Epidémie mondiale de Covid-19: le point sur les données scientifiques
Update coronavirus, Episode 40 - lien de l’émission
Contamination par surface versus gouttelettes et aérosols
La contamination par le biais des surfaces, c’est-à-dire par le toucher, représenterait moins de 10% des contaminations. Se laver les mains est donc important, mais loin d’être suffisant. La majorité des contaminations s’effectuerait en effet par le biais de gouttelettes et d’aérosols. Les gouttelettes concernent les particules virales émises en parlant ou en toussant qui ont une taille supérieure à cinq micromètres, soit un millième de millimètres. Ces dernières tombent sur le sol à moins d’1m50. « Elles tombent de surcroit assez rapidement ce qui signifie que si vous gardez une distance de plus 1m50 avec votre interlocuteur, vous avez peu de chances d’être contaminé ». Les aérosols en revanche, concernent les particules virales de moins de cinq micromètres pouvant être émises simplement en expirant. Ces dernières restent plus longtemps dans l’air, car plus légères. « Plus elles sont petites, plus elles flottent. Il s’agit de particules qui sont parfois plus légères que l’eau et qui coulent par conséquent moins facilement... Le potentiel infectieux de ces aérosols peut durer plusieurs heures. »
Le problème des aérosols dans les milieux fermés
Christian Drosten est d’avis que les restaurants devraient privilégier un maximum les espaces extérieurs, quitte à bénéficier d’une permission spéciale pour utiliser l’espace des trottoirs. « J’irai même jusqu’à dire qu’à l’extérieur, la distanciation de deux mètres n’est probablement pas nécessaire, car le virus qui se propage par les biais de la transmission d’aérosols est emporté par le vent ». À l’intérieur en revanche, Christian Drosten estime que la distanciation est importante. Selon lui, les restaurants devraient garder dans la mesure du possible leurs fenêtres grandes ouvertes, afin d’influencer la dispersion des aérosols et le renouvellement constant de l’air. Comme pour les salles de classes, il préconise l’utilisation constante de ventilateurs aux fenêtres ou accrochés aux plafonds.
Origine du virus et théories du complot
La principale protéine de surface du SARS-Cov-2, celle grâce à laquelle le virus s’accroche et pénètre la cellule, est très différente de celles trouvées dans les quatre autres coronavirus connus de l’Homme. Cette particularité est à l’origine d’un nombre important de théories du complot sur l’origine véritable du SARS-Cov-2. Selon Christian Drosten, le virus est le résultat d’une évolution naturelle. Il n’est, par ailleurs, pas convaincu par la transmission pangolin-homme. « Les séquences qui ont été publiés à partir du pangolin ne m'ont pas convaincu du tout... mais je n’exclus néanmoins pas l’origine animale. » Christian Drosten se réfère aussi à une récente étude chinoise sur la découverte d’un coronavirus détecté chez la chauve-souris qui s’apparenterait à la structure du SARS-Cov-2. Il ne s’agit pas du même virus, mais d’un virus qui partagerait de nombreuses caractéristiques avec le SARS-Cov-2. Cette étude joue en faveur de l’origine naturelle du virus et contre sa confection en laboratoire. Le virologue précise néanmoins que « la biologie évolutive ne peut presque jamais être prouvée ». Il conteste également les propos émis par le virologue français Luc Montagnier qui affirme que le génome du SARS-Cov-2 présenterait des séquences apparentées au VIH. « Il s’agit d’une opinion basée sur une prépublication qui a depuis été retirée... Il m’est difficile de contredire un Prix Nobel de médecine, mais il s’agit selon moi d’hypothèses tout à fait absurdes. »
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Update coronavirus, épisode 38 - lien de l’émission
Contagion des enfants
Christian Drosten se réfère à l’étude genevoise menée par Isabelle Eckerle pour confirmer la contagion du virus chez les enfants. Menée sur 23 enfants âgé de 7 à 16 ans, cette étude réalisée aux HUG démontre que la charge virale du SRAS-2 chez les enfants est équivalente à celle des adultes. Le virologue revient également sur une étude chinoise qui lui semble crédible et qui fut publiée la semaine dernière dans le magazine Science. Cette dernière stipule que le risque d’infection des enfants âgés de 0 à 14 ans représenterait environ un tiers du risque d’infection pour les adultes. En d’autres termes les enfants attraperaient moins souvent le virus que les adultes, mais lorsqu’ils l’attraperaient, même si asymptomatiques, ils seraient tout aussi contagieux que les adultes.
Les fumeurs auraient un taux d’attaque significativement plus faible que les non-fumeurs.
C’est l’hypothèse d’une étude réalisée par l’Institut Pasteur de Paris la semaine dernière. Sur ce point Christian Drosten se montre sceptique et invoque d’autres données cliniques qui indiquent que les fumeurs seraient plus à risque de développer une évolution sévère de la maladie que les non-fumeurs. « Je ne souhaite pas me prononcer sur les résultats de cette étude pour le moment. Les chiffres affichent un contraste si frappant que je soupçonne qu’il doit y avoir une erreur quelque part. Je ne peux l’expliquer mais disons que j’imagine qu’une autre explication pourrait exister ».
