Le café, bon pour la santé?
Le café cache bien son jeu. Dans une des dernières études médicales qui lui a été consacrée, il s’avère que les consommateurs réguliers de café présentent un risque relatif de décès plus élevé que les autres. Dire cela, cependant, c’est faire fi du fait que les amateurs de petit noir, en moyenne, fument plus, consomment plus d’alcool, de calories et de viande rouge et s’adonnent à moins d’exercice physique que le reste de la population. Tenant compte de tous ces biais, les auteurs de l’étude, parue dans la revue New England Journal of Medecine du 17 mai 2012, ont pu isoler l’effet propre du café. Et le résultat de l’observation est tout autre. La mortalité diminuerait d’environ 10% chez les hommes et d’environ 15% chez les femmes au-delà de deux ou trois tasses par jour. La boisson chaude, qu’elle soit avec ou sans caféine, offre même une protection contre toutes les causes de décès sauf le cancer, contre lequel il est neutre.
Menée aux Etats-Unis entre 1995 et 2008, l’étude en question a suivi 230000 hommes et 173000 femmes âgés de 50 à 71 ans. «On n’a jamais vu une cohorte aussi grande mobilisée pour un tel sujet, commente Thomas Perneger, responsable du Service d’épidémiologie clinique aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Bien qu’il soit solide, ce travail est de nature observationnelle. Il ne fournit donc pas la preuve formelle d’une relation causale entre la consommation de café et une diminution de la mortalité. On ne peut parler pour l’instant que d’association entre les deux.»
Du café sous prescription?
Par conséquent, le médecin genevois n’ira pas jusqu’à conseiller à ses patients de commencer à boire du café. Mais au moins, voilà une habitude, estime-t-il, dont il ne devra plus se préoccuper lors de ses consultations.
Même son de cloche du côté de la psychiatrie. Une très vaste étude d’observation a scruté le lien pouvant exister entre le café et l’apparition de la dépression. Plus de 50000 femmes issues de la Nurses’ Health Study aux Etats-Unis (l’une des plus grandes et plus anciennes investigations sur la santé féminine du monde) y ont participé entre 1996 et 2006. Parue dans la revue Archives of Internal Medecine du 26 septembre 2011, l’étude a conclu à une diminution significative de l’apparition d’épisodes dépressifs proportionnelle à la dose de café ingurgitée.
«C’est un résultat important et encourageant mais la Nurses’ Health Study n’a pas été conçue pour reconnaître les personnes souffrant de troubles anxieux ou de troubles du sommeil, note Denis Rentsch, chef de clinique au Service d’accueil et d’urgences psychiatriques des HUG. Du coup, on ne peut pas exclure qu’à la place d’une diminution de la dépression chez les consommateurs de café, on ait au contraire découvert une augmentation de cette affection chez les abstinents. Ces derniers sont en effet plus susceptibles de compter dans leurs rangs des personnes qui renoncent au petit noir justement parce qu’ils craignent que cette boisson les empêche de dormir ou les rende anxieux. Et il se pourrait que la dépression soit plus fréquente dans cette catégorie de la population.»
Dans le cas où ce biais pourrait malgré tout être exclu, le médecin estime qu’il faudrait convaincre 1500 abstinents de boire trois tasses de café par jour pendant une année dans le but d’éviter un épisode dépressif au cours du même laps de temps. Autant dire qu’une telle mesure serait inefficiente, du point de vue de la santé publique.
Le café protège le foie
Dans un article paru dans l’European Journal of Gastroenterology & Hepatology en novembre 2010, il apparaît finalement que le café serait aussi un puissant protecteur contre les maladies du foie. L’article de revue, qui propose une synthèse de toute la littérature scientifique publiée sur ce sujet, montre ainsi que chez les alcooliques, la consommation de plus de quatre tasses semble jouer un rôle protecteur contre la cirrhose du foie. Chez les patients non dépendants à l’alcool, on retrouve une tendance similaire bien que les résultats ne soient pas statistiquement significatifs.
«Sur le foie, plus la dose de café est importante, plus l’effet est marqué»
De la même manière, nombre d’études ont montré qu’il existe une corrélation inverse entre la consommation de café et, d’une part, le développement du cancer du foie et, de l’autre, le nombre de décompensations hépatiques lors des infections virales de l’organe.
