De nouveaux remèdes contre la migraine
Les volets fermés, la main posée au-dessus de l’œil pour tenter de juguler l’intense douleur qui frappe l’un des deux côtés de sa tête. Elise souffre de migraine, une maladie très fréquente qui touche 10 à 15% de la population.
La plupart des personnes concernées ne sont confrontées à ces maux qu’une à deux fois par mois, tandis que chez une minorité, les crises migraineuses surviennent plus régulièrement et handicapent d’autant plus le quotidien.
La migraine n’est pas un banal mal de tête. Elle se définit selon des caractéristiques strictes. En effet, pour que le diagnostic soit posé, au moins deux des quatre critères suivants doivent être réunis: la douleur débute d’un seul côté (à droite ou à gauche) de la tête; elle est pulsatile, comme si on donnait des coups de marteau; son intensité est modérée à sévère (soit de 5/10 à 10/10 sur l’échelle de la douleur); elle oblige à arrêter l’activité en cours ou, à défaut, est renforcée si l’activité est poursuivie. De plus, elle doit s’accompagner d’au moins un des symptômes suivants: vomissements ou nausées, ou gênes ressenties face à la lumière et au bruit.
Établir le diagnostic
Si vous avez déjà été confronté à ces symptômes, sachez que des traitements efficaces existent et que de nouveaux médicaments vont bientôt arriver sur le marché. Mais avant toute chose, lors de la consultation, le médecin va chercher à comprendre à quel moment les crises surviennent. Sur la base d’un terrain migraineux, plusieurs éléments peuvent en effet favoriser l’apparition d’une migraine. C’est le cas de certaines boissons (le vin blanc serait typique), certains aliments, un manque de sommeil, des odeurs, un temps prolongé devant des écrans, l’arrivée du week-end, etc.: «Les facteurs déclencheurs sont très divers et très individuels. Il s’agit de les identifier avec le patient. L’action sur ces éléments fait intégralement partie de la prise en charge», déclare le professeur de neurologie Philippe Ryvlin, chef du département des neurosciences cliniques au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV).
Sur le plan médicamenteux, on commencera d’abord par le traitement ponctuel des crises. En première ligne, des antidouleurs classiques (paracétamol ou antiinflammatoires) seront prescrits. Si ceux-ci ne parviennent pas à diminuer la douleur, le médecin proposera des «triptans», une autre classe de médicaments. Ces derniers réduisent la dilatation des vaisseaux sanguins, notamment en stimulant des récepteurs de la sérotonine, et auraient de plus une action sur les circuits de la douleur. «Ils sont globalement plus efficaces pour stopper la crise, ils diminuent l’intensité de la douleur et agissent plus rapidement. Mais ils sont plus chers et moins bien tolérés que les antalgiques standards», résume le professeur Ryvlin.
Traitements de fond: du nouveau
Si les épisodes de migraine sont trop fréquents et que leur traitement ponctuel apparaît comme insuffisant, un traitement de fond, visant à éviter leur survenue, sera proposé. Le médecin dispose ici de plusieurs types de médicaments qui ont une efficacité contre la migraine, mais qui ne sont pas forcément spécifiques pour soigner ce trouble. Parmi eux, certains bêtabloquants, utilisés contre l’hypertension ou les maladies cardiaques.
La découverte de leur effet préventif contre les migraines est empirique, et ne repose pas sur un mécanisme bien établi. Certains antiépileptiques et antidépresseurs ont également démontré leur utilité dans l’espacement et la réduction de l’intensité des épisodes migraineux. «Le choix entre l’un ou l’autre des médicaments à disposition dépend des caractéristiques individuelles (sexe, âge, autres traitements) et de leur risque d’effets secondaires. On ne va pas prescrire des antihypertenseurs à une jeune femme qui a une pression artérielle basse», illustre le professeur Ryvlin.
Antidouleurs: attention aux abus!
Bien que certains antidouleurs soient en vente libre –c’est le cas du paracétamol et de l’ibuprofène–, ils doivent être utilisés avec précaution. La prise trop régulière de ces médicaments risque d’aggraver la douleur. Paradoxalement, les céphalées deviennent plus fréquentes, voire chroniques. On considère que plus de deux prises d’antalgiques par semaine sur une durée de trois mois constituent déjà un abus.
Mais pour les patients qui répondraient mal à ces traitements en raison de douleurs persistantes ou de crises trop fréquentes, ou pour ceux qui en supporteraient mal les effets secondaires, l’arrivée prochaine d’une nouvelle classe de médicaments constitue un réel espoir.
Contrairement aux médicaments utilisés dans les traitements de fond, les «anti-CGRP» ont été spécifiquement développés contre les troubles migraineux. «Les antagonistes du peptide CGRP sont le fruit de la recherche sur les mécanismes de la migraine. Ils interviennent en effet dans le processus inflammatoire des vaisseaux méningés, responsable des céphalées», explique le spécialiste.
L’originalité de ce traitement réside aussi dans son mode de prescription et dans le confort apporté au patient, puisqu’il consiste en une injection mensuelle. «Bien qu’on manque de recul car nous n’avons pas encore d’expérience clinique de terrain, les études actuelles sont très encourageantes. Des milliers de patients à travers le monde y ont participé. Ces travaux ont démontré une efficacité nette et prolongée de ces nouveaux médicaments». Les victimes de migraine devront, en Suisse, patienter encore quelques mois pour pouvoir en juger.
Des alternatives aux médicaments
Le recours aux médicaments est l’option thérapeutique la plus courante pour soigner la migraine, mais d’autres pistes sont explorées, «avec des résultats toutefois modestes», de l’avis du professeur Ryvlin. Parmi ces traitements: la stimulation électrique transcutanée et la stimulation du grand nerf occipital, qui consiste en l’implantation d’électrodes dans cette zone. Le nerf occipital innerve la région du crâne, et sa stimulation permet d’atténuer les douleurs de cette région. L’injection de toxine botulique (plus connue sous le nom de Botox®) suscite beaucoup d’intérêt chez les patients du fait de sa médiatisation. L’injection quotidienne de ce produit dans différentes régions au niveau du crâne est efficace, mais «uniquement pour les patients souffrant de migraine chronique, les migraines épisodiques ne répondant pas au traitement».
L’hypnose: une piste prometteuse
Pour compléter le panel thérapeutique, citons encore l’hypnose. Elle agit à la fois sur la douleur pour la diminuer, mais aussi sur la gestion de cette dernière par le patient. La migraine est due au départ à une inflammation des méninges. La douleur, elle, est liée à différentes zones du cerveau, mais reste un phénomène subjectif. Aussi, même si l’inflammation disparaît, il arrive que le cerveau continue à la percevoir. «L’hypnose agit ainsi sur la perturbation du phénomène d’intégration de la douleur». De l’avis du spécialiste lausannois, cette méthode est l’une des pistes thérapeutiques les plus intéressantes, à condition que le patient soit pris en charge par du personnel médical formé en hypnothérapie médicale.
_________
Source: Paru dans le supplément «Votre santé» du Quotidien de La Côte, novembre 2016.
Ces auras qui accompagnent la migraine
Migraines: les innovations sont peu prescrites
Du magnésium contre les migraines?
Migraine de folie
Migraines et céphalées: les femmes plus touchées que les hommes
Une nouvelle piste sur l'origine génétique de la migraine
Migraine
La migraine est une variété de maux de tête fréquente. Elle s'accompagne souvent de nausées, de vomissements, et d'une intolérance au bruit et à la lumière.