Pression des politiques sur la science
Pour expliquer les variations de statistiques et de chiffres qui circulent sur la toile, Christian Drosten évoque la pression politique subie par la recherche scientifique. Des chiffres sont prodigués à la va-vite à des politiques pressés de répondre à diverses exigences. « Les politiciens doivent prendre des décisions rationnelles pour la société. Ils en sont responsables et c’est la grande difficulté de leur métier. Or certains politiciens ont tendance à chercher refuge derrière des données scientifiques. Ils cherchent un manuscrit scientifique dont ils peuvent extraire des chiffres écrits noir sur blanc qui justifieraient leurs décisions. Nous entrons dès lors dans une zone quelque peu dangereuse où la science divulgue des chiffres le plus vite possible, même s’il manque la moitié du tableau et sans pour autant terminer les recherches. Ça ne vient pas toujours des scientifiques, ça peut aussi venir des bureaux de presse et ainsi de suite. »
Ouverture des crèches et écoles primaires, certificat médical pour les familles à risque
Christian Drosten pense qu’il est juste, car socialement et économiquement nécessaire, d’ouvrir les garderies et les écoles primaires. Il se base ici sur le constat que les petits enfants attraperaient moins souvent le virus que les plus grands et adultes. Pour les classes supérieures, il recommande des mesures de distanciation, d’hygiène et de ventilation. Il évoque également la possibilité pour les familles à risque, dont un père souffrirait par exemple d’une maladie cardiaque, ou qui partageraient leur logis avec des personnes à risque, de se munir d’un certificat médical et de suivre les classes à distance.
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Update Coronavirus, Episode 36 - lien de l’émission
Vendredi 25 avril, Daniel Koch, délégué pour le Covid-19 de l’OFSP a affirmé que les grands-parents pouvaient à nouveau étreindre leurs petits-enfants. En Allemagne, le virologue Christian Drosten avise le contraire. « Les grands-parents ne doivent en aucun cas fonctionner comme des baby-sitters de remplacement. »
Les enfants sont-ils des transporteurs du SRAS—2 ?
Parce qu’ils développent rarement des symptômes, le rôle des enfants dans la propagation du SRAS-2 s’accompagne de nombreuses incertitudes. « Lorsqu’un adulte est infecté, il se rendra chez son médecin pour effectuer un test, mais l’idée d’emmener avec lui son enfant ne lui viendra pas à l’esprit » explique Christian Drosten. La présence des enfants dans les études épidémiologiques demeure par conséquent très faible. Le virologue évoque néanmoins une étude prospective dont les échantillons englobent des populations infantiles. L’étude en question stipule que le taux de contamination d’un patient index au sein de son ménage se situerait vers les 15%. « Ce taux s’applique uniformément à tous les groupes d’âge, ce qui signifie que les enfants seraient touchés de la même façon par le virus que d’autres ».
La question qui se pose désormais est de savoir à quel point l’enfant contaminé transporte et diffuse le virus son tour. « Ce n’est pas parce que les enfants développent très rarement des symptômes qu’ils ne transmettent pas le virus. » rappelle le virologue. Disposant d’un système immunitaire plus naïf que celui des adultes, Drosten explique que les enfants abritent généralement une quantité plus élevée de virus dans leurs gorges que les adultes. C’est du moins le cas avec la grippe et de nombreux rhumes. Avec le SRAS-2, la quantité de virus présent dans la gorge d’un enfant versus la gorge d’un adulte n’a pas encore été calculée, mais des études sont en cours. Pour Christian Drosten, « plus les enfants sont petits, moins on en sait », raison pour laquelle il est impératif de rester, pour le moment, prudent avec leurs zones de contact. « De plus, nous ne pouvons demander à des petits enfants de porter un masque et de respecter une distance d’1,5 mètre entre chaque individu » ajoute-il. « Les grands-parents ne doivent pour le moment en aucun cas fonctionner comme des baby-sitters de remplacements. Ceci s’applique également pour toutes autres personnes âgées. »
Diminuer les risques de transmission à l’école
« La proximité pendant plusieurs heures dans une pièce fermée n’est pas recommandée » confirme Christian Drosten. Selon lui, si les garderies et les écoles reprennent leurs fonctionnements habituels, il conviendrait d’assurer une bonne ventilation au sein de leurs murs. « On pourrait imaginer que les salles de classe gardent une fenêtre ouverte qui dispose d’un grand ventilateur qui soufflerait l’air de la classe vers l’extérieur. La porte de la classe resterait ouverte afin d’assurer une légère brise dans la classe. » L’ouverture des aires de jeu en revanche, est possible, les risques de contamination en plein air étant relativement faibles et les enfants s’y trouvant étant généralement moins nombreux que dans un milieu fermé. Le virologue rappelle néanmoins que « toutes mesures d'assouplissement comportent un risque ». Un risque virologique qui ne dépasse pas nécessairement les dommages collatéraux qui accompagnent, pour certains, l’instauration-même de ces mesures. Il se réfère ici surtout aux familles ou parents qui vivent dans de petits appartements en ville, sans possibilité d’activité en plein air pour leurs enfants. Pour Dorsten, le fait que les enfants développent rarement les symptômes du Covid-19 est un avantage. « Comme ils ne toussent pas, le virus se propage moins facilement. De même, le volume pulmonaire des enfants étant petit, l’émission des virus dans l’air demeure plus faible que chez les adultes ». Selon lui, il est urgent de rouvrir les structures de gardes et les écoles tout en discutant des paramètres pouvant simultanément contribuer à réduire la propagation du virus. « Favoriser les pauses à l’extérieur, veiller à ce que les enfants ne prennent pas nécessairement tous leurs pauses en même temps, etc… ».
Passeport immunitaire
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la délivrance de « passeport immunitaire » risque de favoriser la propagation continue de la pandémie. Il n’existerait selon elle pas de preuve que les personnes testées positives au SRAS-2 soient protégées contre une nouvelle infection. Christian Drosten comprend le sens de ce message, mais rappelle que l’OMS « ne peut se permettre d’entrer dans les détails. Sa mission étant d’établir des directions, quitte à emprunter des messages raccourcis ». Il suppose que derrière ce message se cachent d’autres motifs. Le premier serait que les tests d’anticorps actuellement disponibles sur le marché comprennent une probabilité d’erreur, ce qui signifie qu’une personne testée positive n’est pas forcément immunisée. Le second s’apparenterait au fait qu’un passeport immunitaire pourrait s’accompagner d’effets indésirables sur le plan social. « Admettons que je suis une compagnie d’assurance. Je connais le coût des soins intensifs requis pour le SRAS-2. Les personnes disposant d’un « passeport immunitaire » seraient par conséquent avantagées sur les autres. Cela va de même pour l’employeur ». En d’autres termes, l’instauration d’une « carte immunitaire » pourrait briser certaines dynamiques sociales. Selon Drosten il existerait probablement une immunité, du moins partielle, contre le SRAS-2, qui durait entre 6 mois et 3 ans « La personne qui a survécu à la maladie, devrait normalement être protégée ou plus forte contre les attaques d’une seconde infection ». Ses propos se basent entre autres sur sa connaissance du fonctionnement d’autres types de coronavirus.
