Soleil: notre meilleur ami ou ennemi?
Il est distant de 150 millions de kilomètres mais paraît bien plus proche quand vient l’été. De tout temps, le soleil a accompagné l’être humain: il rythme nos journées et influence notre environnement. Son impact sur notre santé est aussi important… et pas toujours positif.
Un astre, baromètre de nos humeurs
Une horloge solaire
La quantité de lumière que nous recevons influence notre rythme d’éveil et de sommeil, mais également notre humeur, explique le Pr Jean-Michel Aubry, chef du Département de santé mentale et psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève. Une zone spécifique de notre cerveau, le noyau suprachiasmatique, est le «chef d’orchestre» de cette régulation.
Déprime sans soleil
L’hiver, 1 à 2% de la population connaît une dépression dite saisonnière, liée au manque d’ensoleillement. Les personnes touchées connaissent tristesse, manque d’énergie et de plaisir, surcroît de sommeil (ce qui la distingue de la dépression classique) et une augmentation de l’appétit pour des aliments riches en hydrates de carbone. «On la connaît bien sous nos latitudes, confie le Pr Aubry, et d’autant plus sous les stratus de l’arc lémanique.»
Les pamplemousses augmenteraient le risque de cancer
Les personnes qui mangent plus de 10 pamplemousses par semaine auraient un risque de mélanome accru d’un tiers, selon une étude récente publiée dans le Journal of Clinical Oncology. Les pamplemousses, comme d’autres agrumes, sont en effet riches en psoralène, un composé chimique qui accroît la sensibilité de la peau au soleil. Cette augmentation du risque est cependant faible quand on la compare au fait d’être roux (quatre fois plus de risques de mélanome) ou à celui d’avoir un frère, une sœur ou un parent atteint d’un mélanome (jusqu’à dix fois plus de risques).
Côté négatif, le coup de soleil vient évidemment à l’esprit. «C’est une brûlure au premier degré causée par les ultraviolets (UV) que produit le soleil, explique le Dr Bernard Noël, dermatologue au Mont-sur-Lausanne. Elle peut même aller jusqu’au deuxième degré, voire davantage. » Dans le premier cas, la brûlure ne touche que l’épiderme, la couche supérieure de la peau. Dans le second, plus grave, le derme qui se trouve plus loin sous la peau est également atteint.
Comme toute brûlure, le coup de soleil est douloureux et la peau touchée prend une couleur rouge. Pour le traiter, «il faut hydrater la peau, avec une crème par exemple, et attendre sa disparition», recommande le spécialiste. Mieux vaut toutefois consulter un médecin en cas de cloques multiples ou étendues, ou si de la fièvre ou une altération de l’état général apparaissent. A noter que les cloques ne doivent pas être percées.
Protection nécessaire
Le coup de soleil ne provoque pas seulement un embarras passager. Chaque coup de soleil reçu, spécialement durant l’enfance, augmente le risque d’être atteint d’un cancer de la peau plus tard dans sa vie. On estime ainsi que cinq coups de soleil entraînent un doublement du risque de développer un mélanome, le cancer de la peau le plus dangereux.
Face au risque de cancer cutané, nous ne sommes pas égaux, poursuit le Dr Noël. «Plus votre peau est claire et plus vous avez de grains de beauté, plus le risque de développer un cancer est élevé. Si vous avez de nombreux grains de beauté plutôt grands il est important de les faire examiner par un dermatologue.» De même, toute «tache» suspecte, irrégulière, saignant ou évoluant rapidement doit être montrée à un spécialiste.
Une chose est cependant sûre, que l’on soit roux ou noir le risque de cancer est proportionnel à l’exposition au soleil: «Plus on s’expose, plus le risque de cancer de la peau est grand», résume le dermatologue. On comprend donc mieux les recommandations usuelles pour protéger sa peau: éviter le soleil quand il est le plus fort, entre 11 h et 15 h, se couvrir avec des habits et un chapeau, et protéger le plus possible les enfants, en les mettant à l’ombre ou en les habillant.
L’écran total n'existe pas
Depuis bientôt presque dix ans, suite à une décision de la Commission européenne, le terme «écran total» a été officiellement interdit. Une crème solaire est un filtre qui va protéger de manière plus ou moins grande du rayonnement UV. Elle pourra donc atténuer les effets du soleil, mais son efficacité décroît avec le temps, et dépend de différents paramètres, tels que la quantité de crème appliquée, la chaleur, les frottements cutanés, la sudation, l’eau, etc. Une crème solaire ne protège donc pas totalement du soleil et son efficacité contre le mélanome n’est pas prouvée.
Crème solaire: un faux ami
Attention à ne pas fonder des espoirs irréalistes sur la crème solaire: «Elle protège certes contre les coups de soleil, remarque le Dr Noël, mais pas totalement. De plus, elle incite à s’exposer davantage. Or, ce n’est pas parce qu’on en a mis que l’on peut rester des heures au soleil sans risques liés au cancer. Les règles de protection doivent s’appliquer à l’identique.»
Même si le soleil peut avoir des conséquences néfastes sur notre santé, nous en avons besoin pour vivre. Il a un net effet antidépresseur et nous permet d’alterner entre périodes de veille et de sommeil. Mais il est aussi impliqué dans la bonne santé de nos os. «Ceux-ci ont besoin de vitamine D pour fixer différents sels minéraux comme le calcium ou le phosphate, explique le Dr Olivier Lamy, chef du centre des maladies osseuses du Centre hospitalier universitaire vaudois. Cela assure que leur architecture est de bonne qualité.» Les UV du soleil activent un précurseur de vitamine D contenu dans notre peau, fournissant ainsi 80 à 90% de la vitamine D dont nous avons besoin.
Os renforcés
Chez l’enfant, le manque de soleil et de vitamine D peut entraîner un rachitisme, autrement dit des os mal construits et des troubles de la croissance. Chez l’adulte, les mêmes causes produisent une ostéomalacie, soit des os insuffisamment minéralisés, entraînant des douleurs osseuses et musculaires: on observe cette maladie chez certaines femmes voilées et chez des adolescents qui ne sortent plus de chez eux. Chez la personne âgée, enfin, la masse osseuse se maintient plus longtemps si l’apport de vitamine D est suffisant.
D’où la question que beaucoup se posent: dans notre gestion du soleil, devons-nous privilégier la santé de notre peau ou celle de nos os? En réalité, nul besoin de choisir: pour assurer nos besoins en vitamine D, il suffit de quinze minutes de soleil sur une petite surface de peau découverte (bras ou jambes, par exemple), trois fois par semaine. On est donc loin du bain de soleil excessif. Cette capacité de la peau à fabriquer de la vitamine D diminue toutefois avec l’âge, raison pour laquelle des suppléments de vitamine D sont souvent prescrits à partir de 65 à 70 ans.