Détecter les lésions de l’estomac à partir d’une simple analyse de l’haleine
Cette recherche originale a été menée par une équipe réunissant des chercheurs de l’Israel Institute of Technology et de l’Anhui Medical University (Chine). Elle vient d’être publiée dans le British Journal of Cancer. (on en trouvera un résumé ici-même). L’objectif est ici de faire un premier criblage des diagnostics des lésions responsables des plaintes émises par les patients qui souffrent de l’estomac. Un diagnostic à distance permettant de faire l’économie de techniques assez désagréables et coûteuses qui réclament la pratique de l’endoscopie et le prélèvement (biopsie) de tissus digestifs. Ces techniques sont souvent mises en œuvre tardivement et ne sont pas disponibles dans les pays en développement. «Il y a une forte demande pour un test simple et non invasif permettant de sélectionner les personnes à risque accru qui doivent subir l'examen endoscopique», résument les auteurs.
L’affaire semble désormais envisageable grâce au développement des nanotechnologies appliquées à l’air expiré; un air dont le contenu est déjà utilisé lors de la pratique de contrôles de la présence (et du taux) d’alcool dans l’organisme (éthylotests) sans faire de prélèvements sanguins. Ici ce test permettrait de distinguer les personnes souffrant d’un cancer de l’estomac parmi toutes celles qui se plaignent de maux gastriques.
Capteur hypersensible
Ce test repose sur une méthode d'analyse des gaz de l’haleine grâce à un capteur hypersensible. Les auteurs de cette recherche expliquent avoir atteint un taux de précision de 90%. Ils ont testé leur nouveau procédé auprès de cent trente personnes; trente-sept souffraient d’un cancer de l'estomac, trente-deux d’ulcères et soixante et une de douleurs d'estomac moins sévères. Ils montrent également la capacité du test à évaluer le stade d’évolution des lésions cancéreuses.
Les chercheurs expliquent avoir procédé lors de ce premier essai à différentes évaluations. Celle de la «sensibilité» du test (la proportion des personnes atteintes de cancer de l'estomac correctement identifiées) et celle de sa «spécificité» (la proportion de personnes atteintes de maladies non cancéreuses correctement identifiées). Ils ont aussi étudié les «faux positifs» (les personnes atteintes de maladies non cancéreuses identifiées à tort comme ayant un cancer) et les «faux négatifs» (les personnes atteintes de cancer de l'estomac identifiées à tort comme ayant des conditions non cancéreuses). Ils calculent enfin la «précision» du test (la proportion globale de personnes correctement diagnostiquées). Selon ses créateurs, ce test montre une sensibilité de 89% et une spécificité de 90%.
Déjà, en 2011, le “Na-Nose”
Cette étude montre notamment que cinq composés organiques volatils (2-propènenitrile, 2-butoxy-éthanol, le furfural, le 6-méthyl-5-heptène-2-one et de l'isoprène) sont significativement plus élevés dans l’air expiré par les personnes souffrant de cancer ou d’ulcère gastrique que chez les autres. Sans doute ne s’agit-il là que d’une étude pilote et des tout premiers résultats. Il n’en reste pas moins que ce travail prometteur ouvre de nouvelles perspectives. Ce test pourrait permettre de réaliser des «pré-diagnostics» avant d’effectuer d’éventuels endoscopies et prélèvements par biopsie. Ces résultats pourraient se révéler très précieux en pratique: à un stade précoce de son développement, ce cancer peut ne se manifester que par des symptômes similaires à certains maux d’estomac associés à une fatigue générale et à un état anémique. Le plus souvent, le diagnostic n’est fait qu’à un stade avancé avec des symptômes plus inquiétants comme une perte de poids rapide inexpliquée et la présence de sang dans les selles.
Il faut noter que ce n’est pas la première fois que cette approche diagnostique, via l’air expiré, est explorée dans le domaine de la cancérologie. En 2011, la même équipe israélienne avait publié, également dans le British Journal of Cancer, des travaux similaires mais concernant des personnes atteintes de tumeurs «de la tête et du cou». Le procédé avait alors été baptisé “Na-Nose” (“Na” pour nanométrique). Le résumé de ce travail est disponible ici-même.
Le “Na-Nose” utilise des capteurs de nanoparticules d'or qui peuvent détecter et séparer différentes odeurs, même à des concentrations très faibles. Ce dispositif a déjà été testé pour sa capacité à détecter d’autres cancers (sein, poumon, côlon et cancer de la prostate). Les cancers de la tête et du cou réunissent ceux qui peuvent atteindre différents tissus, dont les os, les tissus mous, les glandes salivaires, la peau et les muqueuses. Là encore ces cancers sont souvent diagnostiqués tardivement du fait de l’absence de symptômes spécifiques et des méthodes de dépistage disponibles. Dans leur étude publiée en 2011 les chercheurs avaient analysé soixante-deux échantillons d'haleine. Leur procédé avait correctement identifié vingt-quatre des vingt-six sujets sains et toutes les personnes atteintes. Les auteurs soulignent dans tous les cas le bon rapport coût-efficacité d’une telle approche.
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