Autophagie et espoirs thérapeutiques de la niclosamide
L’autophagie est la dégradation partielle du cytoplasme d’une cellule par le bais de ses propres lysosomes. Elle représente une sorte de suicide cellulaire vital à notre fonctionnement. « La Bécline-1 est une protéine qui démarre l’autophagie » explique Christian Drosten. « Il existe aussi d’autres substances présentes dans nos cellules qui décomposent la Bécline-1. Le virus du SRAS semble interférer avec cette chaîne de commandes ». La niclosamide, vermifuge utilisé dans le traitement de parasites tels que le Ténia (ver solitaire) favorise quant à elle l’activité autophagique de certaines de nos cellules en stimulant la Bécline-1. Connue de l’homme et s’accompagnant de peu d’effets secondaires, cette molécule obtient de bons résultats in vivo contre l’activité du SARS_Cov-2. Il existe d’autres molécules favorisant l’activité autophagique de nos cellules comme par exemple la spermidine, mais celles-ci nécessitent encore des études supplémentaires avant d’être testées sur l’homme.
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Update Coronavirus, Episode 27 - lien de l’émission
La forte transmission du covid-19 par des patients pré-symptomatiques relance le débat sur l’utilisation d’une application mobile en Europe.
Transmission du virus avant à l’apparition des symptômes
Une étude de modélisation européenne menée à Oxford évalue le pourcentage d’individus qu’une personne infectée par le Covid-19 infecte à son tour. Les calculs furent menés sur l’analyse de « 40 paires de transmissions issues de la littérature », soit le nombre de personnes que 40 personnes infectées infectent à leur tour. L’étude de modélisation a déterminé qu’une personne infectée infecte environ 2 personnes, ce qui pour Christian Drosten représente un taux relativement optimiste. Sur cette estimation du chiffre 2, la question qui se pose est de déterminer dans quelle phase de l’infection le virus se transmet. « Les transmissions asymptomatiques sont celles d’un porteur qui ne ressentira jamais de symptômes. Les transmissions pré-symptomatiques, celles qui sont effectuées par un émetteur qui ne présente pas encore des symptômes » explique Christian Drosten. « Les valeurs qui ressortent de cette étude sont les suivantes : 0,9 dans la transmission pré-symptomatique, soit une part de 0,9 sur la valeur de 2. 0,8 dans la transmission symptomatique. 0,2 dans la transmission environnementale et enfin, 0,1 dans la transmission asymptomatique ». En d’autres termes, la transmission par des personnes comme par exemple les enfants qui ne présentent aucun symptôme, est relativement faible. En revanche, la transmission de l’infection par des personnes infectées qui ne présentent pas encore de symptômes (pré-symptomatiques) est très élevée. « La part de transmission pré-symptomatique représente 46% de l’activité de la transmission totale » explique Christian Drosten, ce qui signifie qu’une grande partie de la transmission se situe avant l’apparition des premiers symptômes. « Or, on ne peut réellement isoler que les patients symptomatiques » rappelle Christian Drosten. C’est sur ce constat plutôt pessimiste et alarmant de cette forte transmission par des patients pré-symptomatiques que le virologue discute, toujours dans le sens de cette étude de modélisation menée à Oxford, de la possibilité de recourir à une application mobile pour diminuer la propagation du virus au sein de la population. Une application permettrait en effet d’accélérer la détection des cas infectés et de réduire leurs contacts pendant un temps donné.
Applications mobiles anonymes et volontaires
Dans ses premiers podcasts, toujours sur les antennes de NDR, Christian Drosten avait déclaré qu’il serait difficile dans un pays comme l’Allemagne, d’utiliser des applications mobiles pour contrôler la propagation du covid-19 au sein de la population. La Chine et la Corée du Sud ne partageant pas le même respect de la sphère privée, ces moyens, bien qu’efficaces, seraient inenvisageables en Europe. En se basant sur cette même étude de modélisation européenne menée à Oxford, Christian Drosten rectifie son jugement. Le développement d’une application mobile est en réalité une des seules alternatives au confinement général que nous possédons pour diminuer la transmission du covid-19. « Il s’agirait d’une application pouvant enregistrer les symptômes dès le début » explique le virologue. « Il vous suffirait d’écrire sur votre téléphone portable : je présente des symptômes. L’application enverrait vos données au laboratoire, accélérant les résultats de votre diagnostic, ou vous permettant d’être diagnostiqué tout de suite. L’application déclencherait elle-même le processus de diagnostic. Ensuite, si le diagnostic est positif, l’application pourra suivre les autres téléphones portables avec lesquels vous avez été récemment en contact. Vous pourrez aussi indiquer la durée du contact que vous avez eu avec ces personnes et ainsi de suite (...) Ces individus seront ensuite informés d’un contact possible avec un patient pendant telle ou telle période infectieuse. » Selon Christian Drosten, si 60% de la population acceptait de jouer le jeu, d’installer cette application et de rester à la maison lorsque recommandé, on pourrait diviser par deux la propagation du virus. Une personne infectée n’infecterait plus qu’une seule autre personne en moyenne et non plus deux. « Les entreprises pourraient travailler, les écoles enseigner, l’activité pourrait reprendre, mais pas pour tout le monde en même temps. À un moment donné, vous recevrez un message sur votre téléphone portable : veuillez-vous mettre en quarantaine à domicile. Vous montrerez ce message à votre employeur qui vous dirait : dans ce cas, quarantaine à domicile pour vous cette semaine. Je pense que c'est un modèle intéressant que nous ne devrions pas refuser ».
