La désensibilisation, une arme efficace pour combattre l’allergie
Ce qu’il faut savoir…
REMBOURSEMENT | L’immunothérapie allergique est un traitement assez répandu. Selon Philippe Eigenmann, il est indiqué dans environ un quart à un tiers des rhinites d’origine allergique. L’assurance-maladie de base prend en charge le coût de ces traitements.
ET LES POILS DE CHAT? | L’allergie aux poils d’animaux peut être problématique au sein d’une famille. L’immunothérapie, en théorie, peut être une solution, mais en pratique, «moins d’études ont été menées que pour les pollens», admet le spécialiste genevois. Et pour cause, l’allergie pollinique concerne beaucoup plus de monde. Dans les faits, des problèmes de disponibilité des produits et d’enregistrement auprès de Swissmedic limitent les possibilités de traitements pour les amoureux de chats, des chiens, des lapins, etc.
DONNÉES SUR LES ALLERGIES | Le Centre d’allergie suisse met à disposition des informations utiles au quotidien pour les personnes allergiques. Sur son site internet sont indiquées les concentrations globales de pollens dans l’air, selon les régions de Suisse. L’internaute a également accès à des données polliniques fines sur la présence des différents types de pollens, dans différentes villes, au jour le jour.
Le printemps n’est sans doute pas la saison préférée des personnes allergiques. Et pour cause, c’est au moment de la floraison des plantes que les pollens se mettent à circuler dans l’air. Pour certaines espèces, la floraison débute bien plus tôt dans l’année. Qu’elle ait lieu en janvier, en mars ou en avril, les effets ne se font pas attendre pour ceux qui y sont sensibles: éternuements à répétition, nez bouché ou nez qui coule, yeux larmoyants ou qui piquent, avec parfois des démangeaisons au niveau du nez, du palais ou des oreilles. En Suisse, 15 à 20% de la population est concernée par l’allergie pollinique, plus communément appelée rhume des foins ou allergie au pollen. Différents médicaments (antihistaminiques, par exemple) permettent d’atténuer les symptômes allergiques, mais seule la désensibilisation ou immunothérapie spécifique s’attaque directement aux causes de l’allergie. Ce traitement, dont le principe date d’une centaine d’années, est en effet le seul à offrir une amélioration durable des symptômes.
Habituation du corps
On peut y recourir contre l’allergie pollinique, mais aussi contre celle aux acariens présents dans la poussière domestique, voire dans le cas d’allergies aux animaux. Il est particulièrement indiqué dans le cas de l’allergie au venin d’abeille et de guêpe, qui peut mettre la vie en danger.
Pour comprendre le principe de la désensibilisation, rappelons que l’allergie est une réaction excessive du système immunitaire contre des substances qui sont en réalité anodines (les pollens, les acariens, les poils d’animaux, etc.) et qu’on appelle allergènes. L’immunothérapie a pour but d’influencer le système immunitaire et d’entraîner une habituation progressive de l’organisme à ces allergènes. Elle offre, selon le Pr Philippe Eigenmann, responsable de l’unité d’allergologie pédiatrique aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), de bons résultats: «Dans 70 à 90% des cas, elle entraîne une diminution des symptômes, mais rarement leur disparition totale». En revanche, ce traitement exige une certaine motivation de la part du patient, dans la mesure où il s’étale sur trois ans. Deux options sont possibles: une désensibilisation chez le médecin sous la forme d’injections de l’allergène à des doses progressives toutes les semaines durant trois mois, puis une fois par semaine, plusieurs mois durant. Ou alors, l’administration de l’allergène par voie sublinguale, à domicile. Dans ce cas, la contrainte est alors quotidienne puisqu’il faut prendre les gouttes ou les comprimés chaque jour. Le traitement est sans risques, mais il peut occasionner des effets secondaires (démangeaisons et maux de ventre ou douleurs au bras lors de l’injection).
Chez l’enfant aussi
Pour en bénéficier, certaines conditions doivent être réunies, explique le spécialiste: «On y recourt lorsque le patient a une allergie respiratoire avérée, que ses symptômes sont durables et que les traitements habituels sont insuffisants. Il vaut mieux également ne pas être sujet à trop d’allergies différentes pour qu’un tel traitement soit efficace».
La désensibilisation est possible, voire particulièrement intéressante chez l’enfant (dès l’âge de 5 ans), précise le professeur genevois: «Comme cette thérapie modifie le programme de la maladie, elle permet en outre de prévenir la survenue d’asthme allergique à plus long terme». De quoi se prémunir pour la vie.
AMÉLIORATION DES TRAITEMENTS
Les progrès de la recherche permettent d’optimiser le principe de la désensibilisation allergique, une méthode centenaire. Différentes perspectives thérapeutiques font l’objet d’évaluations. Les extraits naturels que l’on injecte par voie sous-cutanée en vue de réhabituer l’organisme à la substance allergène peuvent être remplacés par des «recombinants», obtenus par génie génétique. Il s’agit, en quelque sorte, d’allergènes purifiés, fabriqués par des bactéries. Ce procédé permet d’obtenir des allergènes à la fois plus standardisés et plus spécifiques. La quantité d’allergènes présents est plus facilement vérifiable et les effets recherchés plus maîtrisés. Concrètement, le risque de provoquer des allergies croisées ou d’autres réactions d’hypersensibilité lors des injections est moins important.
Mais ces substances doivent encore faire leurs preuves, même si plusieurs études scientifiques ont prouvé leur efficacité. D’autres procédés de désensibilisation, tels que le recours aux allergènes dénaturés ou à des agents biologiques, sont eux aussi en cours d’évaluation. A ce jour, toutes les pistes restent ouvertes. Seules des études supplémentaires permettront d’imposer une voie thérapeutique vis-à-vis d’une autre. Mais globalement, ces nouvelles stratégies ouvrent la possibilité de raccourcir sensiblement la durée du traitement de désensibilisation, d’améliorer sa sécurité et son efficacité.
Plus d’infos sur : www.pollenundallergie.ch/infos-sur-pollens-etallergies/informations-polliniques
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Référence:
Paru dans le Quotidien de La Côte du 3 mai 2017.