Quoi de neuf Docteur… en 2023?
1. Un médicament inédit pour lutter contre l’obésité
Avec le Pr Zoltan Pataky, responsable de la Consultation d’obésité d’adultes et responsable de l’Unité d’éducation thérapeutique du patient aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG)
Tout juste approuvé par Swissmedic, le traitement baptisé «Wegovy» s’apprête à être mis sur le marché. Destiné à favoriser la perte de poids en cas de surpoids ou d’obésité, il repose sur le sémaglutide, une molécule capable de mimer l’action d’une hormone intervenant dans la régulation de l’appétit, le glucagon-like peptide-1. Se présentant sous la forme d’un stylo-injecteur contenant le traitement que le patient devra s’administrer chaque semaine par voie sous-cutanée, Wegovy sera soumis à un protocole strict. Il sera réservé aux adultes présentant un indice de masse corporel (IMC)* supérieur à 30 kg/m² ou plus, ou compris entre 27 et 29,9 kg/m² et associé à une maladie cardiométabolique (hypertension artérielle ou diabète de type 2, par exemple). Le traitement supposera un suivi régulier pour vérifier son efficacité, mais surtout pour faciliter les changements hygiénodiététiques (une alimentation équilibrée et une activité physique régulière) qui sont les prérequis indispensables à son action.
2. Une app pour mieux comprendre la grossesse
Avec Eva Gerbier, étudiante doctorante au Département Femmes-mères-enfants du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Difficile à croire tant le sujet est incontournable et pourtant, la grossesse reste entourée de nombreuses zones d’ombre pour la science. Rapidement la cause apparaît: pour limiter tout risque pour elles-mêmes ou leurs enfants, les femmes enceintes ou allaitantes sont généralement exclues des essais cliniques. Résultat: un manque de connaissances freinant les soins spécifiques qui pourraient leur être proposés. D’où l’idée née au sein de la maternité du CHUV: proposer une application mobile permettant la participation active des patientes à la recherche scientifique (au travers de questionnaires hebdomadaires, par exemple) tout en leur apportant en retour informations sur la grossesse et outils pratiques (agenda intelligent, entre autres). Baptisé Datamama, le projet a été lancé en juillet 2022 et prévoit de publier sous peu ses premiers résultats.
Plus d’infos: datamama.ch
3. Un détecteur de coronavirus dans l’air ambiant
Avec Jing Wang, professeur à l’Institut d'ingénierie de l'environnement de l'École polytechnique fédérale de Zurich
Son nom: CAPS. Son pouvoir: détecter en temps réel la quantité de virus SARS-CoV-2 dans l’air ambiant, mais également évaluer le risque d’infection sur le lieu étudié. Mis au point par une équipe de chercheurs de l'École polytechnique fédérale de Zurich et du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche de Dübendorf, le système repose sur un biocapteur inédit alliant des innovations optiques et thermiques pour quantifier avec précision la charge virale. Après avoir fait ses preuves au sein d’hôpitaux et de maisons de retraite, tant dans les chambres des personnes infectées par le Covid-19 que dans les couloirs adjacents, l’usage du système pourrait être étendu à des lieux particulièrement fréquentés (gares par exemple) et se perfectionner en permettant, entre autres, une communication immédiate des résultats. À noter qu’il pourrait également révolutionner le dépistage individuel lui-même, ayant montré une performance similaire à celle de tests PCR.
4. Un implant télescopique pour traiter la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA)
Avec le Pr Thomas J. Wolfensberger, responsable de l’Unité de chirurgie vitréorétinienne et directeur médical de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin à Lausanne
Se traduisant notamment par l’impression d’avoir une «tache noire» devant les yeux, la DMLA résulte de la dégradation de la macula, partie centrale de la rétine essentielle à l’acuité visuelle. Si des traitements existent, ils ne permettent pas toujours de ralentir la progression de la maladie, qui aboutit alors à une vision de plus en plus laborieuse. D’où l’espoir apporté par l’implant télescope miniature SING IMT (Smaller-Incision New-Generation Implantable Miniature Telescope). Son principe: agrandir 2,7 fois (depuis l’intérieur de l’œil donc) les images faisant face à la personne et les projeter sur des zones saines de sa rétine pour améliorer la vision centrale. Développé par Samsara Vision, sa première implantation suisse a été réalisée en août 2021 à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin.
5. Des ultrasons pour freiner les tremblements
Avec la Dre Vanessa Fleury, neurologue aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG)
La technique est novatrice et synonyme de qualité de vie retrouvée pour la douzaine de patients qui ont déjà pu en bénéficier aux HUG depuis 2021. Souffrant de tremblements liés à une pathologie neurologique (tremblement essentiel ou maladie de Parkinson notamment), ces personnes se sont vu proposer un traitement par ultrasons focalisés. Son objectif: diminuer les tremblements en dirigeant des faisceaux ultrasons sur les circuits de neurones à l’origine de ces symptômes, sous un guidage par IRM, sans ouverture de la boîte crânienne. Provoquant une microlésion dans la zone stratégique en question, cette action ultra-ciblée et rapide «éteint» le signal anormal et les tremblements en résultant. Cette thérapie non invasive et non ionisante (à la différence des traitements utilisant la stimulation cérébrale profonde ou le gammaknife, respectivement) reste soumise à des conditions strictes en raison de possibles effets secondaires (troubles transitoires de l’équilibre et de la sensibilité, par exemple) et de contre-indications existantes (anévrisme ou autres lésions cérébrales, traitement anticoagulant ne pouvant être interrompu pendant quinze jours).
6. Un nouveau dispositif pour prévenir le suicide des jeunes
Avec la Dre Anne Edan, responsable de MALATAVIE-Unité de crise et médecin adjointe au Service de psychiatrie de l’enfant et l’adolescent des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG)
Adapté d’un programme existant pour les adultes, AdoASSIP (Attempted Suicide Short Intervention Program) est une intervention spécifique destinée aux adolescents ayant fait une tentative de suicide. Basé sur le récit de l’événement passé, le programme vise à aider l’adolescent à mieux comprendre la «logique» du processus suicidaire, mais également à identifier ses ressources, ses besoins, ainsi que les signaux d’alerte d’une crise. Un plan de sécurité est également élaboré pour prévenir le risque de récidive. Si le programme s’articule autour de quatre séances distinctes, il comprend également un suivi d’au moins deux ans et est à associer à une prise en charge psychiatrique-psychothérapeutique sur le long terme. En cours d’implantation dans treize cantons en Suisse, AdoASSIP est notamment disponible dans les cantons de Zurich, Genève et Vaud.
Plus d’infos: www.adoassip.ch
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* IMC = poids (kg)/taille (m)2
Paru dans Le Matin Dimanche le 01/01/2023