Étude chinoise randomisée sur la chloroquine
Toujours à l’antenne de NDR, Christian Drosten a passé en revue les défauts d’une étude sur la chloroquine menée à Marseille. Étude qui selon lui, ne permet pas de tirer des conclusions valides. Une nouvelle étude, randomisée cette fois-ci, a été menée en Chine. Basée sur 62 patients au total, il s’agit d’une « très petite étude » explique le virologue. Les patients sélectionnés ne présentaient également pas de troubles contre-indiqués lors de l’administration de chloroquine. « L’étude ne comprenait pas de patients atteints de maladie de la rétine, d’arythmie cardiaque, de maladie du foie ou rénale... Les pneumonies dans le groupe non-traité se sont améliorées dans 17 des 31 cas après une semaine. Les signes de pneumonie, qui sont une combinaison de toux puis d'imageries en TDM, se sont améliorés dans 25 sur 31 cas dans le groupe de traitement » explique Christian Drosten. Il s’agit donc selon lui d’une amélioration encourageante, mais pas suffisamment pertinente pour élire la chloroquine comme une substance pouvant résoudre la pandémie dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Il s’agit également d’une étude qui s’accompagne de nombreuses interrogations, mais « il se pourrait » ajoute Drosten « que la chloroquine, dans une administration précoce de l’infection permette en effet de gagner un peu de temps. » La substance n’est donc aucunement à bannir, mais les espoirs la concernant doivent rester mesurés.
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Update Coronavirus, Episode 24 – lien de l’émission
Exception allemande ?
L’Allemagne semble pour l’instant plus épargnée que d’autres pays européens. Elle enregistre en ce début de semaine un taux de mortalité due au Covid-19 de 0,8 %. En Italie ce taux se situe vers les 11%, en Espagne vers les 8% et en Suisse aux alentours de 1,9%. Son secret ? « Nous avons déployé une force énorme de diagnostics très tôt dans l’épidémie » explique Christian Drosten. « Nous sommes peut-être même le pays qui a œuvré le plus généreusement dans les diagnostics ». L’âge moyen de cas infectés en Allemagne se situe actuellement aux alentours de 48 ans versus 63 ans en Italie et 52 ans en Suisse. Ceci s’explique en partie par le fait que les premiers cas infectés en Allemagne furent répertoriés rapidement et concernaient une population relativement jeune. « Beaucoup de skieurs et personnes ayant participé au carnaval en Italie furent les premiers à ramener le virus en Allemagne. Il s’agissait donc d’une population plutôt jeune et en bonne santé ».
Le virologue suppose également que l’explosion massive et soudaine du covid-19 dont fut par exemple victime l’Italie et d’autres pays voisins provient du fait que le virus se propage plus aisément dans les hôpitaux. « Les coronavirus se transmettent davantage par des biais nosocomiaux.» En Italie par exemple, où les diagnostics ont été effectués plus tardivement, les hôpitaux comportaient vraisemblablement déjà beaucoup de cas infectés sans le savoir, ce qui augmenta drastiquement leur taux de mortalité.
Sévérité des restrictions
En Allemagne comme ailleurs, le pays est à l’arrêt, ce qui engendra des conséquences socio-économiques dramatiques. Si les mesures préventives dont se parent actuellement le pays s’avèrent être, a posteriori, trop sévères, les critiques afflueront. « Il n'y a pas de gloire dans la prévention » rappelle Christian Drosten. « Les hôpitaux allemands se préparent et attendent désormais le démarrage de l’épidémie. Dans le fond, tous espèrent que cette vague n’arrivera jamais. Admettons que cette vague ne nous inonde pas ou peu et que nous restons au sec. Naîtra alors le vieil adage qui stipule qu’il n’existe pas de renommée dans la prévention des maladies. Nous ne saurons jamais ce qui a réellement été évité ». En observant les pays voisins, comme l’Italie, la France et l’Espagne, Christian Drosten s’accorde avec la rigidité des mesures qui ont été installées ces dernières semaines en Allemagne : fermetures des écoles, magasins et restaurants, interdiction de rencontres des groupes de plus de 2 personnes. « Mieux vaut tirer le frein fort dès le début quitte à ajuster les mesures dans un deuxième temps » affirme le virologue « Dans les semaines à venir, il faudra aussi nous tourner vers les États-Unis pour voir ce qu'il se passe dans un pays qui est doté d’une performance médicale comparable à la nôtre et dont les mesures ont été prises plus tard ». Selon Christian Dorsten, il serait sage d’attendre le 20 avril avant d’ ajuster les mesures établies. « Le 20 avril devrait être un point clé à partir duquel de nouvelles dispositions pourront être introduites ». Il nous rappelle également que les études épidémiologiques concernant par exemple les effets du confinement et autres restrictions prennent un certain temps à être calculées. Il conclut enfin sur le fait que les décisions politiques ne sont pas du ressort de la science. « Ce n’est pas le rôle de la science de juger si une décision politique est bonne ou erronée. »
Étude munichoise sur le taux d'attaque secondaire du covid-19
Le taux d'attaque secondaire représente le nombre de personnes qu’une personne infectée infecte à son tour. Une étude publiée en ligne le 18 mars 2020 dans Le Lancet comprend l’observation du taux d'attaque secondaire généré par des patients infectés par le covid-19 en janvier et travaillant dans la compagnie munichoise Webasto. Dans la sphère domestique (milieu familiale, collocations) seules 10% des personnes ayant eu des échanges de plus de 15 minutes avec le patient infecté auraient été infectées à leur tour. Dans l’entourage amical et professionnel, seul 5% des personnes ayant entretenu des échanges de plus de 15 minutes avec le patient infecté auraient été infectées à leur tour. Christian Drosten décrit le cas d’une personne qui aurait été infectée dans la cafétéria de la compagnie Webasto. Elle se trouvait dos à dos avec une personne infectée. Aucun échange n’aurait eu lieu excepté le passage du sel du patient infecté au patient non infecté. Ce contact fut responsable de la transmission de la maladie. Dans les jours à venir, Christian Drosten analysera plus en détails les résultats de cette étude en ajoutant les conclusions qu’il conviendrait d'en tirer.
