Régime «low carb»: que penser de l’alimentation cétogène?
Le conseil
«Notre organisme a besoin d’une vaste palette de vitamines, fibres et minéraux. En cas de régime, il est impératif de conserver ces apports essentiels», prévient la Dre Stéphanie Vergotte, médecin nutritionniste au Centre de l'obésité et du métabolisme de la Côte et à l’hôpital de La Tour. Et d’ajouter: «Pour rester en bonne santé, l’alimentation ne fait pas tout. Il faut veiller à avoir une hygiène de vie globale, qui comprend aussi activité physique et bien-être mental!»
Une assiette classique contient en moyenne 50 % de glucides, 35 % de graisses et 15 % de protéines. Le régime low carb propose d’inverser totalement ces ratios pour diminuer drastiquement le taux de sucre ingurgité et le contrebalancer par un apport élevé en graisses. Car contrairement à ce que l’on pourrait croire, le gras ne fait pas forcément grossir. Et cela grâce à un phénomène appelé cétose. D’où l’autre nom utilisé pour désigner ce type de régime: le régime cétogène.
«Low carb est le terme générique pour parler des régimes qui proposent de diminuer l’apport en glucides, explique la Dre Stéphanie Vergotte, médecin nutritionniste au Centre de l'obésité et du métabolisme de la Côte et à l’hôpital de La Tour. Le régime cétogène se caractérise par une définition précise de ces apports»: 65 à 80 % de graisses, 15 à 30 % de protéines et 5 à 6 % de glucides (entre 20 et 50 grammes), voilà la règle à respecter si vous décidez d’entreprendre une diète cétogène. L’assiette «type» sera alors composée essentiellement de fromages, huiles, oléagineux… En revanche, exit le pain, les féculents et tous les sucres transformés.
Dit comme ça, les choses n’ont pas l’air très compliquées, mais en réalité, le premier inconvénient de ce régime est qu’il est très contraignant. «Difficile de se priver de certaines catégories d’aliments comme les féculents ou les sucreries sur le long terme, explique le Dr François Jornayvaz, médecin adjoint agrégé, responsable de l'Unité de diabétologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). L’aspect très restrictif de ce régime amène la majorité des gens qui l’entreprennent à revenir à une alimentation classique au bout de quelques semaines.»
Comment ça marche?
L’un des attraits pour le régime cétogène est son efficacité rapide – à condition de le suivre drastiquement – sur la perte de poids. Et cela s’explique de façon tout à fait physiologique. L’organisme, et en particulier le cerveau, a besoin d’hydrates de carbone (glucides) pour fonctionner. S’il en est privé, il se produit un mécanisme de cétose: les acides gras génèrent des corps cétoniques, qui deviennent alors la principale source d’énergie. L’organisme va donc devoir puiser dans ses réserves de graisses, ce qui favorise la perte de poids. «Le corps entre en cétose au bout de 2-3 jours environ, explique le Dr François Jornayvaz. Rapidement, en puisant dans les graisses, les organes vont ainsi "détruire" le tissu adipeux.»
Un mécanisme qui participe à l’amincissement, mais pas seulement. De nombreux sportifs se tournent aujourd’hui vers cette alimentation, convaincus de son impact sur leurs performances énergétiques, la récupération, l’endurance ou le souffle durant l’effort. Mais les études sur ce sujet restent contradictoires et il est encore difficile d’en tirer des conclusions unanimes. «Une mauvaise répartition des calories dans l’assiette risque également d’avoir des effets délétères, ajoute la Dre Vergotte. Si les protéines apportées ne sont pas suffisantes, la masse musculaire sera impactée.»
Pas pour tout le monde
De par sa rigueur, le régime cétogène n’est donc pas à entreprendre à la légère, afin d’éviter toute altération de la santé ou des effets secondaires. Dans les aliments qui contiennent des glucides, se trouvent aussi d’autres nutriments essentiels. S’en priver peut donc mener à des carences qu’il faudra éviter en conservant un apport suffisant en fibres et vitamines et éventuellement une supplémentation vitaminique.
Enfin, plus spécifiquement, la diète cétogène est contre-indiquée chez les diabétiques de type 1 et chez les personnes atteintes d’insuffisance hépatocellulaire ou de certaines maladies métaboliques. Dans tous les cas, il est fortement recommandé de demander conseil à un médecin avant d’entreprendre un régime alimentaire restrictif en général ou un régime cétogène en particulier.
Le régime cétogène a-t-il des vertus thérapeutiques?
Si cela reste encore à démontrer formellement, une alimentation pauvre en glucides serait intéressante dans le traitement de certaines maladies. Dans les années 1920, elle a permis d’obtenir de bons résultats – parfois plus probants que la médication – chez des enfants épileptiques. Des chercheurs s’intéressent également aux effets positifs du régime cétogène sur le cancer. En effet, les cellules cancéreuses se nourrissant de sucre, limiter l’apport en glucides permettrait de ralentir le développement des tumeurs.
De la même façon, les cellules cérébrales profiteraient de cette source d’énergie alternative qu’est la cétose. Un fonctionnement qui serait bénéfique dans le cas de certaines maladies dégénératives comme la maladie d’Alzheimer ou dans le traitement des céphalées et migraines. Mais pour l’instant, «aucune étude scientifique probante n’a mis en évidence un effet bénéfique à long terme de la diète cétogène sur ces pathologies», rappelle le Dr François Jornayvaz, médecin adjoint agrégé responsable de l'Unité de diabétologie des HUG.
Pour aller plus loin
J’ai envie de comprendre… Mon alimentation et ses effets, de Sophie Davaris et Jacques Philippe, Ed. Planète Santé, 2019.
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Paru dans Générations, Hors-série « Se soigner autrement – Gros plan sur la médecine intégrative », Octobre 2019.