Aïe, j’ai sommeil
Désagréable le jour, la douleur persiste bien souvent la nuit et perturbe le sommeil. Les personnes souffrant de douleurs chroniques le savent bien: entre 50 et 70% d’entre elles sont victimes de troubles du sommeil.
De même, une mauvaise nuit aura une réelle incidence sur le ressenti de la douleur durant la journée. Des expériences tant chez l’animal que chez l’homme ont clairement démontré que la privation de sommeil abaisse significativement le seuil de tolérance à la douleur, tant subjectivement qu’objectivement. C’est ce que confirme une étude récente impliquant une vingtaine de femmes victimes de douleurs chroniques: les nuits avec mauvais sommeil sont suivies d’une augmentation de la douleur le lendemain. Inversement, une journée douloureuse est suivie par une mauvaise nuit. Concrètement, les conséquences sont les suivantes: allongement du temps d’endormissement, fragmentation du sommeil, qui devient moins efficace, et augmentation du sommeil léger aux dépens de sommeil lent profond, considéré comme le plus réparateur. Cette interaction étroite entre sommeil et douleur peut même laisser naître un symptôme dépressif.
Sortir du cercle vicieux qui s’installe insidieusement entre ces deux symptômes est compliqué, d’autant plus que les connaissances de leurs interactions sont encore lacunaires. Une prise en charge globale du patient, considérant à la fois les aspects biologiques et psychosociaux de sa personne, est alors recommandée.
L’approche médicamenteuse
Une approche pharmacologique peut être envisagée pour aider ces patients. Le traitement idéal doit agir dans les deux directions, soit diminuer la douleur et améliorer le sommeil. Pour cela, la combinaison de différents types de molécules peut être nécessaire. Rares sont les études concernant les antidouleurs qui s’intéressent à la fois à ces deux aspects, à l’exception peut-être des recherches sur la fibromyalgie, une maladie qui se définit justement par des douleurs chroniques diffuses associées à des perturbations du sommeil.
Certains antidépresseurs ont des propriétés à la fois sédatives et antalgiques. Par exemple, l’amitriptyline, une molécule utilisée depuis de nombreuses années pour les douleurs chroniques, induit le sommeil, déjà à faible dose. C’est le cas aussi d’une autre molécule, du nom de mirtazapine. La trazodone augmente la durée du sommeil lent profond et diminue la fréquence des réveils nocturnes. En plus d’améliorer la qualité (subjective) du sommeil, une étude a montré qu’elle avait des effets positifs sur l’anxiété et la dépression des patients atteints de fibromyalgie.
Les opioïdes ayant une durée d’action prolongée améliorent eux aussi le sommeil (subjectif et objectif) et la qualité de vie, en particulier chez des patients souffrant de douleurs ostéoarticulaires. Mais un usage chronique de ces médicaments peut entraîner des problèmes d’apnées centrales et une dépendance. Les antiépileptiques également ont montré leur efficacité chez plus de deux milles patients atteints de douleurs interférant avec le sommeil. Un effet analgésique et régulateur du sommeil du prégabaline se produit à des doses variant entre 150 et 600 mg par jour. De même, l’oxybate de sodium, une autre molécule utilisée dans le traitement de la narcolepsie avec cataplexie, augmente le sommeil lent profond et améliore la qualité des nuits des patients atteints de fibromyalgie, en même temps qu’elle atténue la fatigue chronique et les douleurs diffuses. La mélatonine, souvent citée en rapport avec le sommeil, le régule. Par contre, des études manquent encore pour prouver ses propriétés antalgiques. Le THC, présent dans le cannabis, faciliterait le sommeil chez l’animal et pourrait avoir un effet modeste, mais réel, sur les douleurs chroniques chez l’homme.
Une bonne hygiène du sommeil
En plus des médicaments, une bonne stratégie thérapeutique doit tenir compte de l’hygiène de vie et du sommeil du patient. Cela passe par une évaluation précise des rythmes de veille-sommeil au moyen d’un agenda, des périodes de douleur, du style de vie, de son environnement professionnel et familial, de son équilibre alimentaire ou encore de la pratique d’une activité physique. Il est reconnu que ces différents aspects ont une incidence certaine sur le déroulement des nuits. Une marche de trente minutes trois fois par semaine durant huit semaines suffit à améliorer la qualité subjective du sommeil et à diminuer les douleurs chez des cancéreux. Cet effet s’explique probablement par l’augmentation du taux de sommeil lent profond, qui peut être généré par la pratique sportive.
Les thérapies cognitivo-comportementales
Une autre piste pour aider ces patients réside dans les thérapies cognitivo-comportementales. La prise en charge donne une grande satisfaction aux victimes de douleurs chroniques. C’est du moins ce qui a été observé dans le programme mené aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) depuis 1997. Les troubles du sommeil n’y sont pas spécifiquement abordés, mais deux études récentes - l’une incluant des sujets souffrant de maux de nuque ou de dos, l’autre des sujets âgés touchés par l’arthrose - l’ont prouvé. Huit séances hebdomadaires de TCC, basée essentiellement sur la restriction du temps passé au lit, le contrôle de stimuli et une restructuration cognitive, ont permis d’améliorer subjectivement leur sommeil et de diminuer durablement les douleurs.
Références
Adapté de «Trouble du sommeil et douleur: le bon hypnotique ?», S. Perrig, K. Espa-Cervena, J.-L. Pépin. Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 1414-1420, en collaboration avec les auteurs.
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