Bien vieillir: quelques conseils pour rester en forme
Comment est-il possible de battre un record physique à 100 ans?
En 2017, le Français Robert Marchand épatait le monde entier. Alors âgé de 105 ans, le cycliste battait son record personnel en parcourant plus de 22 kilomètres en une heure au vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines. Un résultat qui n’étonne pourtant pas les spécialistes du vieillissement. Un muscle spécifique bien entraîné est en effet capable de performances spectaculaires, même à un âge avancé. Ce record risque donc bien d’être un jour battu, étant donné le nombre croissant de personnes âgées très actives. En revanche, l’exploit serait plus difficile à réaliser dans le cadre d’un sport demandant beaucoup d’efforts cardiovasculaires. Contrairement aux muscles, l’élasticité pulmonaire et les capacités cardiaques diminuent avec le temps, malgré leur stimulation.
Conseil 1: Renoncer au tabac
La fumée a un grand impact négatif sur le processus de vieillissement. Certaines substances toxiques émises par le tabac brûlé s’attaquent aux poumons et aux vaisseaux. Et ce n’est plus un secret, fumer augmente le risque d’être touché par un cancer ou une maladie cardio-vasculaire. De nombreux fumeurs souffrent également de BPCO (broncho-pneumopathie chronique obstructive). Cette maladie respiratoire (toux, dyspnée, expectorations, etc.) altère sérieusement la qualité de vie. De plus, la fumée favorise les marques physiques du vieillissement comme les rides et un teint de peau grisâtre. Heureusement, «arrêter la cigarette à n’importe quel âge est bénéfique», encourage le Pr Christophe Büla, chef du Service de gériatrie au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Après dix à quinze ans d’arrêt, les risques cardiovasculaires et de développement de cancer se normalisent.
Conseil 2: Rester actif
S’il y a un conseil qui marche à tous les coups, c’est sans doute celui-ci. L’activité physique permet de maintenir le bon fonctionnement de nombreuses structures du corps. «Lorsque les muscles sont très mobilisés, leur atrophie reste mineure», commente le Pr Karl-Heinz Krause, spécialiste en biologie du vieillissement aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Et les bénéfices de l’activité physique ne s’arrêtent pas là : elle stimule le renforcement musculaire et osseux, prévient les maladies cardiovasculaires, améliore l’équilibre et la coordination, crée du lien social, etc. «Être actif a aussi des effets directs au niveau cérébral, ajoute le Pr Christophe Büla. Cela stimule la neuroplasticité et la création de nouvelles synapses. Le risque de démence est plus faible et l’apparition de symptômes cliniques au niveau cognitif est retardée».
Conseil 3: Maintenir une riche vie sociale
La solitude, c’est un peu le grand mal du siècle. Or, le lien social est primordial pour garder le moral. Que ce soit à travers la famille ou les amis, avoir un réseau social dense est très stimulant. Cela donne l’occasion de sortir, d’avoir du soutien mais aussi de donner de soi. Les personnes centenaires ont d’ailleurs toutes en commun une vie sociale riche. Côtoyer des jeunes générations aide à garder de l’énergie et l’envie d’être actif, physiquement et intellectuellement parlant. L’amour pour vos proches, un ingrédient miraculeux pour prendre un bon coup de jeune!
Conseil 4: Soigner son alimentation
Ce qui est bon pour le cœur est bon pour le cerveau! Manger varié et équilibré est un moyen de prévention contre les maladies cardiovasculaires et ralentit aussi le vieillissement cognitif. Les végétaux (fruits, légumes, etc.), le poisson (deux fois par semaine) et l’huile d’olive sont à privilégier. Il est en revanche conseillé de limiter sa consommation de viande.
Attention également à l’excès de sucre, qui peut être associé au diabète mais aussi au syndrome métabolique, au cancer et à la maladie d’Alzheimer. Privilégiez les plats «faits maison» et évitez autant que possible les boissons sucrées comme les sodas ou les jus de fruits industriels. Quant à l’alcool, la question reste controversée. Il semblerait toutefois qu’un verre de vin rouge par jour soit tout à fait acceptable.
Conseil 5: Eviter l’obésité
Pour garder la meilleure forme possible, la maigreur tout comme le surpoids sont à éviter. Idéalement, il faudrait parvenir à maintenir un indice de masse corporel entre 23 et 27, jusqu’à l’âge de 70 ans environ. Si votre IMC dépasse les 30, il est très important de réagir car votre santé est probablement en danger. En effet, l’obésité est une maladie très complexe et multifactorielle qui réduit l’espérance de vie. Hypertension, diabète, risque cardiovasculaire, dégénérescence maculaire: elle peut engendrer de nombreux maux. De plus, elle réduit la mobilité et risque alors d’enclencher un cercle vicieux : moins on est actif, plus le poids risque de continuer d’augmenter. A partir d’un certain âge cependant (70-80 ans), un IMC plus élevé constitue une sorte de «réserve» en cas de maladie.
Conseil 6: Être curieux
Se cultiver, aller au théâtre, lire, écouter de la musique: autant d’activités qui entraînent une stimulation cognitive. Si leurs effets sur la longévité ont moins été étudiés, il semblerait qu’un niveau d’éducation élevé permette de résister plus longtemps aux premiers symptômes de démence. «Si on a beaucoup de synapses, on peut plus facilement s’offrir le luxe d’en perdre quelques-unes, sourit le Pr Christophe Büla. Et même à un âge avancé, on peut continuer d’influencer sa trajectoire de vieillissement». Des exercices spécifiques comme les mots croisés ou les sudokus peuvent notamment permettre d’améliorer son attention visuelle, sa vitesse de réaction, de raisonnement ainsi que ses fonctions exécutives.
«Je suis passionné de poésie anglaise»
Eric, 86 ans
«J’ai mené une longue carrière à Genève en tant qu’enseignant d’anglais. Déjà avant ma retraite, j’ai commencé à me passionner pour Thomas Hardy, considéré comme le plus grand poète anglais. A la mort de ma femme, pour m’occuper, j’ai entrepris de traduire en français certains de ses poèmes. Avec Françoise, une amie de longue date rencontrée à l’université, nous avons consacré plusieurs années à ce travail. En 2008 est né de notre collaboration un livre sur Hardy, contenant cent poèmes, des images et des extraits de musique. En parallèle, nous nous sommes aussi intéressés aux poètes romantiques. C’est ainsi qu’en 2012, notre second ouvrage intitulé Rousseau, les arts de la poésie anglaise, a été publié.
Chaque jour, je passe au moins une heure à faire des mots croisés. Je lis aussi beaucoup et écris encore volontiers des commentaires au sujet de Thomas Hardy. En juillet dernier, j’ai eu le plaisir de me rendre dans le Dorset en Angleterre, afin d’assister à une conférence consacrée à ce poète, qui a lieu tous les deux ans. Ces activités intellectuelles m’occupent et me stimulent. Je fais également de la marche chaque jour et c’est sûrement grâce à tout cela que je reste en forme. On dit aussi qu’il y a une part de génétique. Mon grand-père est décédé à l’âge de 100 ans, ce qui était incroyable pour l’époque! Mais moi je ne souhaite pas forcément y arriver. Le jour où je ne comprendrai plus ce que je lis, je crois que ça ne vaudra plus la peine (sourire)».
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Publié dans le supplément «Votre santé» de La Côte Hebdo en novembre 2018.