«Là encore, il s’agit à chaque fois de relations de corrélation et non de causalité, précise Thierry Favrod-Coune, chef de clinique à l’Unité des dépendances en médecine de premier recours des HUG. On ne peut exclure des explications alternatives. Cela dit, plusieurs éléments parlent malgré tout en faveur d’une relation causale: les études sont concordantes entre elles, le nombre de sujets enrôlés est grand, les populations étudiées sont hétéroclites et, argument particulièrement convaincant, plus la dose de café est importante, plus l’effet est marqué.»
Bref, il n’existe plus aucune raison de renoncer à son café!
Plus de mille composants chimiques
La consommation de café est associée à un grand nombre d’effets bénéfiques sur la santé. Mais selon quel mécanisme? Cela reste un mystère. Toutefois, une chose est sûre: la caféine, dont les effets stimulants sont bien connus, n’est pas la seule responsable. En effet, les bénéfices mesurés sur la mortalité en général sont indépendants de la présence ou non de caféine. Ce, à l’exception des décès causés par accident et pour lesquels le café décaféiné n’offre, sans surprise, aucune protection contrairement au café normal. De plus, les avantages sur les maladies du foie (cirrhose, cancer ou infection virale) par exemple disparaissent si on remplace le café par du thé, alors que théine et caféine désignent en réalité une seule et même molécule.
L’explication se cache donc probablement dans les plus de mille composants chimiques que compte le café et parmi lesquels se cachent des dizaines de principes bioactifs. Entre autres, on peut citer le cafestol (une molécule qui semble augmenter légèrement le taux de cholestérol dans le sang mais qui est arrêtée par les filtres en papier), le kahweol (une substance présente dans l’arabica aux multiples vertus), l’acide chlorogénique et toute une armée d’antioxydants (polyphénols, catéchines et autres flavonoïdes).
Les effets du café sur notre organisme
Ses bienfaits
- Augmentation de la vigilance, de la concentration et de la mémorisation, particulièrement chez les personnes fatiguées
- Diminution de l’apparition d’épisodes dépressifs
- Diminution de la mortalité toutes causes confondues à l’exception du cancer
- Effet bénéfique sur l’apparition du cancer de l’endomètre et du foie. Toutefois, le café n’a pas d’influence sur la mortalité due aux cancers de manière générale
- Baisse du risque d’infarctus du myocarde chez la personne saine ou les patients dont la maladie s’est stabilisée
- Effet protecteur contre la cirrhose du foie chez les alcoolodépendants
- Diminution de la résistance à l’insuline et baisse de l’incidence du diabète de type II
- Diminution de la survenue de la maladie de Parkinson
- Baisse du risque de développer la maladie d’Alzheimer
- Diminution du risque de développer la goutte
Ses effets indésirables
- Insomnies, angoisses, attaques de panique chez les sujets prédisposés ou souffrant déjà de troubles psychiatriques
- Effet de tolérance et sevrage chez un tiers des consommateurs, sans qu’il y ait un véritable effet de dépendance
- L’effet stimulant de la caféine risque de faciliter un infarctus du myocarde chez les personnes susceptibles ou chez les patients où la maladie ne s’est pas encore stabilisée
- Augmentation du risque d’ostéoporose chez les femmes dites «à risque» (plus de 65 ans et un apport faible en calcium)
- Les «excès» de café durant la grossesse pourraient provoquer des fausses couches ou l’apparition de tumeurs au cerveau chez le nouveau né. En règle générale, toutefois, les femmes enceintes ressentent une sorte d’aversion pour le café
D’autres plaisirs inoffensifs
Une opinion assez répandue veut que les petits plaisirs du quotidien finissent tous un jour par coûter cher à la santé. Dans cette perspective pessimiste, le café offre un beau contre-exemple. Et il n’est pas le seul.
Emblématique du french paradox, la consommation de vin présente elle aussi des avantages. Une étude danoise parue dans les Annals of Internal Medicine du 19 septembre 2000 enfonce le clou. Elle montre que chez les buveurs modérés (entre un et sept verres par semaine), la mortalité due aux maladies coronariennes et aux cancers est moins élevée que chez les abstinents. Les buveurs plus intensifs voient leur risque relatif de décès augmenter mais il faut tout de même une consommation d’une demi-douzaine de verres de vin par jour pour que ce risque dépasse de nouveau celui des abstinents.
Une étude plus ancienne, parue dans la revue British Medical Journal du 20 décembre 1997, montre l’importance du plaisir sexuel pour la santé. Basée sur une cohorte composée exclusivement d’hommes, elle rapporte une augmentation du risque de décès, toutes causes confondues, chez les personnes dont la fréquence d’orgasmes est considérée comme basse (moins d’une fois par mois).
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