Cancer de la prostate, faut-il se méfier du dépistage?

Dernière mise à jour 22/09/15 | Article
Cancer de la prostate, faut-il se méfier du dépistage?
Le dosage du PSA a longtemps été un passage obligé pour les hommes ayant passé le cap de la cinquantaine. Les Etats-Unis condamnent aujourd’hui cette méthode de dépistage du cancer de la prostate. De quoi renoncer à cet examen?

Le dosage du PSA, cette protéine fabriquée par la prostate, est largement utilisé dans le dépistage du cancer de cet organe. Mais les Etats-Unis, après en avoir été les chantres, tournent casaque. Selon les nouvelles recommandations de prévention, parues dans les Annals of Internal Medecine, il ne faudrait plus procéder à cet examen. Les dommages collatéraux –faux positifs, traitements inutiles– seraient trop importants. De ce côté de l’Atlantique, les spécialistes sont plus nuancés. Les patients, doivent-ils renoncer à cet examen, au prix de quelles incertitudes? Explications de Christophe Iselin, médecin-chef du service d’urologie des Hôpitaux universitaires de Genève.

Que pensez-vous des nouvelles directives américaines concernant le dépistage du cancer de la prostate?

Christophe Iselin: Comme souvent avec les Etats-Unis, nous sommes dans les extrêmes! Nous passons d’un système de prévention où tous les hommes devaient faire doser leur PSA, à un arrêt complet de cet examen. Je m’étonne que l’analyse de l’organe de prévention s’appuie principalement sur deux études défavorables au dépistage.

La première, américaine, comporte de gros problèmes de méthodologie. La seconde, européenne, mieux faite, ne montre effectivement pas d’avantage marqué pour le dépistage. Par contre, l’organe de prévention passe trop rapidement sur une troisième étude tout à fait correcte du point de vue méthodologique. Elle montre pourtant que l’on peut sauver une vie pour trois cents hommes dépistés, dont douze sont opérés.

Ces chiffres parlent clairement en faveur du dépistage. Ils sont d’ailleurs analogues à ceux que l’on retrouve dans le dépistage du cancer du sein. Cela dit, je pense effectivement que l’on est allé trop loin dans le dosage du PSA. Un dépistage systématique ne se justifie pas.

Malgré tout, le dosage du PSA ne s’est pas avéré très fiable?

Le PSA agit un peu comme un voyant qui s’allume lorsque quelque chose ne va pas dans la prostate. Ce signal d’alarme n’est pas spécifique, il s’allume en cas de cancer mais aussi d’inflammation, ou tout simplement si la prostate s’est agrandie, comme c’est souvent le cas chez les personnes âgées. Il faut donc se servir de cet indicateur avec nuance.

Une étude a montré que le dépistage précoce ne changeait rien à la mortalité liée à ce cancer. Cela reste-t-il vrai?

C’est justement l’étude américaine qui pose des problèmes méthodologiques, on ne peut donc pas en tenir compte. Mais il est vrai que sur 30% des hommes qui risquent de développer un cancer de la prostate dans leur vie, seul un sur dix va décéder de cette maladie. Ce cancer évolue assez souvent lentement. Dans certains cas, il suffit de suivre les patients sans les traiter. L’important est d’arriver à détecter le groupe des cancers qui auront un impact sur la qualité de vie et la survie.

Nous pouvons faire un calcul de risque pour savoir s’il faut poursuivre les investigations sur la base d’un PSA élevé, en tenant compte de l’âge, du volume de la prostate, du résultat de l’examen clinique et de l’échographie, ainsi que de l’histoire familiale.

Nous pouvons ensuite décider de poursuivre avec une biopsie qui nous dira à quel type de cancer nous avons affaire. Toutefois cet examen peut déclencher des infections sévères chez un patient sur trente, voire des septicémies.

Le mot d’ordre, finalement, ne consisterait-il pas à individualiser le dosage du PSA?

Effectivement. Ainsi que la façon d’envisager les suites de la découverte d’un cancer. Certaines personnes voudront absolument un traitement, en dépit des effets secondaires possibles comme l’impuissance et l’incontinence. D’autres ne voudront pas en entendre parler car ils craignent de perdre leur activité sexuelle, malgré l’amélioration des techniques. C’est vraiment au médecin d’appréhender ce qui est important pour le patient.

_________

  

    

Extrait de :

Check-Up. Les réponses à vos questions santé
de Marie-Christine Petit-Pierre
Ed. Planète Santé / Le Temps, 2014

            

Articles sur le meme sujet
PULS_organe_prostate

Zoom sur la prostate

Discrète, cette glande de l’appareil reproducteur masculin peut être concernée essentiellement par deux problèmes: l’augmentation de son volume liée à l’âge ou le développement d’un cancer.
P17-02_cancer_côlon

Cancer du côlon: dépister pour diminuer la mortalité

Le cancer du côlon est une maladie difficile à diagnostiquer car elle progresse longtemps de manière silencieuse. La dépister après 50 ans, soit par coloscopie, soit en testant la présence de sang dans les selles, diminue par deux le risque de mourir de ce type de cancer.
PS37_dépistage_frottis_anormal

Dépistage: ce que signifie un frottis anormal

Le frottis est devenu banal pour une grande majorité des femmes. Mais cet examen étant un outil de dépistage du cancer du col de l’utérus, recevoir des résultats anormaux peut susciter des inquiétudes souvent injustifiées.
Videos sur le meme sujet

"Augmentation des cancers chez les jeunes "

Plusieurs études révèlent une hausse des cancers chez les adultes de moins de 50 ans.

Des scientifiques identifient des cellules immunitaires à lʹorigine de cancers

Dans une étude parue dans "Nature Immunology" (26.07.24), des chercheurs et chercheuses de lʹInserm, du CNRS, de lʹUniversité Claude-Bernard Lyon 1 et du Centre Léon Bérard au Centre de recherche en cancérologie de Lyon, ont identifié des cellules immunitaires – des sous-types de lymphocytes – qui seraient à lʹorigine de certains cancers.

Des chiens qui flairent le cancer

Sarah Dirren présente le projet K-dog dont l'objectif est d'utiliser l'odorat des chiens pour détecter les cellules cancéreuses, celles du cancer du sein.
Maladies sur le meme sujet
Organes génitaux masculins

Cancer du testicule

Chaque année en Suisse, on dénombre environ 430 nouveaux cas de cancer du testicule, ce qui représente 2 % de toutes les maladies cancéreuses dans la population masculine. Le cancer du testicule touche surtout des hommes jeunes : 86 % des patients ont moins de 50 ans au moment du diagnostic.

Prostate

Cancer de la prostate

Chaque année en Suisse, environ 6100 hommes développent un cancer de la prostate, qui est le cancer le plus fréquent en général: 30% des cancers chez l’homme sont des cancers de la prostate. Pratiquement tous les patients (99%) ont plus de 50 ans au moment du diagnostic; 47% ont même 70 ans et plus.

Symptômes sur le meme sujet

Ganglion

J'ai une grosseur/un ganglion qui m'inquiète