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Update Coronavirus, Episode 22 - lien de l’émission
Il existe plusieurs moyens de dépister le COVID-19. Suivant le stade de la maladie, certains tests n’agissent pas, pas encore ou plus. Quant aux espoirs thérapeutiques du Remdesivir, ils sont bons, mais la substance reste pour le moment, selon Christian Drosten, administrée à un stade trop avancé de la maladie.
Le prélèvement par écouvillonnage de la gorge, peu fiable dans les stades avancés de la maladie
Le Covid-19 se multiplie généralement dans la gorge avant de migrer dans les poumons. Chez certains patients, l’infection débute directement dans les poumons. Dans les cas graves et avancés de la maladie, les poumons s’autodétruisent suite à une réaction immunitaire. Dans ces cas-là, le virus n’est parfois plus du tout présent dans le corps. « Il est important d’informer le personnel hospitalier que les tests diagnostics effectués dans la gorge ne sont pas systématiquement fiables chez les patients dont le virus a déjà migré dans les poumons » affirme Christian Drosten. « Avec un scanner, les cliniciens pourront en revanche détecter la maladie dans les poumons. L’image présente des sortes de taches blanches inégalement réparties qui ressemblent à des nuages. »
Tests sérologiques, inutiles au début de la maladie
Disponibles ou bientôt disponibles sur le marché, les tests sérologiques détectent le niveau d’anticorps présents dans le sang. « Ces tests ne fonctionnent qu’au bout d’une dizaine de jours après le début de la maladie » explique Christian Drosten. « Si vous souhaitez vous faire tester au début de l’infection, le test d’anticorps est inutile ». Selon le virologue, les tests sérologiques ne sont pour l’heure pas encore fiables à 100% ni valides. Il conseille donc d’être prudents avec leur utilisation mais se dit optimiste pour leur validation prochaine dans les semaines à venir, soit « à la fin du printemps ». Ces tests permettront surtout aux gens de savoir s’ils sont immunisés ou non contre le covid-19.
Analyse des selles, efficace mais illusoire à grande échelle
« Un moyen sûr de diagnostiquer le virus est l’analyse des selles » explique Christian Drosten. « Cependant, pour ce faire, les laboratoires doivent changer leur préparation d'échantillons ». Cette procédure, fastidieuse pour les laboratoires, s’avère donc compliquée à grande échelle.
Remdesivir
Le Remdesivir est un antiviral produit par Gilead, une compagnie pharmaceutique américaine. « Il s'agit d'un inhibiteur de l'ARN polymérase virale, l'enzyme de réplication du virus » explique Christian Drosten. « C’est une substance qui nous est connue depuis un certain temps et nous savons qu’elle fonctionne contre le coronavirus en culture cellulaire et chez certains modèles animaux. » Le virologue se montre très optimiste dans l’efficacité de cet antiviral originellement développé pour soigner Ebola. Le problème de cette substance est qu’elle n’a pas encore été cliniquement approuvée pour être commercialisée. « Le Remdesivir s’accompagne d’un protocole d’utilisation compassionnelle (groupe de malade donné) » explique Christian Drosten. « Son utilisation est donc permise dans une phase de la maladie où le patient a déjà besoin d’oxygène, mais pas encore de catécholamine, c’est-à-dire de médicaments circulatoires ».
En d’autres termes, le Remdesivir n’est pour l’heure utilisé que chez des patients qui se trouvent dans la phase qui précède les soins intensifs. Or, selon Drosten, pour prouver son efficacité, le Remdesivir devrait être administré dans des phases plus précoces de la maladie. « Le virus attaque les voies respiratoires au cours de la première semaine de maladie. Dans la seconde semaine de maladie, nous assistons déjà à une combinaison d'effets immunitaires et d'effets viraux sur les poumons. » Pour le virologue, il convient donc d’agir avant le déclenchement d’une réaction immunitaire dans les poumons. Sur les 3000 substances testées en culture cellulaire contre le Covid-19, le Remdesivir est la substance où le virus s’est le moins répliqué. « Pourquoi ? Je ne le sais pas encore » concède cependant Christian Drosten.
Effets anti-inflammatoires de la chloroquine
Malgré l’emballement actuel pour la chloroquine, Christian Drosten se montre sceptique face à l’efficacité de ce médicament antipaludique. Comme discuté dans ses précédents podcasts, l’étude marseillaise portant sur la chloroquine s’accompagne de nombreux angles morts. Son scepticisme provient donc d’une part de la façon dont les études ont été menées. De l’autre, du fait qu’en culture cellulaire, les doses de chloroquine nécessaires à tuer le covid-19 sont énormes. Ce que le virologue remarque cependant c’est que « la chloroquine a une très forte influence sur l’inflammation et de manière générale sur les processus inflammatoires ». La chloroquine pourrait donc jouer un rôle sur les lésions pulmonaires dont certaines sont déjà l’effet d’une réaction immunitaire. À nouveau Christian Drosten n’exclut pas l’efficacité de la chloroquine, mais se contente simplement de souligner les preuves insuffisantes ou biaisées qui accompagnent les études la concernant.
