Workaholic: voulez-vous savoir si vous en êtes un/une?
Le workaholic est bien plus qu’un simple «bourreau de travail». Il ne se contente pas d’abattre une quantité phénoménale de travail : il se tue à petit feu – ou presque – à son établi. Il le fait pour nourrir sa propre addiction. Il n’est pas mu par une foi idéologique (ex: les exploits du mineur soviétique Alekseï Grigorievitch Stakhanov; 1905-1977).
Ce phénomène contemporain prend une dimension chaque jour plus importante avec la disparition (du fait de la Toile notamment) des frontières qui séparaient le monde de la sphère professionnelle de celui de la vie privée. De ce point de vue les ordinateurs portable et les multiples instruments de la téléphonie mobile sont de grands pourvoyeurs d’assuétude au labeur. Et ceci est vrai à l’échelon planétaire personne ne semblant soucieux de prendre la mesure de ce qui, pour le coup, constitue bien un vrai problème de santé publique.
La nouveauté dans ce domaine est simple et nous vient du Nord. Des chercheurs norvégiens et britanniques viennent d’annoncer avoir mis au point un nouvel outil d’évaluation de la dépendance au travail. Baptisé «The Bergen Work Addiction Scale» ce test est publié dans le dernier numéro du Scandinavian Journal of Psychology. Ce travail original a été dirigé par Cecilie Schou Andreassen, jeune psychologue clinicienne de la faculté de psychologie de l'Université de Bergen.
Ce test a été élaboré et validé auprès de 12.135 salariés norvégiens travaillant dans plusieurs secteurs de vingt-cinq entreprises différentes.
L’échelle retient au final sept critères essentiels caractéristiques de l’addiction. Soit: le caractère constant de la préoccupation constante, la modification de l’humeur (agitation ou irritabilité en cas d'impossibilité), le besoin impératif d'augmenter l'intensité ou la fréquence, le désintérêt (pour d’autres activités), l’apparition de conflits, la poursuite du comportement d’addiction en dépit des problèmes croissants qu’il provoque et la survenue récurrentes de rechutes.
Ici ces sept critères sont pondérés en fonction de leur importance ou de leur fréquence: 1 (jamais); 2 (rarement); 3 (parfois); 4 (souvent); 5 (toujours).
En pratique les résultats des tests obtenus et analysés par les chercheurs démontrent que l'échelle permet d’établir de manière fiable une distinction entre les workaholics (entité qui ne correspond pas exactement à celle de bourreaux de travail) et tous les autres.
Testez-vous:
A. Vous réfléchissez souvent à la manière dont vous pourriez libérer plus de temps pour travailler,
B. Vous passez beaucoup plus de temps à travailler que vous l’aviez initialement prévu,
C. Vous travaillez, au fond, dans le but de réduire un sentiment de culpabilité, d'anxiété, d'impuissance ou de dépression,
D. Plusieurs personnes vous ont déjà conseillé (ou vous conseille) de réduire votre temps de travail mais vous ne les écoutez pas,
E. Vous devenez très vite stressé si vous êtes soudain dans l’impossibilité de travailler,
F. Vous faites passer votre travail loin devant vos activités préférées, vos loisirs, ou des activités physiques,
G. Vous travaillez tellement que cela a désormais des influences négatives sur votre santé.
Interprétation:
Si vous avez répondu «souvent» ou «toujours» dans au moins 4 de ces 7 items il faut vous rendre à la raison: vous êtes bien devenu un workaholic. Ce qui ne veut pas dire, bien au contraire, que vous ne souffrez pas d’autres formes d’assuétudes, à l’alcool et/ou au tabac; voire à d’autres substances psychostimulantes moins autorisées par la loi française.
Reste alors à trouver, au plus vite et au mieux, les chemins de l’aide médicale et psychologique. En théorie la médecine du travail devrait jouer ici un rôle majeur. Mais elle se heure souvent en pratique au fait que le «workaholic pollyaddict» est dans un processus massif de déni. Au fait aussi que cette addiction est le plus souvent perçu est vécue à mi chemin du travail et du privé comme l’expression du libre arbitre de celui qui souffre. Peut-être est-ce là une résurgence contemporaine de la servitude volontaire traitée en son temps sous la forme d’un célèbre Discours par le jeune (il avait dix-huit ans) Etienne de La Boétie (1530-1563)
En toute hypothèse l’approche et les préoccupations norvégiennes viennent compléter une autre récente étude, évoquée sur Planetesante décryptant les liens entre le fait de travailler trop et le risque de souffrir de dépression.