérer ainsi les personnes qui en ont un taux élevé. «Il ne s’agit que de 20 ou 30% des patients à risque cardiovasculaire», précise le médecin. Une fois identifié, ce sous-groupe pourrait ensuite bénéficier «en plus d’un traitement standard, d’un traitement immunomodulateur». Le peptide servirait alors de leurre et il neutraliserait les auto-anticorps en les détournant de leur cible naturelle.
Projet primé
Il s’agit d’une tâche de longue haleine. Pour la mener à bien, les médecins des HUG et leurs collègues du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) ont reçu le soutien de la Fondation Leenaards qui leur a attribué, en mars dernier, l’un de ses prix sur la recherche translationnelle (c’est-à-dire, établissant des ponts entre la recherche fondamentale et la recherche clinique). Pour poursuivre leur travail, les chercheurs lémaniques vont s’appuyer sur l’étude CoLaus. Ce sera un atout puisque cette cohorte compte plus de 6700 habitants de la région lausannoise, suivis depuis une dizaine d’années, notamment dans le domaine du risque cardiovasculaire.
Si tout se passe bien, Nicolas Vuilleumier envisage de lancer les premiers essais cliniques dans cinq ans pour le test de dépistage et dans dix pour le traitement immunomodulateur. En cas de réussite, ce projet permettra d’améliorer le dépistage et le traitement des maladies cardiovasculaires, première cause de mortalité dans les pays industrialisés. Il aura aussi contribué au développement de la médecine individualisée dans ce domaine.
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