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Update Coronavirus, Episode 19 - lien de l’émission
Distance de contamination
Nombreux s’inquiètent des possibilités de contracter le virus en faisant par exemple du jogging dans le parc ou en dépassant un piéton sur le trottoir. Christian Drosten nous rappelle qu’à l’air libre, les particules virales se diluent davantage qu’à l’intérieur. Le vent aide également à l’affaiblissement de la charge virale. « C’est surtout dans des pièces fermées qu’il faut être attentif aux processus de transmission » déclare-t-il.
Le port du masque pour tous
Sur le port des masques pour tous, Christian Drosten se montre partagé. Dans le meilleur des mondes, ce serait évidemment l’idéal : que nous adoptions les mesures chinoises et que tout un chacun se munisse d’un masque à l’extérieur de chez lui. Avec la pénurie des masques que nous subissons actuellement en Europe, il convient surtout de s’assurer que le personnel soignant puisse s’en pourvoir. « Il existe des données qui montrent que ces transmissions de maladies des voies respiratoires sont réduites par les masques » explique Christian Drosten pour qui le masque aide davantage à réduire la propagation du patient infecté qu’à nous protéger des infections des autres. « Le masque doit être à la source et non au récepteur » Il ajoute en effet qu’il n’y a « tout simplement aucune preuve dans la littérature » que les masques peuvent nous protéger de la contamination des autres. Il se réfère ici aux masques en tissu simple. Ceux dont l’air, et par conséquent les particules virales, peuvent s’infiltrer sur les côtés. Christian Drosten souligne que la pénurie des masques n’est la faute de personne. « Nous nous trouvons dans une situation totalement imprévue qui ne s’est produite qu’une fois ». Selon lui, nous pouvons aussi nous munir d’un foulard lorsque nous sortons faire les courses. Ce qui compte pour lui est d’éviter à tout prix la concurrence sur le marché. Les masques que nous portons à l’extérieur ne devraient pas être les mêmes que ceux utilisés et requis dans les hôpitaux.
Alternatives aux masques
« Les masques peuvent être recyclés » affirme Christian Drosten. « Vous pouvez par exemple mettre vos tissus au four à 70 degrés jusqu’à ce qu’ils soient secs. Les virus meurent généralement au-dessus de 70 degrés. » Le virologue est également faveur de la confection maison de ses propres masques et de l'utilisation des écharpes ou foulards. « À partir du moment où nous ne sommes que très peu en public, porter des masques lorsque nous sortons s’apparente à un geste, un signal et une courtoisie » conclut-il.
Les enfants pourraient contribuer à l’immunité collective du Sars-CoV-2
La Sars-Cov-2 semble épargner une grande majorité des enfants qui présentent peu, voire aucun symptôme. La question qui se pose est de savoir si les enfants seraient par définition épargnés du SARs-CoV-2 donc « pas infectés du tout » ou s’ils seraient au contraire des sujets qui s’immunisent rapidement contre le virus. Dans ce deuxième cas, cela signifierait que la population infantile jouerait un rôle important dans l’immunité collective du Sars-Cov. « À un moment donné, nous devrons tous être immunisés » explique Christian Drosten. Cette immunité collective s’obtiendra une fois que 60 à 70 % de la population aura été infectée. « Il se pourrait donc qu'une partie considérable de ces 70 pour cent soient les enfants » D’après quelques faits relégués dans la littérature, les enfants de Wuhan auraient été infectés en plus grand nombre bien avant la population adulte. Cette hypothèse impliquerait que les enfants pourraient contribuer à assurer l’immunité collective nécessaire à mettre fin à l’épidémie.
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Jeudi 19 mars - lien de l’émission
Étude marseillaise sur la chloroquine, jugée problématique
La chloroquine est une substance antipaludique bien connue qui n’est pas exempte d’effets secondaires. Son efficacité contre l’ancien SARS a été prouvée en culture cellulaire, mais pas chez l’homme. « Le métabolisme d’une cellule infectée du corps humain fonctionne différemment de celui que l’on observe dans un disque de culture cellulaire » précise Christian Drosten. Pour atteindre les poumons, le médicament doit traverser plusieurs étapes et barrières dont celui du système intestinal et sanguin. La question du dosage (qui semble conséquent) de chloroquine qu’il faudrait ingurgiter pour atteindre les poumons n’a pas non plus été élucidée au cours de l’étude. En laboratoire, du moins sur l’ancien SARS, les doses de chloroquine requises pour être efficaces étaient énormes. De plus, outre le fait que l’étude ne soit pas randomisée et portait sur un nombre restreint de patients, le virologue nous rappelle que la majeure partie des infections au covid-19 se résorbent par elle-même. Il est dès lors difficile de déterminer quels patients soignés par la chloroquine auraient vu leurs symptômes disparaître par eux-mêmes, indépendamment d’un traitement. En abordant divers autres aspects de l’étude (mesure virale, répartition des cas asymptomatiques dans les deux groupes, âges) le virologue explique les raisons pour lesquelles les résultats de cette étude lui paraissent finalement relativement banals. « Le plus grand défaut de l’étude » conclut-il « est que le virus n’a pas été mesuré dans les poumons, mais dans la gorge ». Or, les cas sévères de covid-19 affectent particulièrement les poumons. La chloroquine est assurément à étudier davantage, car c’est une substance disponible et que nous savons produire. Mais le virologue précise : « malheureusement, dans la recherche clinique, la vérité émane fréquemment dans un deuxième voire troisième temps. Il faut donc ici être prudent. »
Isolation des plus de 65 ans, une mesure peu efficace
En se référant à la grande étude de modélisation menée par l’impérial College de Londres, Christian Drosten affirme qu’il « n’y aurait pratiquement rien à gagner dans la mise en isolation des groupes à risque ». Les capacités de ventilation nécessaires à gérer la situation ne diminueraient aucunement. « Nous ne pouvons isoler le monde en détail » affirme-t-il. « L’ensemble de la société doit fournir un effort commun pour réduire le nombre d’infections dans la population ». Le virologue revient ensuite sur l’utilité de la distanciation sociale qu’il juge présentement indispensable.
