Quand le désir joue aux montagnes russes

Dernière mise à jour 22/08/18 | Article
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Changements hormonaux, stress, problèmes de couple et idées reçues: beaucoup de facteurs peuvent influencer notre libido.

Au cours d’une vie, le désir sexuel est soumis à des hauts et des bas.Dans notre société basée sur la performance, difficile de parler de son manque de libido. Presque tout le monde y est pourtant confronté un jour ou l’autre. Un phénomène complexe, dont les contours ne sont pas toujours faciles à dessiner. Si certaines personnes ne se plaignent pas d’une baisse de leur désir, 5 à 10% de la population le vit comme une véritable souffrance.

Mais au fond, à quoi correspond réellement cette libido qui nous préoccupe tant? «Elle peut être définie comme des pensées érotiques, une sorte d’appétit sexuel, qui constitue habituellement les prémisses de l’excitation, explique le Dr Christian Rollini, sexologue et psychiatre à Nyon. On parle de trouble de la libido lorsque le manque de désir entraîne un mal-être».

Une question d’hormones…

La sexualité, ça s’apprend!

«Quand on s’aime, le désir vient naturellement!» Une idée reçue très répandue dans le domaine de la sexualité. Au début d’une relation, les pulsions et la nouveauté aident à se poser peu de questions. Mais lorsque le feu passionnel des premiers temps commence à se calmer, la communication devient essentielle. Or, beaucoup de couples ne se parlent pas. «Souvent, nous projetons sur l’autre ce que l’on aimerait que l’on nous fasse, commente le Dr Christian Rollini, sexologue et psychiatre à Nyon. Mais chacun a des envies personnelles et cela risque de créer un décalage, puis de l’éloignement». Oser s’exprime : un apprentissage qui ne peut donc qu’être bénéfique. Une personne à l’aise avec sa sexualité va plus facilement échanger avec son partenaire, avoir de l’indulgence et parler de ses propres désirs. «C’est vraiment quelque chose que l’on peut apprendre et entraîner, encourage le sexologue. Un couple qui communique verra alors plus facilement ce qui peut continuer d’être créé, ensemble».

 

Afin de comprendre pourquoi notre désir fait parfois le yoyo, la biologique apporte déjà quelques réponses. Les premières manifestations de la libido apparaissent à l’adolescence, sous l’impulsion des hormones qui se multiplient. Elle reste ensuite généralement stable de 15 à 35 ans. Puis vers 40 ans, le désir peut être perturbé, vers une augmentation comme vers une baisse. Si nous entendons surtout parler des grossesses (lire encadré) qui chamboulent le système hormonal, les hommes sont aussi concernés. «Des études ont montré que les jeunes papas ont souvent un taux de testostérone très bas, constate le Dr Rollini. Eux aussi peuvent donc avoir moins de libido après l’arrivée d’un enfant».

Les variations hormonales sont cependant plus brusques chez les femmes. A partir de la phase de pré-ménopause, le taux d’œstrogènes baisse sensiblement. Deux tiers d’entre elles ont alors moins d’activité sexuelle, sans que cela ne leur pose nécessairement de problème. Malgré quelques changements physiques, comme parfois plus de sécheresse vaginale, d’autres continuent à avoir une sexualité active et épanouie. Chez l’homme, l’andropause est plus progressive. Entre 60 et 70 ans, une baisse de désir commence généralement à s’installer, petit à petit.

… Mais pas que!

Les hormones sont pourtant loin d’être les seules responsables. Quand le manque de libido affecte la qualité de vie d’une personne, il est important d’effectuer un bilan médical. «Cette baisse peut dans certains cas être liée à une pathologie physique ou être le symptôme d’une dépression. Afin d’exclure ces causes plus graves, il est important de s’adresser à un spécialiste», recommande le spécialiste.

Lorsqu’un trouble de la libido est diagnostiqué, des causes psychosociales ou relationnelles rentrent très souvent en ligne de compte. Le stress et les problèmes de couple ont notamment de grandes répercussions sur la vie sexuelle. D’autre part, la pression sociale véhicule beaucoup d’idées culpabilisantes à ce sujet. Dans le cadre d’une thérapie, un sexologue va commencer par informer et dédramatiser. «La première étape, c’est de comprendre comment la personne s’est construite au niveau de sa sexualité, détaille le Dr Rollini. C’est encore souvent un sujet tabou. En identifiant les pensées inhibantes, on apprend à déculpabiliser». 

En cas de besoin, des exercices à faire chez soi, seul ou en couple, peuvent être proposés. Renouer avec son corps, se regarder dans une glace, s’autoriser à se masturber: autant d’étapes qui peuvent aider à se reconnecter avec ses sensations.

Et finalement, que le désir sexuel soit élevé ou non, une chose reste essentielle: que chacun s’écoute et se sente en harmonie avec son corps et ses besoins.

Lily*, 24 ans: «Depuis mon accouchement, mon bébé est ma priorité»

La grossesse est un vrai chamboulement au niveau hormonal et relationnel. Souvent, la libido marque une nette baisse pendant la période post-partum. «Lorsque je suis tombée enceinte, mon désir sexuel a vraiment été boosté, raconte Lily. Même si mon corps changeait, je me réjouissais tellement d’être maman que ça ne m’a pas empêchée de me trouver belle, au contraire. Je ne me suis jamais sentie aussi féminine et ça m’a aidé à lâcher prise par rapport à mes complexes. Après l’accouchement par contre, c’était autre chose. Mon bébé est devenu ma priorité. Je suis tellement accaparée par ma nouvelle vie que le désir passe un peu au second plan. Lorsque j’allaitais, ça me faisait bizarre que ma poitrine puisse aussi être sexualisée. Et puis, je réalise que mon corps ne sera plus jamais comme avant et ça me bloque. Je me rends aussi compte que mes envies dépendent beaucoup de l’état de mon enfant. Quand il fait des crises, que je me fais du souci pour lui ou que je suis très fatiguée, je suis moins disponible pour penser à autre chose. Peut-être que tout dépend de la façon dont on investit son rôle de maman. Pour moi, même plusieurs mois après l’accouchement, ce n’est pas toujours facile de renouer avec mon corps et mes envies de femme».

Retrouver le désir prend parfois du temps au sein d’un jeune couple parental. C’est un processus tout à fait normal. Il est donc important de déculpabiliser et d’aménager des moments juste à deux, pour que la séduction puisse tranquillement reprendre sa place.

 * Prénom d’emprunt.

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Paru dans le Quotidien de La Côte le 08/08/2018.

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