Pourra-t-on un jour dépister la maladie d’Alzheimer?
C’est le plus connu et le plus fréquent des troubles neurocognitifs majeurs, comme on nomme aujourd’hui les démences. La maladie d’Alzheimer est une pathologie neurodégénérative qui affecte surtout les personnes âgées, mais dont certaines formes peuvent toucher les plus jeunes.
Elle est due à l’agrégation, dans le cerveau, de deux protéines anormales. D’une part, les protéines béta-amyloïdes qui changent de forme et créent des plaques dites amyloïdes entre les neurones. De l’autre, les protéines tau qui se désagrègent et constituent des enchevêtrements de filaments. Il en résulte une dégénérescence et la mort des cellules nerveuses, notamment dans l’hippocampe, l’une des principales régions de la mémoire.
On estime que 144’000 Suisses seraient atteints de la maladie d’Alzheimer. Il y en a probablement plus, car de nombreuses personnes ne sont pas diagnostiquées. Or, s’il est impossible de guérir ou de stopper cette maladie, on dispose malgré tout de traitements susceptibles de traiter les symptômes –même si leur efficacité est modeste. Il est surtout possible d’offrir «une prise en charge psycho-sociale qui permet d’entourer et d’aider le malade et ses proches», souligne Olivier Rouaud, adjoint à la direction du Centre Leenaards de la Mémoire du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Tester la mémoire
Il existe différents moyens de diagnostiquer la maladie à un stade précoce, c’est-à-dire dès que les premiers symptômes apparaissent. D’abord des tests neuropsychologiques, qui permettent «d’identifier le type de mémoire qui est concerné et de savoir s’il s’agit d’un problème d’encodage, de stockage ou de récupération des informations», explique le neurologue.
Pour confirmer les suspicions, on a recours ensuite à l’imagerie cérébrale: le scanner, mais surtout l’IRM, «qui permet de rechercher une diminution du volume de certaines régions cérébrales». On peut aussi observer le dysfonctionnement du métabolisme du cerveau à l’aide du PET-scan. Cette technique utilise du glucose qui se fixe aux neurones et les colore, ce qui permet d’évaluer leur activité.
Ces méthodes donnent de bonnes indications, mais elles ne permettent pas de conclure à coup sûr qu’il s’agit d’une maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi, «pour augmenter le niveau de preuve, on fait appel à des méthodes biologiques», précise Olivier Rouaud. Elles consistent à repérer, dans le liquide céphalo-rachidien (qui entoure le cerveau et la moelle épinière), des produits issus de la dégradation des plaques amyloïdes et des protéines tau –ce que l’on nomme des biomarqueurs.
Toutes ces techniques, dont certaines sont sophistiquées et coûteuses, sont utilisées en pratique clinique dans certaines situations particulières. Elles sont surtout très utiles pour les essais cliniques de médicaments spécifiques potentiels. «Si l’on cherche à vérifier qu’un produit pharmacologique bloque une protéine anormale, il faut s’assurer que celle-ci est bien présente dans le cerveau, souligne le médecin du CHUV. On ne peut pas raisonner uniquement sur le symptôme».
Une maladie chronique
L’idéal serait de pouvoir diagnostiquer la maladie bien en amont, afin de prévenir son évolution et de différer autant que possible ses manifestations. C’est très difficile, car les plaques amyloïdes «commencent à se développer 15 ou 20 ans avant que les premiers symptômes apparaissent, précise le neurologue. La maladie d’Alzheimer est en fait une pathologie chronique qui démarre entre 55-65 ans et qui progresse ensuite». En outre, avant de pouvoir envisager un dépistage, il faudra «disposer de tests fiables, non invasifs et peu coûteux et d’un traitement curatif».
On en est loin, mais la recherche se poursuit tous azimuts. Dans le domaine du diagnostic, l’objectif est de trouver des biomarqueurs sanguins qui permettraient, en complément du PET-scan, de dépister la maladie à l’aide d’une simple prise de sang, ou encore le moyen de «visualiser des dépôts de plaques amyloïdes grâce à un examen de la rétine».
Du côté des traitements, on envisage déjà le recours à l’immunothérapie (qui permettrait au système immunitaire de lutter contre les protéines anormales) ou «à des enzymes qui scinderaient les plaques amyloïdes toxiques». Divers essais cliniques ont déjà été lancés aux Etats-Unis dans les domaines préventif et curatif. «C’est une source potentielle d’espoir», selon Olivier Rouaud.
Se préserver d’Alzheimer
Certaines personnes ont des facteurs génétiques qui augmentent leur risque de souffrir de la maladie d’Alzheimer. Contre cela, on ne peut rien. Il existe en revanche des facteurs de risque liés à l’environnement et au mode de vie sur lesquels on peut agir pour se protéger contre cette forme de démence. «En agissant tout au long de sa vie sur ces facteurs modifiables, on pourrait réduire de 35% le risque de développer la maladie», selon Olivier Rouaud, neurologue au Centre Leenaards de la Mémoire du CHUV.
Il s’agit de se préserver des maladies cardiovasculaires, puisque tout ce qui est bon pour le cœur est bon aussi pour le cerveau. En d’autres termes, bannir le tabac, faire de l’exercice physique, manger équilibré, lutter aussi contre l’hypertension et le surpoids. Il faut par ailleurs traiter la dépression et les états anxieux.
Le niveau d’éducation protège aussi contre les effets délétères de la maladie d’Alzheimer. L’instruction augmente en effet la «réserve cognitive», c’est-à-dire le nombre de connexions qui s’établissent entre les neurones. Plus on en a créées au cours de sa vie, moins on sera affecté par la perte de quelques neurones. D’où l’importance de stimuler sans cesse son cerveau et de l’entretenir par l’intermédiaire des relations sociales et des activités cognitives qui suscitent intérêt et plaisir.
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La maladie d'Alzheimer est une dégénérescence du cerveau qui atteint surtout les personnes âgées, et qui a de nombreuses répercussions sur la vie quotidienne.