Sur le confinement obligatoire
En Allemagne, comme en Suisse, le confinement n’est pas encore obligatoire. « Il n’y a bien sûr aucune donnée scientifique indiquant la nécessité de cette mesure » explique Christian Drosten. « Les pays voisins qui l’ont appliqué ont vraisemblablement agit sous une impulsion émotionnelle générée par le grand nombre de personnes décédées. » Selon le virologue, le confinement obligatoire sert surtout à faire comprendre à la population que la situation est à prendre au sérieux. Il suppose que le confinement obligatoire de la population allemande sera décidé suivant la façon dont les gens se comportent durant le week-end. « Nous ne pouvons qu'espérer que notre société soit suffisamment mûre et raisonnable - également assez altruiste - pour montrer clairement que cette distanciation sociale protège et vise en fin de compte les plus faibles de la société. »
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Mercredi 18 mars - lien de l’émission
Exagération autour des décès dus au coronavirus ?
Christian Drosten récuse les propos du pneumologue et politicien allemand Wolfgang Wodarg qui avance l’exagération des effets du covid-19. Selon ce dernier, les virus « corona » existent depuis longtemps chez l’homme et, si les tests actuels n’étaient pas faits, les décès liés au nouveau coronavirus se seraient fondus dans les statistiques. « Il est vrai qu’il existe quatre autres types de virus corona connus de l’homme » confirme Christian Drosten. « Mais il s’agit de virus endémiques qui n’ont rien à avoir avec le nouveau coronavirus qui nous apparaît sous forme de pandémie. » Pour lui, les décès liés au covid-19 sont en effet, pour le moment, négligeables par rapport à la mortalité globale de la population, mais cela ne saurait durer. « Nous sommes sur le flanc ascendant de la cinétique de croissance exponentielle » précise le virologue. « Si nous n’agissons pas maintenant et de façon radicale, l’ascension continuera de croître et nous aurons de sérieux problèmes à partir de juin et juillet. L’effet sur la létalité deviendra plus visible, nous le verrons non seulement dans les statistiques, mais également dans les hôpitaux où les patients ne pourront plus être traités et mourront sur place. »
Étude de modélisation de l’Imperial College de Londres
Le 16 mars, L’Imperial College de Londres a publié une étude de modélisation estimant les menaces futures du covid-19. Les pronostics sont très sombres. À partir de 60 ans, l’étude prévoit qu’une personne sur quatre nécessitera des soins intensifs. Christian Drosten nous rend attentif à l’inexactitude qu’accompagne fréquemment les études de modélisations. Il se réfère par exemple aux études pronostiques réalisées sur la vache folle qui s’avérèrent par la suite insidieuses. « Le problème avec les modélisations c’est que certains des chiffres utilisés sont spéculatifs, ce qui crée par la suite des torsions importantes. » Les chiffres utilisés pour l’étude en question apparaissent néanmoins tout à fait plausibles pour le virologue.
Scénario « on-off »
Une des hypothèses qui ressort de l’étude menée par L’Imperial College de Londres serait d’adopter un mécanisme on-off. Fermeture et retrait de la vie sociale pendant quelques mois, retour à la vie normale jusqu’au retour de l’épidémie, nouveau retrait et ainsi de suite. Pour Christian Drosten, ce scénario ne serait pas viable. La seule solution pour gérer cette crise serait pour lui de trouver le plus rapidement possible un vaccin.
Pour un assouplissement de la réglementation sur les vaccins
Christian Drosten conclut l’émission en affirmant qu’il ne voit tout simplement pas d’autre alternative que de développer le plus rapidement possible un vaccin. « Nous n'avons bien sûr pas besoin de fournir quoi que ce soit à l'ensemble de la population, mais au moins aux groupes à risque et en particulier aux personnes âgées, pour lesquelles il faut faire quelque chose maintenant... Il faudra donc vraisemblablement passer outre les questions réglementaires concernant les vaccins » poursuit-il. Pour cela, il faudrait éventuellement que l’État prenne le risque d’être tenu responsable des possibles effets nocifs que ce vaccin pourrait engendrer. Pour le virologue, il s’agit là de décisions extrêmement délicates mais nécessaires pour confronter la situation actuelle. « Si nous croyons les chiffres émis par les calculs de modélisation, nous n’avons d’autre choix que de penser à des options inhabituelles ».
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Mardi 17 mars - Lien de l’émission
Immunité du covid-19 : Peut-on être infecté plusieurs fois ?
Des cas de patients atteints deux fois par le COVID_19 ont été mentionnés dans la littérature et la presse. Selon une étude menée par l’Académie chinoise de médecine sur des macaques rhésus, il existerait une réponse immunitaire claire face au Covid-19. Quatre singes ont été infectés par le covid-19. L’un a été disséqué pour observer l’état de ses poumons. Quatre semaines après la disparition des symptômes, les trois singes restants ont été infectés à nouveau par des doses puissantes du virus. Tous ont résisté à l’infection. Christian Drosten rappelle qu’il ne s’agit ici que d’une petite étude menée sur des singes mais il estime néanmoins les résultats optimistes. « Nous partageons avec les singes rhésus une immunité très similaire » explique-t-il, « Une hypothèse de travail serait donc de suggérer qu’une immunité contre la pandémie se produira graduellement et naturellement au sein de la population, du moins pour une durée limitée. » Concernant les cas infectés à plusieurs reprises, il ne s’agirait peut-être que de patients ayant été mal diagnostiqués ou non guéris.
