Cancer de la prostate, faut-il se méfier du dépistage?
Le dosage du PSA, cette protéine fabriquée par la prostate, est largement utilisé dans le dépistage du cancer de cet organe. Mais les Etats-Unis, après en avoir été les chantres, tournent casaque. Selon les nouvelles recommandations de prévention, parues dans les Annals of Internal Medecine, il ne faudrait plus procéder à cet examen. Les dommages collatéraux –faux positifs, traitements inutiles– seraient trop importants. De ce côté de l’Atlantique, les spécialistes sont plus nuancés. Les patients, doivent-ils renoncer à cet examen, au prix de quelles incertitudes? Explications de Christophe Iselin, médecin-chef du service d’urologie des Hôpitaux universitaires de Genève.
Que pensez-vous des nouvelles directives américaines concernant le dépistage du cancer de la prostate?
Christophe Iselin: Comme souvent avec les Etats-Unis, nous sommes dans les extrêmes! Nous passons d’un système de prévention où tous les hommes devaient faire doser leur PSA, à un arrêt complet de cet examen. Je m’étonne que l’analyse de l’organe de prévention s’appuie principalement sur deux études défavorables au dépistage.
La première, américaine, comporte de gros problèmes de méthodologie. La seconde, européenne, mieux faite, ne montre effectivement pas d’avantage marqué pour le dépistage. Par contre, l’organe de prévention passe trop rapidement sur une troisième étude tout à fait correcte du point de vue méthodologique. Elle montre pourtant que l’on peut sauver une vie pour trois cents hommes dépistés, dont douze sont opérés.
Ces chiffres parlent clairement en faveur du dépistage. Ils sont d’ailleurs analogues à ceux que l’on retrouve dans le dépistage du cancer du sein. Cela dit, je pense effectivement que l’on est allé trop loin dans le dosage du PSA. Un dépistage systématique ne se justifie pas.
Malgré tout, le dosage du PSA ne s’est pas avéré très fiable?
Le PSA agit un peu comme un voyant qui s’allume lorsque quelque chose ne va pas dans la prostate. Ce signal d’alarme n’est pas spécifique, il s’allume en cas de cancer mais aussi d’inflammation, ou tout simplement si la prostate s’est agrandie, comme c’est souvent le cas chez les personnes âgées. Il faut donc se servir de cet indicateur avec nuance.
Une étude a montré que le dépistage précoce ne changeait rien à la mortalité liée à ce cancer. Cela reste-t-il vrai?
C’est justement l’étude américaine qui pose des problèmes méthodologiques, on ne peut donc pas en tenir compte. Mais il est vrai que sur 30% des hommes qui risquent de développer un cancer de la prostate dans leur vie, seul un sur dix va décéder de cette maladie. Ce cancer évolue assez souvent lentement. Dans certains cas, il suffit de suivre les patients sans les traiter. L’important est d’arriver à détecter le groupe des cancers qui auront un impact sur la qualité de vie et la survie.
Nous pouvons faire un calcul de risque pour savoir s’il faut poursuivre les investigations sur la base d’un PSA élevé, en tenant compte de l’âge, du volume de la prostate, du résultat de l’examen clinique et de l’échographie, ainsi que de l’histoire familiale.
Nous pouvons ensuite décider de poursuivre avec une biopsie qui nous dira à quel type de cancer nous avons affaire. Toutefois cet examen peut déclencher des infections sévères chez un patient sur trente, voire des septicémies.
Le mot d’ordre, finalement, ne consisterait-il pas à individualiser le dosage du PSA?
Effectivement. Ainsi que la façon d’envisager les suites de la découverte d’un cancer. Certaines personnes voudront absolument un traitement, en dépit des effets secondaires possibles comme l’impuissance et l’incontinence. D’autres ne voudront pas en entendre parler car ils craignent de perdre leur activité sexuelle, malgré l’amélioration des techniques. C’est vraiment au médecin d’appréhender ce qui est important pour le patient.
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Extrait de : Check-Up. Les réponses à vos questions santé |
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