Symptômes sévères chez des patients jeunes
Le cas de jeunes patients développant des symptômes sévères du Covid-19 semblent accroître, notamment en Italie. Selon Christian Drosten il pourrait s’agir de patients dont les poumons seraient directement infectés par le virus. Il semblerait que le COVID-19 infecte la plupart des patients dans la gorge avant de descendre dans les poumons. Restant une semaine au niveau de la gorge, le corps se munit d’anticorps lui servant par la suite à combattre l’infection pulmonaire. « La séroconversion, terme technique désignant le développement des anticorps, se produit à la fin de la première semaine » explique Christian Drosten. « C’est une réponse rapide et donc réjouissante. Ceci ne reste qu’une hypothèse, mais il se pourrait que certains patients contractent l’infection directement dans leurs poumons. Nous assistons dès lors aux symptômes les plus graves du virus qui sont similaires à ceux générés par le SRAS d’origine ».
Espoir d’un vaccin basé sur des anticorps monoclonaux produits via le SRAS d’origine
Une étude du groupe de Berend Jon Bosh d’Utrecht (Pays-Bas) ayant conservé des anticorps produits via le SRAS il y a 17 ans en arrière ont effectué des tests sur le Covid-19. L’un des anticorps conservés neutraliserait effectivement le covid-19. « Il est possible de reproduire ces anticorps par la bio-technologie et d’en administrer une concentration élevée dans le muscle du patient » explique Christian Drosten. Ce vaccin « passif » pourrait être administré également pendant la maladie permettant au patient de guérir rapidement. Concernant la durée que prendrait le vaccin à être produit et mis sur le marché, le virologue ne préfère pas se prononcer, cela dépendant également de la « discussion politique ».
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Lundi 16 mars - Lien de l’émission
Durée de vie du covid-19 sur des surfaces inertes
Au sujet de la durée de vie du covid-19 sur des surfaces comme le papier et les poignées de porte, Christian Drosten nous met en garde sur toute conclusion hâtive et simpliste. Il a en effet été prouvé que le Covid-19 pouvait rester actif pendant 48 heures sur du papier et jusqu'à 3 jours sur des plastiques et l’acier, mais «il difficile d’appliquer ces données à la pratique», admet-il. Les études ont été effectuées avec des quantités importantes de solution virale qui ont ensuite été prélevées et mises en culture. «La solution de départ comprenait environ 10'000 unités infectieuses, précise le virologue. A la fin, il ne restait plus que 10 unités infectieuses, ce qui est très peu. La question est donc de savoir si du liquide infectieux reste sur votre doigt quand vous le mettez dans la bouche, sachant que la peau est une surface acide.»
Christian Drosten rappelle également que la puissance de transmission des virus dans l’air ou sur des surfaces est liée à sa concentration de départ. Les gouttes de liquide infectieux qu’une personne émet, par exemple en parlant ou en touchant une poignée de porte, ont de fortes chances de sécher beaucoup plus rapidement dans la vraie vie que lors d’une étude menée en laboratoire. Les gouttes sèchent également plus rapidement dans l’air que dans une solution liquide. Tout est une question de concentration. Selon le spécialiste, le Covid-19 resterait entre 10 et 20 minutes dans l’air avant de retomber sur le sol.
Distance spatiale recommandée
Christian Drosten dit ne pas pouvoir se prononcer sur l’exactitude de la distance à adopter. La transmission du virus dépendant de sa concentration, qui augmente avec la durée de l’exposition, il recommande à chacun d’éviter dans la mesure du possible les lieux d’affluence. «Si vous conversez brièvement avec quelqu'un sans respecter la distance de deux mètres, c’est moins grave que de se tenir longtemps mais plus éloignée d’une personne infectée», précise-t-il.
L’Ibuprofène aggrave les symptômes du coronavirus
Les études accusant l'ibuprofène d'aggraver les symptômes du Covid-19 proviennent de «sources douteuses», affirme Christian Drosten. Le virologue ne contredit en revanche pas la possibilité que ce lien puisse s’avérer effectif. Il souligne simplement que pour l’heure, le Covid-19 est un virus nouveau pour tout le monde, que les connaissances à son sujet restent extrêmement limitées, et qu’il nous faudra encore beaucoup de temps et d’études pour affirmer avec certitude la façon dont il se comporte.
La fin de l’épidémie en Chine?
Sur la Chine, ses mesures et la stabilisation de ses cas infectés, Drosten déclare ne pas être en mesure de commenter la situation. «Je pense que peu peuvent le faire, ajoute-t-il. Mais nous pouvons soupçonner qu’il existe en Chine une volonté de ne plus avoir de cas». Il juge également inquiétante la décision de mettre les gens qui reviennent d’Europe en Chine en quarantaine. «Il y a certainement un message qu’on souhaite faire passer avec une telle mesure.»
Eviter les blâmes
Christian Drosten insiste à nouveau sur le fait que personne n’était préparé au Covid-19 et que mettre la faute sur les politiques ou sur telle ou telle décision sanitaire est non seulement une perte d’énergie, mais ne contribue de plus qu’à envenimer la situation. «Ce n’est pas le moment d’émettre des accusations et de vouloir faire porter la responsabilité à autrui. L’enjeu pour l’heure est de s’informer et de comprendre le mieux possible ce nouveau virus que personne ne connaît afin de pouvoir s’orienter de la meilleure façon possible.»
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* Christian Drosten dirige le Département de virologie des Hôpitaux universitaires de la Charité, à Berlin. Connu de la communauté médicale pour ses travaux sur le SARS en 2003, il est également l’un des co-créateurs du premier test de diagnostic du Covid-19 établi fin janvier 2020. Depuis le 26 février 2020, il commente chaque jour de la semaine l’évolution de la situation sur la radio allemande Norddeutscher Rundfunk (NDR). Âgé de 48 ans, consultant au Bundestag, siégeant aux côtés du ministre allemand de la santé Jens Spahn, Christian Drosten est devenu, en moins de deux semaines, l’une des figures les plus médiatisées et référencées d’Allemagne.